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Catastrophe du vol Rio-Paris : Air France défend la crédibilité et l'impartialité du procès

Après le houleux final des réquisitions du parquet, le procès de l'accident du vol AF447 a retrouvé un peu de calme à la suite d'une suspension d'audience et du départ d'une partie du public. C'était pourtant le début des plaidoiries de la défense avec le passage à la barre de Maitre Chemarin et Saint-Pierre pour le compte d'Air France. Mais alors que la première s'est illustrée par son calme et son apparente sérénité - forcément plus facile après la relaxe générale demandée par le parquet - le second a haussé le ton pour défendre non pas Air France, mais la pertinence et la crédibilité du procès.

Si Maître Saint-Pierre a donné une telle tournure à sa plaidoirie, assurément surprenante, c'est suite aux propos tenus par les représentants de l'association Entraide et solidarité AF447 après les réquisitions du parquet. Ainsi sa présidente Danièle Lamy a dénoncé devant les médias, une « parodie de justice » tandis que son avocat, Maître Jakubowicz a affirmé que « le parquet n'a pas été libre, il a reçu des instructions ».

Un discours a priori insupportable pour l'avocat d'Air France, qui s'en est insurgé : « C'est un problème grave car cela jette le discrédit sur ce procès et sur une éventuelle décision de relaxe ». Il a au contraire défendu « le travail d'analyse de fond du dossier fait par le ministère public ». Un discrédit ne ferait effectivement pas les affaires d'Air France, particulièrement au moment où le ciel semble s'éclaircir, même si Maître Saint-Pierre a affirmé que son discours aurait été le même si le parquet avait demandé la condamnation d'Air France : « C'est le jeu judiciaire et il faut l'accepter. Ce procès est un modèle de procès, quel que soit le résultat. »

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Airbus n'est pas oublié

L'avocat a poursuivi sa défense du procès, louant sa durée exceptionnelle (neuf semaines), les bénéfices d'une audience contradictoire où chacun entend les mêmes choses et les analyses. Il a déclaré que le procès pénal avait permis « de beaucoup mieux comprendre les racines de l'accident ». Il s'est ainsi opposé à la déclaration faite par Jean-Paul Troadec, directeur du Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) entre octobre 2009 et 2013, lors de son interrogatoire. Celui-ci avait jugé que le procès pénal n'était pas adapté à un accident d'avion.

Et parlant du BEA, Maître Saint-Pierre n'a pas manqué l'occasion d'égratigner son co-accusé en pointant « la proximité » mise en lumière durant le procès entre l'organisme d'investigation, la Direction générale de l'aviation civile, l'Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) et Airbus. Il en a aussi profité pour insister à nouveau sur le rôle prépondérant d'Airbus dans la menée des expertises.

L'avocat est revenu à la charge un peu plus tard en évoquant « la colère d'Air France et de ses pilotes d'entendre Airbus dire que c'est la faute des pilotes ». Et s'il veut bien entendre qu'il n'y a pas de preuve d'un défaut de conception de l'appareil, il pense que « l'avion n'a pas communiqué en temps utile tout ce qu'il savait aux pilotes ». Maître Saint-Pierre a également réaffirmé la ligne de défense de la compagnie, c'est-à-dire qu'il est « impossible de dire quelle est la cause de cet accident », car « quelque chose s'est passé » sans qu'il soit possible de savoir quoi.

L'avocat a aussi tenté de contrer la carte de l'émotion jouée la veille par Maître Jakubowicz et d'autres représentants des parties civiles. Il a ainsi déclaré coup sur coup que « le chagrin ne donne aucun droit sur la justice » et que « le deuil ne permet pas de voter une loi spéciale pour condamner un bouc émissaire ».

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En toute sérénité

Pour sa part, Maitre Chemarin a tranquillement étayé sa défense face au Tribunal. Après s'être félicité du fait que le procès ait pu montrer que « les trois pilotes étaient de bons pilotes », elle a défendu tour à tour la formation et l'entraînement donnés aux pilotes, ou encore l'information qui leur est adressée via plusieurs canaux.

L'avocate a ainsi expliqué qu'Air France est parfois allée au-delà des exigences réglementaires comme pour la formation à la gestion des ressources équipage (CRM), ou encore que la note rédigée en septembre 2008 par l'officier de sécurité des vols (OSV) de la compagnie était bien plus complète et précise que le souvenir que certains pilotes pouvaient en avoir.

D'un ton toujours aussi calme, Maitre Chemarin a poursuivi ses explications et justification. Selon elle, Air France a pleinement pris en compte les rapports d'incident rédigés par les pilotes (ASR), identifiant et rapprochant chaque évènement et l'analysant de nouveau à l'aune du suivant, alors qu'à l'inverse la compagnie n'a jamais été averti par la DGAC des évènements rencontrés par d'autres compagnies, comme Air Caraïbes.

Et dans tous ces points, l'avocate n'a pas hésité à s'appuyer sur les conclusions présentées par le parquet, décidément bienvenues pour la défense.

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