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Censé célébrer la créativité britannique, le Festival du Brexit fait un flop

La plateforme pétrolière désaffectée domine Weston-super-Mare. Un mastodonte d’acier déraciné de son habitat “naturel”, en mer du Nord, puis replanté dans la cité balnéaire décatie du sud-ouest de l’Angleterre. Près du front de mer, “là où se trouve le lido, un lieu autrefois élégant avec ses eaux scintillantes et son plongeoir Art déco, aujourd’hui dans un piteux état”, précise The Daily Telegraph.

Haut de 35 mètres, “le bijou d’ingénierie qu’est la plateforme” s’offre une seconde vie, reconverti en œuvre d’art dans le cadre du festival artistique Unboxed. “Annoncé par Theresa May en 2018, le Festival UK 2022 devait mettre en avant toute la créativité du Royaume-Uni après sa sortie de l’Union européenne”, retrace le Lancashire Telegraph. Rapidement rebaptisé Festival du Brexit, l’événement finit par prendre le nom d’Unboxed.

Avec l’idée, derrière, d’une libération du potentiel britannique après quarante-trois années passées dans l’UE. Un clin d’œil, aussi, au Festival of Britain de 1951, pensé à l’époque pour remonter le moral de la population au lendemain de la Seconde Guerre mondiale à travers l’art, l’industrie et l’innovation. “Mais quand on l’a eu rebaptisé une troisième fois, le sens de son nom, et ce à quoi allaient servir les installations, est devenu très flou”, souligne The Daily Telegraph, quotidien pro-Brexit.

Element inconnu

Personne n’en a entendu parler

À Weston-super-Mare, le journaliste Robin Aitken, enfant de la ville, a peu goûté au See Monster, œuvre censée provoquer une réflexion autour du recyclage et de la protection de l’environnement.

“Dans l’état actuel du projet, la créativité se résume à ceci : quelques jeux de lumière, l’installation d’une cascade sur le pont mezzanine, quelques arbustes en pot placés à des points stratégiques, et sur le pont supérieur, un toboggan en tubes d’acier sur lequel les visiteurs peuvent grimper pour se faire des sensations.”

De toute évidence, la majorité des Britanniques partagent le constat. “Le public a clairement voté contre le Festival du Brexit”, ironise The Times. Entre avril et novembre, date de fin de l’événement, seules 2,8 millions de personnes ont visité les 107 projets artistiques et scientifiques disséminés aux quatre coins du Royaume-Uni. “Soit un Britannique sur 25”, calcule le titre londonien.

Certes, quelque 13,5 millions d’autres “ont participé aux projets numériques et d’émissions”, se défendent les organisateurs. Mais pour la bagatelle de 120 millions de livres (138 millions d’euros), soit quatre fois plus que la somme dépensée pour le jubilé de la reine Élisabeth II au mois de juin, la presse en attendait davantage. Selon un sondage mené au mois d’août, 91 % des interrogés n’avaient d’ailleurs même pas entendu parler d’Unboxed. Ni du Festival du Brexit. Et encore moins de Festival UK.

Un audit lancé

“D’un autre côté, Unboxed a donné du travail à des centaines d’artistes qui avaient été très pénalisés par les confinements, concède la journaliste Libby Purves dans le journal conservateur. Mais c’est un fiasco coûteux, le type même de grand projet public qui n’est pas sain pour la vie culturelle”. Le résultat “est lamentable”, assène The Daily Telegraph, au point d’entraîner l’ouverture d’une enquête parlementaire “pour savoir comment les deniers publics ont été (mal) dépensés”.

“Et dire que cet argent aurait pu servir à restaurer le lido pour qu’il retrouve sa splendeur d’antan, soupire Robin Aitken. Cette réalisation aurait fait date et aurait apporté à la ville la créativité dont elle a cruellement besoin.”