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Bassines : à Niort, le procès tourne à la tribune politique

Bassines : à Niort, le procès tourne à la tribune politique
Environ 150 manifestants se sont massés devant les portes du palais de justice.

Photo Julie Desbois

Par Fabien NOUVÈNE - f.nouvene@charentelibre.fr, publié le 28 novembre 2022 à 23h05.

Cinq manifestants anti-bassines, dont trois Charentais, ont été jugés lundi 28 novembre, à Niort. Les prévenus ont quitté le tribunal dès le début de l’audience. Ils en ont fait une tribune politique.

Poing levé, Alexis Baudelin termine sa tirade sur un « no Bassaran »repris par les 150 soutiens anti-bassines amassés au pied des marches du palais de justice de Niort. L’avocat parisien, conseil de deux des cinq prévenus qui comparaissaient ce lundi pour leur participation à la manifestation interdite fin octobre à Sainte-Soline (79), était l’homme de la journée. Et il a brillé par son absence… du prétoire. Il n’a pas entendu les peines de prison avec sursis et d’interdiction de paraître dans les Deux...

Poing levé, Alexis Baudelin termine sa tirade sur un « no Bassaran » repris par les 150 soutiens anti-bassines amassés au pied des marches du palais de justice de Niort. L’avocat parisien, conseil de deux des cinq prévenus qui comparaissaient ce lundi pour leur participation à la manifestation interdite fin octobre à Sainte-Soline (79), était l’homme de la journée. Et il a brillé par son absence… du prétoire. Il n’a pas entendu les peines de prison avec sursis et d’interdiction de paraître dans les Deux-Sèvres. « Nous ne participerons pas à cette parodie de justice », a-t-il lancé avant de sortir, accompagné de ses clients. Décidés à faire de la politique plutôt que du droit.

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Trois Charentais comparaissaient lundi 28 novembre devant le tribunal de Niort pour leur participation à la manifestation interdite du 29 octobre contre les bassines agricoles.

L’avocat l’a assumé dès le début de l’audience. « La participation à cette manifestation est légitime, on veut faire de ce procès un procès contre les bassines », a-t-il défendu devant une salle comble. Et pour établir une défense solide, avec comme témoins des scientifiques à même de « poser le contexte », Me Alexis Baudelin demande le renvoi de l’audience (déjà reportée début novembre). Refus du tribunal. Huées de la rue. « Vous aviez le temps de procéder aux citations (de témoins)“, justifie Eric Duraffour, le président. Joker. « Je demande une suspension de 2h30 », lance Alexis Baudelin, le temps de faire venir Hanna Rajbenbach, avocate des trois autres prévenus. Impensable pour le magistrat. « Vous avez pris un risque. » La défense fait tapis. « Nous refusons d’être présents et il y aura appel. » Les bancs se vident.

«Au mauvais endroit au mauvais moment»

Dehors, les prévenus se font porte-voix du mouvement. « Puisqu’il y a ce procès, on fait en sorte de parler de ce qui est nécessaire, des bassines, de l’environnement », affiche François Bouyat, le Charentais, ancien prof de sport à Barbezieux. Pas risquée la politique de la chaise vide ? « Ce qui est inquiétant c’est que ce combat soit perdu », évacue David Hilbert, de Saint-Claud, lui aussi arrêté à Sainte-Soline. « On demande un moratoire, commence Jacky Lacouture, un ami de François Bouyat. La réponse c’est un débat équilibré, pas de nous traiter d’écoterroristes. » Des arguments balayés par Nicolas Leclainche, le procureur, dans son réquisitoire : « Les questions liées au dérèglement climatique sont légitimes, mais ce n’est pas ici que nous aurons ce débat ».

Devant les micros, les prévenus adoptent la même ligne : ils étaient « au mauvais endroit au mauvais moment ». « N’importe qui aurait pu être à leur place », commente une camarade. Julien Le Guet, porte-parole du collectif Bassines non merci, enfonce : « On entre dans une ère de répression d’État ». Tous jurent ne rien avoir dégradé, ni lancé le moindre caillou. « Peut-être, mais ce qui est interdit, c’est de participer à ce groupement », répond à distance Nicolas Leclainche.

La rue dénonce un procès pour l’exemple. « Ça nous renforce », insiste un manifestant. Dans sa harangue, Julien Le Guet a ainsi appelé à « rester offensifs. Quelles qu’en soient les conséquences. » Le sentiment d’injustice les conforte dans la conviction de mener un combat juste.

Une ferveur incarnée à la barre par André Puygrenier. L’ancien agriculteur et activiste de Courcôme est le seul anti-bassine à être resté dans le tribunal. En qualité de témoin. « J’étais faucheur volontaire, commence le retraité. J’ai commencé en 1998, il y a eu des procès, des peines lourdes, on s’est fait canarder. Et en 2008, les OGM ont été interdits. C’est bien la preuve qu’on avait raison. » Là encore, le procureur essaye de dépassionner. « Peut-être qu’un jour on dira que les bassines ce n’est pas bien, mais ce n’est pas l’objet des débats. »

On veut faire de ce procès un procès contre les bassines.

Il requiert quatre mois de prison avec sursis simple et interdiction de paraître dans les Deux-Sèvres. « Coupables », estime le tribunal. « Ils n’ont pas pris part aux violences, mais ont eu une participation active à la manifestation, juge Eric Duraffour. Il y avait une telle intensité qu’ils ne pouvaient ignorer ce qui se passait. » Il condamne trois des cinq prévenus à deux mois de sursis simple. Deux autres à trois mois de sursis. Ils ont tous interdiction de remettre les pieds dans le département pendant trois ans.

« Le seul fait de manifester fait d’eux des délinquants, bondit au téléphone Me Alexis Baudelin. Cette procédure ne mérite que la relaxe. » Il maintient son intention de faire appel. L’occasion d’un nouveau tour dans le prétoire... et à la tribune.