France
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Crèches, congés parentaux, modes de gardes des jeunes enfants : la France peut mieux faire

La France est loin d’être une championne européenne en matière d’accueil des 0-3 ans : c’est ce que souligne la direction générale du Trésor dans un rapport jeudi. Sur ce sujet, mais aussi sur celui des indemnisations et de la durée des congés parentaux, la France peut largement mieux faire. «L’indemnisation du congé parental pris à la suite des congés maternité et paternité reste relativement faible en France par rapport à d’autres pays», indique le rapport. En 2021, la durée totale du congé de maternité et parental potentiel payé à une femme à la naissance d’un enfant s’élevait à quarante-deux semaines en France pour le premier enfant, dont seize semaines de congé maternité et six mois de congé parental. En moyenne, dans l’Union européenne, la durée est de soixante-quatre semaines. Le niveau d’indemnisation du congé parental apparaît également plus favorable dans d’autres pays. L’Allemagne a par exemple augmenté son budget consacré au congé parental de 50 % entre 2006 et 2014, ce qui a fait passer le taux de recours des pères de 3,5 % à 34,2 %. En comparaison, les réformes récentes en France sur le congé parental et paternité n’ont pas permis de faire augmenter le taux de recours au congé parental chez les pères.

30 000 places supplémentaires

Concernant les modes de gardes formels – en crèche ou par un assistant parental –, la France affiche un taux élevé : 60,4 % des enfants de moins de 2 ans y bénéficiaient en 2019, contre seulement 38,9 % en moyenne dans l’OCDE. Mais le rapport note que le niveau de recours est inégalitaire en France, puisqu’il «varie fortement avec le revenu disponible du foyer». Les inégalités d’accès dans l’Hexagone seraient ainsi parmi les plus élevées des pays européens, avec le Royaume-Uni, l’Irlande et les Pays Bas. Le recours à la garde des familles dans le premier tiers de revenu disponible est d’à peine 29 %, alors qu’il atteint les 76,1 % dans le tiers supérieur. Dans ce sens, la loi pour 2023 de financement de la sécurité sociale prévoit une réforme qui «liera le reste-à-charge de la garde par un assistant parental aux ressources de la famille».

Cette inégalité est d’autant plus problématique qu’elle joue un rôle sur les compétences des jeunes enfants. Si, lors des premiers mois, la garde parentale est plus favorable au développement de l’enfant, «les modes d’accueil ont par la suite un impact positif sur le développement de l’enfant». Ils faciliteraient par exemple un meilleur développement du langage et diminueraient par la suite les difficultés émotionnelles ou relationnelles. Les enfants d’origine modestes sont ceux qui bénéficieraient le plus d’un accueil en crèche, mais paradoxalement, ils sont ceux qui en ont le moins accès.

Plusieurs facteurs expliquent ce moindre recours des parents modestes. L’offre de garde est très hétérogène en France : «Elle est nettement plus faible que la moyenne dans les communes ou quartiers où le niveau de vie médian est le plus bas», comme en Guyane. Pour y remédier, le Trésor propose de s’inspirer de l’Allemagne, où il existe un droit opposable à la garde d’enfant : «Les autorités locales responsables de l’accueil de la petite enfance sont ainsi tenues d’offrir un nombre suffisant de places sur le territoire. En cas de manquement, le juge administratif, saisi par les familles, peut imposer à la commune de les dédommager.» L’action publique prévoyait d’ailleurs déjà entre 2018 et 2022 la création de 30 000 places supplémentaires, en particulier dans des quartiers prioritaires. En ce qui concerne les places d’accueils auprès des assistants parentaux, le Trésor propose de les faire évoluer «vers un mode d’exercice se rapprochant de l’accueil collectif», à la manière des maisons d’assistantes maternelles. En plus d’être plus favorable au développement des enfants, la mesure générerait des emplois de meilleure qualité et rendrait le métier de professionnel de la petite enfance plus attractif.

Le quotidien des femmes davantage affecté par l’arrivée d’un enfant

Autre facteur expliquant le moindre recours des parents les plus précaires : les couples mono actifs sont davantage représentés parmi les ménages les plus précaires. Or, ces couples ont plus souvent recours à une garde par le parent inactif, qui est principalement la mère. Dans ce sens, le rapport indique que la garde parentale peut nourrir les inégalités de genre, puisqu’elle est principalement exercée par les mères : «Pour les enfants dont les parents vivent en couple, seulement 12 % du temps de garde parental entre 8 heures et 19 heures en semaine est effectué par le père seul, quand plus de la moitié est effectuée par la mère seule.» Par conséquent, «la vie quotidienne et la carrière des femmes sont davantage affectées par l’arrivée d’un enfant». De fait, les femmes recourent plus souvent que les hommes au temps partiel pour s’occuper des enfants et elles représentaient près de 94 % des bénéficiaires du congé parental indemnisé en juin 2020. Cette réduction ou interruption de l’activité pèse sur leur revenu salarial, qui diminuera d’environ 30 % en moyenne cinq ans après la naissance de l’enfant. Par ailleurs, lors des premiers mois de l’enfant, «l’introduction d’un congé réservé au second parent contribuerait à une reconfiguration des responsabilités parentales persistant bien après la naissance de l’enfant». La participation du père aux tâches ménagères et familiales serait par la suite renforcées.

En campagne pour un second mandat, Emmanuel Macron avait promis un «service public à la petite enfance». Pour le moment, seule une concertation nationale a été lancée en novembre dernier. Quant à la promesse électorale d’un «droit opposable au mode de garde», elle est pour le moment restée lettre morte.