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« Astrakan » : une enfance sans refuge

Très abouti, le premier long-métrage de David Depesseville plonge dans la psyché tourmentée d’un jeune garçon orphelin turbulent placé en famille d’accueil.

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L’enfance sans amour a donné au cinéma français quelques-uns de ses plus beaux films : Les Quatre Cents Coups (1959), de François Truffaut, L’Enfance nue (1968) et La Maison des bois (1971), de Maurice Pialat, De bruit et de fureur (1988), de Jean-Claude Brisseau, ou encore, plus proche de nous, les films de Laurent Achard. Il faudrait, avant tout, s’en tenir à cette éthique cinématographique : observer le monde depuis le regard d’un petit garçon livré à lui-même, que tout soit neuf, âpre et coupant comme les premières fois d’un orphelin. C’est sous l’égide de ces cinéastes que se place Astrakan (du nom de cette laine noire que l’on prélève sur des agneaux tués dans le ventre de leur mère) premier long-métrage très abouti de David Depesseville qui cite également les films placidement douloureux de Gérard Blain.

Samuel, un orphelin turbulent de 12 ans, est placé depuis quelques semaines chez Marie, qui vit dans le Morvan avec son mari et ses deux enfants. La nourrice (Jenny Beth, juste, concrète et minimale) oscille entre tendresse maternelle et exaspération, et ne prend jamais la peine de cacher à Samuel les raisons de son hospitalité : la somme qu’il lui rapporte est indispensable pour faire vivre sa famille. Parce qu’il est mal aimé, le garçon est plongé dans un bain d’événements arbitraires : impossible de prévoir si la prochaine expérience sera un ravissement (la classe de neige, le premier cinéma) ou une brûlure (les punitions du monde adulte).

Violence aléatoire

Chaque sensation opère comme un coup de couteau sur cette psyché en état d’alerte permanente, livré à une violence aléatoire, à tout ce qui tombe sur l’enfance sans refuge. Cet arbitraire, Depesseville en rend compte superbement, en restant arrimé au regard de son héros, errant dans ce petit théâtre primordial comme un conte qui pourrait être l’histoire du Chaperon rouge tentant d’échapper au loup (l’oncle, dont on comprend par touches qu’il est pédophile).

Le réalisateur saisit à pleines mains un collier d’affects, de sensations, un malheur sans âge dont il brouille sciemment les repères temporels. Astrakan, ce pourrait être aujourd’hui ou les années 1970, car l’enfance est moins une étape de la vie qu’une sorte de pays cinématographique qu’on peut encore parcourir, laissé intact par les puissances émollientes du naturalisme. Si le film s’accroche in extremis à un lyrisme qui contrevient à sa belle placidité de principe, Depesseville parvient à déposer dans nos mémoires ses belles images désespérées.

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