France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

[Conditionnalité sociale] Les aides Pac sont désormais liées au Code du Travail

C’est une des nouveautés majeures de la conditionnalité de la Pac pour la période 2023-2027 : désormais, les employeurs agricoles pourront voir leurs aides réduites de 1 % à 5 %, selon les cas, après une sanction infligée par l’Inspection du travail. Cette « conditionnalité sociale de la Pac » vient donc ajouter des pénalités prises sur les aides Pac, à une condamnation administrative ou judiciaire.

Quels agriculteurs sont concernés ?

Les agriculteurs concernés sont ceux qui touchent des aides Pac et qui emploient du personnel, quel que soit le statut (CDI, CDD, saisonniers, apprentis). Sont inclus les agriculteurs qui emploient des stagiaires ou qui font appel à la délégation selon la réalité du lien de subordination telle que l’évalue l’inspecteur du travail (personnel prêté, prestation de service, détachement…). Si l’agriculteur ne touche pas d’aide Pac, il n’échappe pas à la sanction.

Comment ça se passe ?

En pratique, l’inspection du travail effectue un contrôle chez un agriculteur de l’application du droit social. Ce contrôle est indépendant de ceux conduits par l’Agence de services et de paiement (ASP). Si son enquête aboutit à une décision exécutoire, c’est-à-dire une sanction administrative ou un procès-verbal ouvrant à des poursuites judiciaires, elle la notifie à l’ASP.

Les aides Pac sont alors réduites sur la base des versements en cours, mais la pénalité sera appliquée en année n + 1 voire n + 2. L’exploitant reçoit une lettre de fin d’instruction de la part de l’ASP. Il a la possibilité de contester la sanction sur ces aides Pac, par un recours administratif.

Quelles sont les pénalités ?

L’arrêté du 17 mars 2023 donne une grille des cas de non-conformité en matière de conditionnalité sociale et le taux de réduction des aides en cas d’infraction et de récidive dans les trois ans. Selon les cas, les pénalités vont de 1 % à 5 % pour le premier constat. Ce taux est systématiquement triplé en cas de récidive.

Le premier taux de pénalité (1 %) concerne souvent des négligences administratives. Par exemple, ne pas avoir écrit une évaluation spécifique du risque chimique dans le Document unique d’évaluation des risques (DUER). La majorité des sanctions, celles au taux de pénalité de 3 %, sont liées à la conduite normale du personnel. Par exemple, ne pas avoir défini de moyen de prévention, de secours et de lutte contre les incendies, ou ne pas avoir informé les salariés des conditions d’utilisation des équipements de travail.

Enfin, les taux les plus élevés (5 %) ont trait à des fautes majeures : ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés ou encore ne pas avoir établi de DUER. La pénalité sur les aides Pac ne remplacera pas la sanction de la justice sociale ou administrative qui ne manquera pas d’arriver dans de tels cas.

La France fait-elle du zèle ?

La conditionnalité sociale des aides Pac résulte de la réforme de 2023 et de l’application, par l’arrêté du 17 mars 2023, de trois directives anciennes. Les directives 89/391 et 2009/104 ont trait à la santé et la sécurité au travail. La France est volontaire pour les appliquer dès 2023 alors que les trois directives ne sont obligatoires dans l’Union européenne qu’à partir de 2025. L’Autriche et l’Italie appliqueront aussi ces directives de manière anticipée en 2023, l’Espagne et le Portugal pour 2024.

Enfin, la directive 2019/1152 incite à des conditions de travail transparentes et prévisibles. En clair, elle régit le contrat de travail en précisant, par exemple, son contenu ou ses délais pour le donner au salarié. La France ne peut pas l’appliquer dès 2023 parce qu’elle n’a pas apuré son attirail législatif en ce sens. Elle s’est engagée à l’appliquer en 2024.

L’application de ces directives n’est pas homogène en Europe : les dates, les points contrôlés, et les montants ne sont pas homogènes. Les taux ne sont pas fixés par les directives. Ce qui fait dire à la FNSEA que la conditionnalité sociale, telle qu’elle est appliquée, pourrait contenir son propre risque de distorsion de concurrence au sein de l’Union européenne.

La grille nationale des cas de non conformité et les sanctions

Points de contrôleNon-conformitésRéduction au 1er constatRéduction au 2ème constat sur trois ans
Directive 89/391/CEE : mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la SST
Protection de la santé et de la sécurité au travailNe pas avoir pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs5%15%
Respect des principes généraux de préventionNe pas respecter les principes généraux de prévention5%15%
Responsable de la prévention des risques professionnelsNe pas avoir désigné de salarié compétent ou ne pas s'être appuyé sur une expertise extérieure, conformément aux dispositions légales, pour s'occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels (PRP) de l'entreprise1%3%
Premiers secours, incendieNe pas avoir défini de moyens de prévention et de secours, et de lutte contre l'incendie3%9%
Absence de signalisation par panneaux du matériel de premiers secours ou non-respect des mesures relatives au risques d'incendies et d'explosions et d'évacuation3%9%
Danger grave et imminentNon-respect du droit d'alerte et de retrait en cas de danger grave et imminent (DGI)3%9%
Evaluation des risquesNe pas avoir établi de DUERP ou ne pas avoir tenu le DUERP à la disposition des personnes concernées5% (non élaboration) ou 3% (non mise à disposition)15% ou 9%
Absence d'évaluation spécifique du risque chimique1%3%
Mesures de protectionNe pas avoir déterminé les mesures de prévention1%3%
Ne pas avoir déterminé les mesures de prévention spécifiques au risque chimique ou biologique ou électrique3%9%
Accessibilité des informations (information des travailleurs sur les risques)Ne pas avoir donné aux travailleurs et à leurs représentants l'accès aux informations prévues à l'article 35 du règlement (CE) n° 1907 / 2006 (REACH)3%9%
Ne pas avoir fait bénéficier les stagiaires, CDD et TT affectés à des postes à risques particuliers de l'accueil et de l'information adaptés3%9%
Ne pas avoir informé les travailleurs des conditions d'utilisation des équipements de travail3%9%
Ne pas avoir tenu à disposition du CSE la documentation relative aux équipements de travail1%3%
Consultation et participation des travailleursNe pas avoir présenté les mesures du plan de prévention au CSE OU remis le programme de formation à la sécurité au CSE1%3%
Information et formation des travailleursNe pas avoir assuré une information et la formation des travailleurs en SST3%9%
Ne pas avoir assuré une formation spécifique en fonction de certains risques / une formation renforcée pour les CDD et travailleurs temporaires3%9%
Ne pas avoir assuré la formation SST des représentants des travailleurs1%3%
Ne pas avoir formé les travailleurs chargés de l'utilisation et de la maintenance des équipements de travail3%9%
Information et formation aux travailleurs externesNe pas avoir assuré l'information des travailleurs externes en matière de SST3%9%
Ne pas avoir, s'agissant d'une installation mentionnée au code de l'environnement, formé les chefs d'entreprises extérieures et les travailleurs indépendants intervenants3%9%
Directive 2009/104/CE : prescriptions minimales de SST des équipements de travail
Obligations généralesNe pas avoir mis à la disposition des travailleurs des équipements de travail conformes3%9%
Avoir fait travailler une femme enceinte avec marteau piqueur mû à l'air comprimé3%9%
Avoir affecté des jeunes sur quadricycles et tracteurs agricoles3%9%
Vérification des équipements de travailNe pas avoir procédé aux vérifications requises des équipements de travail3%9%
Equipements présentant des risques spécifiquesNe pas avoir informé les travailleurs des conditions d'utilisation et de maintenance des équipements de travail3%9%
Ne pas avoir délivré d'autorisation de conduite3%9%
Ne pas s'être assuré que les travailleurs ont reçu une formation concernant l'utilisation d'échafaudages3%9%
Ne pas s'être assuré que les travailleurs ont reçu une formation concernant l'utilisation de cordes lors de travaux en hauteur3%9%
Ergonomie et SSTNe pas avoir pris en compte les principes ergonomiques1%3%
Information des travailleursNe pas avoir informé les travailleurs chargés de l'utilisation ou de la maintenance des équipements de travail3%9%
Ne pas avoir tenu à disposition du CSE la documentation relative aux équipements de travail1%3%
Formation des travailleursNe pas avoir assuré de formation aux travailleurs en matière de SST3%9%
Ne pas avoir assuré la formation des travailleurs à la conduite d'engins automoteurs3%9%