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Crime gratuit dans le Gard : "J'ai pris la vie de Claire par égoïsme" reconnaît enfin l'accusé, en larmes

Réclusion criminelle à perpétuité et 18 ans de sûreté requis contre Mathieu Danel, 27 ans, rejugé en appel pour avoir tué une autostoppeuse de 39 ans à Villevieille (Gard), en juin 2018. Pour la première fois, l'accusé a manifesté une émotion sincère.

Il n'était que froideur et insensibilité. Il a peut-être fait un pas vers l'humanité. Il est 15 h et la cour d'assises de la Lozère s'apprête à vivre l'un de ces doux séismes qui font longtemps vibrer les palais de justice.

La présidente, Corinne Rieu, fait venir à la barre Mathieu Danel, accusé d'avoir assassiné une autostoppeuse le soir du 19 juin 2018 à Villevieille, dans le Gard, pour un mobile hors du commun. Il voulait, à 23 ans, "connaître la sensation de tuer" et savoir s'il pouvait encore éprouver une émotion, lui qui disait alors ne plus rien ressentir.

"Rien n'était prévu"

En janvier, il a été condamné à la perpétuité à Nîmes. Il a fait appel car il conteste avoir prémédité son geste.

La présidente veut savoir à quel moment il a décidé de tuer Claire. Dès leur sortie du restaurant, comme il l'a dit en garde à vue ? Elle lit le P.V.  Il répond. "Rien n'était prévu. Une minute avant, je ne savais pas que j'allais le faire." Deuxième déposition. "Il y a eu une dizaine de minutes entre l'idée et le passage à l'acte." Interrogatoire devant le juge. "Lorsqu'elle me propose d'aller sur les hauteurs du village je me dis peut-être que je vais la tuer." 

"Arrêtez ! On me l'a posée 46 fois cette question!" Mathieu Danel s'énerve. Première manifestation d'émotion. La juge ne lâche pas. Rappelle qu'un an après son arrestation il a dit à trois experts avoir à nouveau envie de tuer. " Vous êtes intelligent, les mots ont un sens. Ça interroge."

"Je lui ai pris 60 ans de sa vie"

Silence. "Je comprends que ce soit interrogateur (sic), mais c'est ma sincérité, je le dis comme je le pense." Sa voix si monocorde commence à se fêler. "J'ai dit des trucs atroces, et pendant le procès de Nîmes j'ai été abject avec la famille." La fissure s'agrandit. Il dit qu'elle est née à la pause de la mi-journée, depuis cette salle d'assise si petite qu'accusé, témoins et public s'y frôlent.

"Je me suis retrouvé en sortant de la salle face à ces gens. Florian, mon ami pas vu depuis cinq ans. Il est venu. Solène qui a souffert de ma relation. Elle est là. Sa mère qui me défend alors que j'ai frappé sa fille. Ma mère qui me défend, mon père qui est en colère". Une larme. Une autre. "À Nîmes on me descendait dans les geôles, où les autres détenus criaient. Là les surveillants m'ont conduit à midi à la maison d'arrêt de Mende qui a une particularité agréable, elle est silencieuse." 

Un souffle, d'autres pleurs. "J'ai vu tous ces visages et je me suis retrouvé à regarder le plafond de ma cellule en silence. J'ai tout réentendu, j'ai revu leurs mains, leurs visages, et c'est la première fois que je ressens de la tristesse depuis sept ans. Et je suis super heureux d'être triste, en fait. J'avais oublié ce que c'était."  Il est en larmes. "Je suis désolé de ce que j'ai fait à Claire. J'ai pris sa vie par égoïsme. Peu importe le temps que je vais passer en prison. Je lui ai pris 60 ans de vie. J'ai les 60 ans de Claire à faire. "

Me Chabert, partie civile. "C'est un petit miracle de la cour d'assises, vous avez réussi à fendiller le masque de Mathieu Danel, le fameux masque du tueur." L'avocat général Vincent Blériot reste dubitatif. "Que valent les larmes et les mots de Mathieu Danel ? Je ne sais pas. Est-ce une nouvelle facette de sa personnalité, face au vertige de la perpétuité ? Je ne suis pas sûr que vous ayez assisté au début d’une rédemption." En un quart d'heure, il requiert la perpétuité et 18 ans de sûreté, contre 22 infligés à Nîmes. Plaidoirie de Me Jérôme Arnal, en défense, et verdict ce jeudi 6 octobre.