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«Crime», «péché» : quels sont les propos exacts du pape François sur l’homosexualité ?

Violemment mis en cause, ces derniers temps, par ses opposants, le pape François a donné, en début de semaine, une interview fleuve à l’agence de presse américaine Associated Press (AP). Interrogé par Nicole Winfield, la vaticaniste renommée de l’AP avec qui ses relations ont parfois été tendues, le pontife a notamment qualifié l’homosexualité de «pêché». «Le pape François affirme que l’homosexualité n’est “pas un crime” mais un “péché”», a ainsi titré BFMTV dans un article très largement partagé, tant ces propos ont choqué. «Le pape réaffirme la doctrine de l’Eglise. S’il a estimé […] que les lois pénalisant l’homosexualité à travers le monde étaient “injustes”, il a aussi déclaré que cette orientation sexuelle était un “péché”», peut-on lire.

D’après la transcription complète de l’entretien par l’AP, uniquement disponible en espagnol, les propos exacts du pape François sont les suivants :

«Nous sommes tous des enfants de Dieu et Dieu nous veut tels que nous sommes et avec la force que nous avons chacun de lutter pour notre dignité. Etre homosexuel n’est pas un crime. Ce n’est pas un crime. Oui, mais c’est un péché. Bon, commençons par distinguer le péché du crime. Mais le manque de charité envers votre prochain est aussi un péché. Et vous comment vous en sortez-vous ? Autrement dit, distinguons cela.»

Le mime de la réaction d’un fidèle ?

Ce passage a aussi été diffusé dans un des extraits vidéos de l’interview mis en ligne par AP. On peut voir que lorsque le pape dit «oui, mais c’est un péché», il semble mimer la réaction d’un fidèle, auquel il répondrait de commencer par «distinguer le péché du crime» et de s’interroger sur sa propre charité.

Dans quel contexte ces propos ont-ils été prononcés ? Le pape argentin était interrogé sur la criminalisation de l’homosexualité et plus largement «de discrimination à l’encontre de la communauté gay et trans». «Quelle est la position de l’Eglise ? Que devrait-elle faire, puisqu’il y a des évêques qui soutiennent ces lois ?», demande la journaliste NIcole Winfield. «Dans le catéchisme de l’Eglise catholique, il est dit que les personnes ayant des tendances homosexuelles doivent être accueillies, et non marginalisées, accompagnées si on leur donne une place», répond le pontife.

Et de rappeler : «Lors de mon voyage au Brésil et de mon premier voyage, j’ai dit cette phrase qui dérangeait certaines personnes, elle les dérange : “S’il y a une personne qui cherche Dieu et qui est sincère, qui suis-je pour la juger ?”» Faite quelques mois après l’élection de François, la sortie avait fait le tour du monde, augurant d’un pontificat beaucoup plus ouvert que ceux de ses deux prédécesseurs, Jean-Paul II et Benoît XVI, sur les questions de société. A l’inverse, elle a attiré de violentes critiques des droites religieuses.

Signaux contradictoires

Quand il répond aux questions de l’agence américaine, le pape omet toutefois de rappeler qu’il n’a jamais remis en cause l’article 2357 du catéchisme de l’Eglise catholique, qui précède celui qu’il cite. «S’appuyant sur la Sainte Ecriture [la Bible, ndlr] qui les présente comme des dépravations graves, la Tradition [la culture et la pensée de l’Eglise catholique] a toujours déclaré que les actes d’homosexualité sont intrinsèquement désordonnés. Ils sont contraires à la loi naturelle.»

Dans la suite de sa réponse à Nicole Winfield, le pape François affirme aussi qu’une «famille qui a un fils ou une fille à tendance homosexuelle ne doit pas le chasser, elle doit créer un cadre familial pour qu’il puisse vivre en paix». Plus loin, il revient sur les lois qui criminalisent l’homosexualité, en réitérant : «Etre homosexuel n’est pas un crime». «C’est une condition humaine», ajoute-t-il, relancé par AP sur le rôle de l’Eglise dans les pays aux lois homophobes. «L’Eglise peut-elle contribuer à l’abrogation de ces lois ?», interroge la journaliste. «Oui, oui, ils doivent le faire. Ce qui se passe, c’est que ce sont des cultures, […] et les évêques de cet endroit – bien qu’ils soient de bons évêques – font partie de ces cultures. […] L’évêque a également un processus de conversion», répond-il avant d’appeler à «la tendresse».

En fait, le pape François donne des signaux contradictoires et n’a pas levé, au fil de son pontificat, une certaine ambiguïté en ce qui concerne l’homosexualité. D’un côté, il promeut une Eglise catholique qu’il voudrait «inclusive», non stigmatisante. Le pontife a lui-même reçu des couples homosexuels au Vatican, a manifesté son approbation à l’égard de législations civiles qui protègent les couples gays. Mais sans avaliser le mariage, ni les bénédictions religieuses. A la veille d’un voyage en Afrique du 31 janvier au 5 février, il appelle cette fois-ci à abolir les lois criminalisant l’homosexualité. La parole du pape a du poids et cette intervention est considérée comme une avancée par certains. Mais cette ouverture cogne contre la doctrine de l’Eglise catholique qu’il se refuse à remettre en cause.