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Au Chili, la folle croissance de l’industrie du saumon, visée pour ses conséquences sur l’environnement

Salmon cages in San Rafel Bajo, Calbuco On Thursday, September 8th. 2022. Puerto Montt. Chile. Cristóbal Olivares pour Le Monde
CRISTOBAL OLIVARES POUR « LE MONDE »
Par Flora Genoux

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ReportageLe Chili est le deuxième producteur mondial de saumon, après la Norvège. Ses exportations ont bondi ces dix dernières années.

Sur l’océan gris, lisse comme un drap, quatorze enclos verts : des cages submergées où les saumons sont engraissés. De nouveau, après un bras de mer, sur une eau rendue bleue, cette fois, par un ciel patagonique aux revirements capricieux : dix, puis douze enclos, plus au large. Le long de la même côte, toujours, une usine de fabrication d’aliments pour poissons d’où émane une odeur âcre. Dans la région de Los Lagos (Les Lacs, 1 000 kilomètres au sud de Santiago), l’industrie du saumon d’élevage est omniprésente : la porte d’entrée de la Patagonie chilienne constitue son cœur historique et, en quête d’eaux pour asseoir sa croissance, elle a continué de s’étaler jusqu’à l’extrême sud, dans la région de Magallanes.

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Colossal, le secteur représente près de la moitié des exportations alimentaires du pays, selon un rapport du Consejo del salmon (Conseil du saumon, l’une des organisations patronales du saumon). Il s’agit même du deuxième produit d’exportation, après le cuivre, la locomotive d’une économie chilienne aujourd’hui en perte de vitesse (la croissance est attendue à 1,8 % cette année puis 0 % en 2023, sur fond d’inflation). Le marché est florissant : les ventes à l’étranger de saumons et de truites ont bondi de 33 % entre 2012 et 2021, représentant près de 650 000 tonnes et plus de 5 milliards de dollars en 2021, selon Salmon Chile (Saumon Chili, l’autre organisation patronale du secteur, rassemblant 60 % de la production).

Une usine de saumon Aquachile, près du village de Pargua, le 8 septembre 2022.
Une usine de saumon Aquachile, près du village de Pargua, le 8 septembre 2022.

Avec un million de tonnes « récoltées » en 2021, selon le terme consacré en aquaculture, le Chili s’impose comme le deuxième producteur mondial, derrière la Norvège. Son principal destinataire : de loin les Etats-Unis, avant le Japon et le Brésil.

Fjords, chenaux maritimes, estuaires préservant les enclos d’élevage de vagues dévastatrices. Mais aussi une mer pure et froide, avec un apport d’eau douce : le sud chilien offre tous les ingrédients pour le développement du saumon qui, bien qu’il soit facilement associé au pays, est une espèce exotique. « C’est le Japon qui a cherché à lancer cette activité au Chili, à la fin des années 1970, pour répondre à la demande de sa population. C’était à l’origine un secteur de petites et moyennes entreprises, artisanal, familial, bien loin des oligopoles aux capitaux en grande partie étrangers, notamment norvégiens et japonais, que l’on connaît aujourd’hui », retrace Jorge Katz, économiste à l’université du Chili. L’idée germe alors de lâcher l’espèce pour la laisser se développer à l’état libre. La greffe ne prend pas et le modèle de l’élevage s’installe avec force dans les années 1980 et 1990, une époque dénuée de considérations environnementales.

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