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Carburants de synthèse : l’Allemagne sur le point d’obtenir gain de cause

La route semble à présent dégagée pour l’adoption définitive de l’interdiction d’immatriculation des véhicules thermiques en Europe à compter de 2035. Mais le feu vert des 27, qui pourrait intervenir dès mardi 28 mars, se fera probablement au prix d’une concession de dernière minute accordée à Berlin : les voitures fonctionnant avec des carburants de synthèse devraient échapper à la nouvelle législation.

C’est tout le sens de l’accord annoncé samedi 25 mars sur Twitter par le commissaire européen à l’environnement Frans Timmermans.

La présidence suédoise de l’Union a annoncé que cet accord serait étudié dès lundi 27 mars par les ambassadeurs des États membres, avant d’être soumis le lendemain à leurs ministres de l’énergie.

Des considérations de politique intérieure

« Les véhicules équipés d’un moteur à combustion pourront être immatriculés après 2035 s’ils utilisent exclusivement des carburants neutres en termes d’émissions de CO2 », s’est d’ores et déjà félicité le ministre allemand des transports, le libéral Volker Wissing.

Cherchant à se refaire – après une série de débâcles électorales – en s’érigeant en « sauveteur » du moteur thermique, son parti, le FPD, a entraîné début mars le gouvernement de coalition allemand dans une démarche singulière qui a irrité nombre de ses partenaires, dont la France. Après avoir été l’un des moteurs d’un passage au tout électrique à l’horizon de 2035 (États membres et négociateurs du Parlement européen s’étaient entendus sur ce texte, approuvé mi-février par les eurodéputés), Berlin a exigé, avant toute signature définitive, qu’une exemption soit accordée aux voitures roulant avec des carburants de synthèse.

Une seule usine dans le monde

Ces carburants sont produits sans pétrole ni biomasse mais à partir de CO2 et d’hydrogène. L’hydrogène est extrait de l’eau par électrolyse, une réaction chimique obtenue par un courant électrique. Le CO2, lui, est capté directement dans l’air ou dans les émissions industrielles. Le but étant que la combustion de ces carburants n’émette pas davantage de carbone que la quantité utilisée pour leur production. Et aussi que l’électricité massivement mobilisée dans ce processus soit tirée de sources renouvelables, du moins bas carbone.

Problème : cette technologie n’en est qu’à ses débuts. Il n’existe pour l’heure qu’une seule usine, située au Chili, qui produise des carburants de synthèse destinés à la commercialisation. Un projet soutenu par Porsche, un constructeur… allemand. Rareté de l’offre et donc prix excessifs font dire aux experts que cette solution sera vraisemblablement réservée aux véhicules de luxe.

Les ONG environnementales, elles, pointent aussi d’autres lacunes, notamment le fait que l’usage des carburants de synthèse émet autant de NOx (oxydes d’azote) toxiques et beaucoup plus de monoxyde de carbone et d’ammoniac que celui du carburant conventionnel E10.

Un mauvais signal

Le coup de théâtre orchestré par Berlin et son probable dénouement ne devraient pas changer fondamentalement la stratégie des constructeurs. Beaucoup déplorent que les Européens aient initialement choisi de leur imposer l’électrique, plutôt que de leur fixer un objectif de décarbonation et de leur laisser le choix d’une technologie ou d’une autre pour l’atteindre. Il n’empêche, tous se sont déjà très largement engagés dans la bataille de l’électrification.

Cette mini-crise sur le point de se clore constitue néanmoins un mauvais signal adressé aux industriels, alors que Volkswagen, séduit par les subventions américaines, vient d’annoncer qu’il mettait sur pause un projet de construction d’usine de batteries en Europe.

Elle pourrait aussi faire croire aux consommateurs comme aux décideurs (par exemple les collectivités mobilisées pour le déploiement des bornes de recharge) que les moteurs thermiques ont encore un bel avenir. Du moins que d’autres ornières pourraient encore apparaître sur l’autoroute européenne du tout électrique.