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Coup d'Etat, tirs, militaires déployés... Au Burkina Faso, la crainte d’un nouveau basculement

L’histoire se répète au Burkina Faso. Il y a huit mois, un coup d’État renverse le président élu, Roch Marc Christian Kaboré, et porte au pouvoir une junte militaire. À sa tête : le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba. Ce militaire aguerri avait promis de faire de la sécurité sa priorité, sans parvenir à améliorer la situation. Il a été renversé, vendredi soir, par des hommes de son propre camp.

Plusieurs explications

Après une journée émaillée de tirs dans le quartier de la présidence à Ouagadougou, les putschistes ont pris la parole en début de soirée sur le plateau de la radiotélévision nationale. Le nouvel homme fort du pays est désormais le capitaine Ibrahim Traoré. Âgé de 34 ans, ce dernier était jusqu’à présent le chef de l’unité des forces spéciales antijihadistes « Cobra » dans la région de Kaya (nord).

Dans une brève allocution télévisée, les putschistes ont déclaré que Paul-Henri Sandaogo Damiba « se serait réfugié au sein de la base française à Kamboinsin, afin de planifier une contre-offensive » pour « semer le trouble au sein de nos forces de défense et de sécurité ». Le ministère des Affaires étrangères français a réagi dans un communiqué et « dément formellement toute implication dans les évènements en cours depuis hier au Burkina ».

Les causes de cette mutinerie sont notamment le non-paiement de certaines primes, selon des sources locales. Les caisses de l’État sont vides. Mais aussi des débâcles répétées. Comme le 27 septembre, lorsqu’un convoi de ravitaillement de l’armée burkinabé a été attaqué aux alentours de Djibo, une zone désormais sous siège jihadiste. Bilan : des dizaines de morts et 90 camions brûlés.

« Pire encore qu’au Mali »

« Le pays est en train d’imploser, pire encore qu’au Mali », avertit Peer De Jong, spécialiste des ESSD (Entreprises de services de sécurité et de défense) et ancien colonel des troupes de marine. Les attentats de Ouagadougou, en 2016, ont d’ailleurs montré qu’aucune zone du pays n’était épargnée.

À la mi-septembre, le chef d’état-major particulier d’Emmanuel Macron, l’amiral Jean-Philippe Rolland, a rencontré Damiba afin de décrisper les relations entre les deux pays. Une visite considérée comme de « l’ingérence » selon le mouvement M30, un groupement politique qui combat avec véhémence l’ancienne puissance coloniale.

Les Russes avancent leurs pions

Le scénario à craindre pour Paris est celui d’une arrivée des mercenaires russes du groupe paramilitaire Wagner, déjà présents au Mali et en Centrafrique, deux pays où la France a mené des opérations militaires.

« Les Russes étaient déjà en train de travailler au corps les burkinabé, et ils vont maintenant avoir une occasion de proposer leurs services », détaille Peer de Jong. Et d’ajouter : « Globalement, les Russes se posent comme une alternative au modèle occidental et à ses valeurs. Ils vantent un partenariat gagnant-gagnant pragmatique sans considération droitdelhommiste ».

Ainsi, vendredi, lors d’une adresse à la nation, Vladimir Poutine a vanté son modèle en dénonçant le colonialisme économique et idéologique de l’Occident. « L’enjeu essentiel est désormais de savoir si Ibrahim Traoré va céder aux pressions de son entourage et traiter avec les Russes », conclut Nicolas Normand, ancien ambassadeur au Mali, et auteur du « Grand livre de l’Afrique ».