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Atsem : elles ne veulent plus marcher à l’ombre

Atsem : elles ne veulent plus marcher à l’ombre
Patricia, Atsem, consolant et rassurant une enfant de petite section de maternelle, à l’école Saint-Exupéry de Soyaux.

Photos Renaud Joubert

Par Céline GUIRAL - c.guiral@charentelibre.fr, publié le 27 septembre 2022 à 17h19.

Employées par les communes, les Agentes spécialisées des écoles maternelles (Atsem) seront en grève ce jeudi. Indispensables à l’enseignement en classe maternelle, elle souffre d’un manque de reconnaissance.

Elles étaient déjà en grève le 5 septembre dernier, quelques jours après la rentrée. Mobilisés par milliers, dans toute la France et notamment en Charente, à l’appel de la CGT. Elles le seront encore ce jeudi, et « ainsi que le 6 octobre »prochain, précise Cathy Barret, secrétaire générale du syndicat des Petites collectivités de la Charente. Parmi les revendications, les Atsem demandent notamment à toucher la prime de 183 euros (dont bénéficient désormais, depuis le Ségur de la Santé, les puéricultrices, aides-soignants et aides à domicile) et d’intégrer la catégorie B de la fonction publique. Elles militent enfin...

Elles étaient déjà en grève le 5 septembre dernier, quelques jours après la rentrée. Mobilisés par milliers, dans toute la France et notamment en Charente, à l’appel de la CGT. Elles le seront encore ce jeudi, et « ainsi que le 6 octobre » prochain, précise Cathy Barret, secrétaire générale du syndicat des Petites collectivités de la Charente. Parmi les revendications, les Atsem demandent notamment à toucher la prime de 183 euros (dont bénéficient désormais, depuis le Ségur de la Santé, les puéricultrices, aides-soignants et aides à domicile) et d’intégrer la catégorie B de la fonction publique. Elles militent enfin pour une reconnaissance de la pénibilité d’une fonction rémunérée 1500 euros nets pour 41h par semaine.

Ces agentes territoriales de catégorie C qui accèdent au statut après l’obtention d’un CAP Petite enfance doublé d’un concours, sont les ombres sans qui les maternelles ne fonctionneraient pas. Après 20 ans d’un métier « qu’elle aime », Aurélie Simiot, 43 ans, Atsem à Saint-Exupéry, à Soyaux, confie les journées intenses, sur le plan moral comme physique. « Nous entamons les journées à 7h30, avec l’accueil des enfants à la garderie. Puis à la pause de midi, nous assurons le service à la cantine, avant d’encadrer le temps de sieste ». Entre-temps, il y a la gestion des enfants en classe. Et puis, à 16 h 30, « nous rangeons, nettoyons et lessivons l’entièreté de la salle », décrit-elle.

Pour Cathy Barret, secrétaire générale du syndicat des Petites collectivités de la Charente, la profession « féminisée à hauteur de 99 % » n’a cessé de voir ses attributions enfler depuis plusieurs années. « Leur charge de travail est énorme. Elles n’arrêtent pas de la journée, sont ultra sollicitées physiquement, car il leur faut sans cesse porter des enfants, se pencher. La plupart d’entre elles n’arrivent pas en fin de carrière, parce qu’elles sont complètement cassées », souffle la syndicaliste pour qui la reconnaissance de la pénibilité de la profession est urgente.

Et puis, note Patricia, Atsem à Saint-Ex’,les conditions se durcissent sur le plan de l’encadrement : « L’attitude des enfants a beaucoup évolué ces dernières années. Ils sont, à mon sens, beaucoup plus enclins à être dans l’opposition et la négative », explique l’Atsem. Sans compter, l’abaissement de l’âge de l’entrée à l’école : « Lorsqu’ils arrivent, à deux ans à peine, certains portent encore des couches.”, fait observer Aurélie Simiot. “C’est une contrainte nouvelle pour nous. Il n’existe bien souvent même pas un espace pour les changer ».

1500 euros pour 41h par semaine

A l’école Saint-Exupéry toujours, la classe d’Aurélie Bauman accueille là aussi quelque 25 élèves de petite, moyenne et grande section. « Les pipi, caca, bobo et vomi, c’est pour nous », raconte avec un zeste d’ironie Aurélie Simiot, tout en encadrant un atelier peinture.

À ses côtés, « maîtresse Aurélie » juge son homonyme « absolument essentielle ». « Dans cette école, il faut aller à l’autre bout du long couloir pour trouver les sanitaires. Comment pourrais-je bien faire si je dois en accompagner un ? J’emmène tous les autres avec moi ? Je les laisse seuls ? ». L’équation est insoluble. Et les enjeux, vont bien au-delà des pauses pipi. « C’est au cours des années de maternelle que l’on pose, chez l’enfant, les bases du ‘savoir être’, du ‘savoir observer’, du ‘savoir se concentrer’. Nous travaillons également énormément sur la bienveillance, le vivre-ensemble ». Trois années durant lesquelles beaucoup d’acquisitions se font. Une vision que partage, à la Ville de Soyaux, Annie Marais, adjointe en charge de la vie scolaire et de la petite enfance. « Nous comptons cinq écoles maternelles sur le territoire pour 23 Atsem à temps plein. », note l’élue pour qui « la petite enfance doit être une priorité, parce que c’est là que tout se joue”.

Pour Patricia comme pour Aurélie, 1 500 euros nets par mois pour 41 heures hebdomadaires, le métier « mérite d’être revalorisé ». « La profession souffre d’un déficit d’attractivité », regrette Patricia qui, elle, pourtant, « ne se voit pas faire autre chose ». Pour Cathy Barret, celles qui sont à la fois des « dames pipi, dames câlin, agents d’entretien », sont, en sus de cela, « associées à la communauté pédagogique », ce qui exige, là aussi, un investissement de leur part. Des invisibles, version super héroïnes.  

Elles ont l’œil partout, elles sont toujours en mouvement, elles sont indispensables.

Reconnaître la pénibilité

Un jeudi matin, école Saint-Exupéry, à Soyaux. Patricia semble virevolter entre la poignée de tables disposées dans la salle de classe et autour desquelles sont attablés les enfants, entre 3 et 4 ans. Ils sont 27, tous en petite et moyenne section de maternelle. Il est 9 heures du matin, et le fond sonore mêle babillages enfantins, cris et autres pleurs. À 57 ans, sourire généreux, regard clair et cheveux blonds, cette Atsem vit depuis 20 ans à hauteur d’enfant, après une première partie de carrière dans le commerce. « Au bout d’un moment, j’en ai eu marre des adultes », déroule-t-elle en riant. « J’ai eu envie de me consacrer à la petite enfance ».
Au fond de la classe, la voilà désormais accroupie aux côtés d’un petit groupe de « moyens ». Atelier pâte à modeler. « On fait des boules, Agathe », recommande Patricia de sa voix douce, qui veille à ce que chacun progresse dans l’activité. « Super ! Et qu’est-ce qu’on fait quand on a fini ? On range ! ». Trois secondes plus tard, après quelques pas, la dynamique quinqua vient de rejoindre une grappe de tout-petits à l’autre bout de la salle. Soupe à la grimace. Léonie*, joues rouges et larmes de crocodile est inconsolable. Elle veut « maman ». Patricia l’enlace, la rassure. Ainsi va le quotidien des Atsem. « Elles ont l’œil partout, elles sont toujours en mouvement, elles sont indispensables », lâche Laura Bailly, la maîtresse remplaçante. Des rôles pivot, d’autant plus dans la centaine de “classes uniques” que compte le département. Les maîtres et maîtresses qui y enseignent forment des attelages fusionnels avec ces agentes territoriales de catégorie C qui accèdent au statut après l’obtention d’un CAP Petite enfance doublé d’un concours
(1) Prénom modifié