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Barbezieux : la solitude du pharmacien de campagne

Conséquence, impossible pour Mac Luo Tong de s’échapper...

Conséquence, impossible pour Mac Luo Tong de s’échapper. En cas de contrôle il risquerait gros. « Et puis, vous savez, nous sommes un peu comme un service public. Les gens ont besoin de nos conseils. On doit toujours s’assurer qu’ils comprennent bien le protocole de soins », dit-il. Et le préparateur ne dispose pas des compétences du pharmacien. Or sa pharmacie est ouverte du lundi au samedi. « Maintenant je passe plus de temps avec mes collègues qu’avec ma famille ».

Nous sommes le premier service de santé accessible sans rendez-vous à n’importe quel moment de la journée.

Il ne se plaint pas mais le regrette. « Malgré mes efforts via des réseaux professionnels, je n’ai pratiquement eu aucune réponse ». Un problème assez général dans la profession. On connaît le problème pour les médecins, les kinés, les dentistes. On le sait moins pour les pharmaciens sauf si une officine menace d’être fermée comme à Aubeterre. « C’est vrai pour les pharmaciens, comme pour les préparateurs », complète Jean-Marc Glémot, le pharmacien de Baignes, par ailleurs élu à l’Ordre national des pharmaciens et infatigable défenseur de cette profession, parfois mal connue. « On ne sait pas toujours qu’un diplôme de pharmacien ouvre de nombreuses portes ». Que ce soit en milieu hospitalier, dans l’industrie, en laboratoire.

Fortes pressions pendant le covid

« Et ici, nous sommes entre Angoulême et Bordeaux et je ne suis pas sûr que Barbezieux attire beaucoup les jeunes pharmaciens », redoute Mac Luo Tong. Jean-Marc Glémot, le Rochelais d’origine, veut croire que l’officine en zone plus rurale, cela reste possible et viable. « Nous sommes l’une des professions qui a un très bon maillage sur l’ensemble du territoire et ce que l’on ne voit pas toujours c’est que nous sommes le premier service de santé accessible sans rendez-vous à n’importe quel moment de la journée », note-t-il. Sauf qu’il manque de nombreux pharmaciens ou qu’ils ne s’intéressent pas tous à la pratique libérale et ses contraintes particulières.

Jean-Marc Glémot pointe aussi le covid et le cortège de contraintes qu’il a entraîné. « Les pharmacies ont été très sollicitées pendant cette période avec beaucoup de pression. Je me souviens lorsque l’on a commencé à faire les tests, nous avons dû en réaliser 57 dans la journée. C’était un truc de fou », se souvient-il.

Surtout que le pharmacien n’est pas seulement là pour le conseil au patient, « on doit surveiller les alertes sanitaires, nous avons toutes les vérifications d’ordonnance à assurer, explique Mac Luo Tong. C’est un travail qui ne se voit pas toujours ». Et parallèlement le pharmacien doit respecter les injonctions de sécurité sociale qui rembourse les médicaments.

Enfin, la filière ne forme pas assez de pharmaciens. « La Paces (Première année commune aux études de santé, Ndlr) a été une catastrophe pour nous. Et sur Parcours Sup la filière est mal identifiée », regrette Jean-Marc Glémot. L’Ordre des pharmaciens préconise de simplifier les modalités de reconversions professionnelles, favoriser les passerelles entre les différents métiers de la pharmacie et entend soumettre des propositions pour faciliter la reconnaissance en France des pharmaciens diplômés étrangers.

Mac Luo Tong ne regrette pas son choix. « Dans une pharmacie comme la nôtre on connaît les patients. On les accueille avec le sourire pour désamorcer des situations parfois anxiogènes », explique-t-il. Et puis il travaille avec les médecins de la maison de santé et participe à la filière locale de soins.

Mac Luo Tong n’oublie pas d’où il vient ni ce qu’il doit. « Vous savez, je suis un réfugié arrivé en France à 5 ans. Je dois tout à l’école de la République », sourit-il. Et un peu aussi à lui-même.