France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

[Concertations] Vers où s'oriente la future loi d'orientation agricole

Le 7 décembre 2022, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, donnait le top départ des concertations sur le pacte et la loi d’avenir et d’orientation agricoles. Un cycle de débats et de travaux entre plusieurs organisations. Le ministère de l’Agriculture présentera ensuite en juillet 2023 le contenu du pacte et déposera son projet de loi. À mi-chemin, La France agricole a rencontré six représentants parmi ces organisations. Ils livrent leurs propositions en faveur du renouvellement des générations.

Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne souhaite « un million de paysans à l’horizon 2040-2050 ». Un objectif ambitieux alors que le nombre d’actifs agricoles ne cesse de chuter. Des bras sont nécessaires pour atteindre la souveraineté alimentaire et réussir la transition écologique selon lui. « Dans le contexte économique actuel et avec la raréfaction de l’ensemble des énergies, nous aurons des difficultés à réussir ces défis-là avec moins d’actifs et en remplaçant les hommes et les femmes par de la technique, de la robotique et numérique. Techniquement, ce serait faisable mais énergétiquement cela ne tiendra pas sur la longueur ». Son syndicat plaide notamment pour une régulation des marchés pour arrêter « de mettre les paysans en concurrence en leur imposant de s’agrandir pour essayer d’être compétitif ».

Mieux orienter les Nima

La Confédération paysanne fait partie du Collectif Nourrir qui participe aussi aux débats. Pour la coprésidente de ce mouvement qui rassemble une cinquantaine d’organisations, Clotilde Bato, « il faut repenser le parcours d’accompagnement à l’installation », notamment pour pouvoir mieux conseiller les non issus du milieu agricole (les Nima). « Le plus important est d’accompagner la phase d’émergence du projet qui n’est aujourd’hui plus financée. Le parcours doit mettre l’accent sur les pratiques et le partage de savoir-faire entre pairs. S’il faut renouveler massivement, il faut faciliter l’accès à ces formations », estime-t-elle.

Faciliter le portage du capital

De son côté, le syndicat majoritaire FNSEA insiste sur la nécessité de renforcer l’attractivité du fermage et les aides aux cédants sur le plan fiscal et social. Par exemple en élargissant les exonérations sur la taxation des plus-values ou en défiscalisant la transmission de l’épargne de précaution (la DEP). Pour faciliter les transmissions, la FNSEA propose d’ouvrir des guichets uniques transmission-installation pour accompagner le plus de projets possibles, ou encore d’élargir l’expérimentation du droit à l’essai. « Nous n’avons pas le droit de rater ce rendez-vous, il faut que le gouvernement mette les moyens financiers mais pas seulement », défend Luc Smessaert, vice-président de la FNSEA. Le syndicat entend aussi faire évoluer, comme pour le portage du foncier, les outils de portage du capital.

Un point accueil élargi

Moteur sur les questions d’installations, Jeunes agriculteurs (JA) milite aussi pour la création d’un point accueil installation formation transmission (Pafit) élargi. « Il s’agit d’un guichet unique, composé de toutes les structures qui gravitent autour de l’installation, où le porteur de projet aurait un seul voire deux interlocuteurs », explique Jérémy Giroud, vice-président du syndicat. Il préconise de développer le suivi post-installation et propose de généraliser, comme la FNSEA le droit à l’essai, sous forme de stage. Il défend aussi un renforcement du rôle de déclaration d’intention de cessation d’activité agricole. « Son envoi doit être anticipé dix ans avant l’âge légal de départ à la retraite et accompagné d’une journée d’information », détaille Jérémy Giroud.

Relever le seuil des plus-values

Pour la Coordination Rurale et sa présidente Véronique Le Floch, « il faut établir à travers cette loi, toutes les conditions pour que les nouveaux installés puissent le rester sur le long terme ». Et pour agir sur cette question, le syndicat souhaite travailler sur les structures et le foncier à travers la fiscalité notamment en relevant le seuil des plus-values. Mais la mesure phare concerne la partie comptable « nous souhaitons partir sur un suramortissement de nos immobilisations, notamment sur le bâti et qui pourrait aller jusqu’à 80 % » détaille Véronique Le Floch. Pour le syndicat, un certain nombre de coups de pouce sociaux et fiscaux ne concernent en effet que les premières années d’installation et ce suramortissement donnerait un avantage au moment de renouveler certains outils.

« Il faut 40 milliards d’euros »

Parmi tous les syndicats, le Modef est celui qui affiche l’objectif le plus ambitieux d’atteindre dès 2030 un million de paysans. Un délai plus court que celui de la Confédération paysanne. « Mais si on arrive à remplacer ceux qui partent à la retraite, ce serait déjà pas mal » admet Guénaël Poulmarc’h, élu au conseil d’administration du Modef. Il réclame davantage de moyens de la part de l’État. « Nous sommes en train de finaliser nos chiffres, mais nous estimons que pour arriver à un million de paysans, il faut 40 milliards d’euros ». Il souhaite aussi que l’État remette la main sur le foncier, « ce qui ne veut pas dire qu’il faut nationaliser » précise-t-il. « L’État doit remettre des fonds dans les Safer pour qu’elles puissent avoir du foncier en stock » selon lui.

Une idée parmi d’autres que le ministère de l’Agriculture aura la charge d’analyser et de retenir ou pas pour la rédaction de son pacte et de son projet de loi.