France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

De retour après 50 000 ans, quelle est cette comète que l’on peut voir à l’œil nu ?

Sa chevelure verdoyante, trahissant la présence de molécules carbonées, est immortalisée par une flopée d’astrophotographes amateurs depuis plusieurs jours. Venue des confins du Système solaire, la comète baptisée C/2022 E3 (ZTF) sera au plus près de la Terre, ce mercredi 1er février 2023, à une distance équivalente à un tiers de celle séparant notre planète du Soleil. Découverte il y a un peu moins d’un an, elle a mis 50 000 ans à revenir dans notre voisinage, le temps nécessaire pour parcourir son orbite elliptique, très allongée, autour du Soleil.

Près de l’Étoile polaire

Pour la découvrir, il faut regarder plein Nord, du côté de l’Étoile polaire, dans la constellation de la Petite Ourse. « Sa magnitude est actuellement de l’ordre de 6, soit la même que les étoiles les plus faibles que l’on peut voir à l’œil nu. Elle l’est donc aussi, dans de bonnes conditions, dans un ciel très noir, mais elle sera davantage visible avec une paire de jumelles », note Jérémie Lasue, astrophysicien à l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (Irap) de Toulouse et spécialiste des petits corps célestes. Cette comète se fait toutefois bien moins remarquer que ses congénères passées, Hale-Bopp (1997) et Neowise (2020), notamment parce qu’elles sont bien plus grosses qu’elle.

Ce soir, dimanche 29 janvier 2023, la comète C/2022 E3 ZTF croise l’Étoile polaire. à l'aide d'une paire de jumelles, pointez l'étoile du nord et déplacez-vous vers Dubhé et Mérak, vous croisez une tache floue : la comète C/2022 E3 !#ZTF #comete #astronomie pic.twitter.com/8UnYy8nQ0E

— Eric Chapelle ? (@ericchapelle2) January 29, 2023
Les comètes du Nuage de Oort sont celles qui sont restées le plus longtemps loin du soleil. Elles contiennent les matériaux les plus primitifs

Le diamètre du noyau de C/2022 E3 (ZTF), constitué de glace et d’un peu de matière organique, a en effet été évalué à un petit kilomètre. Ce gros caillou glacé s’est mué, dans notre ciel, en une traînée lumineuse. « Lorsque sa trajectoire la fait s’approcher du soleil, la comète voit sa température augmenter régulièrement. La glace va finir par se sublimer : elle passe de l’état solide à l’état gazeux. Cela entraîne des jets de matière de grande ampleur : la queue d’une comète peut s’étendre jusqu’à plusieurs millions de kilomètres », détaille Stéphane Le Mouëlic, ingénieur de recherche au Laboratoire de planétologie et géosciences (LPG) de Nantes.

Un vestige du Système solaire

Les scientifiques ont pu établir que C/2022 E3 (ZTF) provenait très probablement du Nuage de Oort, un réservoir sphérique de comètes très éloigné du Soleil, entre 20 000 et 100 000 unités astronomiques (UA) (une UA étant la distance moyenne entre la Terre et le Soleil). Ce qui la rend particulièrement intéressante à étudier : « Les comètes du Nuage de Oort sont celles qui sont restées le plus longtemps loin du soleil. Elles contiennent les matériaux les plus primitifs que l’on peut étudier et on peut donc obtenir des informations très précieuses sur la composition des gaz qui ont permis la formation du Système solaire initial », rappelle Jérémie Lasue. « On peut analyser la comète à distance par spectroscopie : on étudie la lumière qu’elle réfléchit et on regarde les longueurs d’onde auxquelles la lumière est absorbée. Ce sont les signatures de la présence de certaines molécules », poursuit Stéphane Le Mouëlic.

La queue d’une comète est engendrée par le vent solaire et la température. Elle est donc toujours à l’opposé du Soleil
La queue d’une comète est engendrée par le vent solaire et la température. Elle est donc toujours à l’opposé du Soleil (Document Patrick Léal/Le Télégramme)

Mais les analyses depuis la Terre ne suffisent pas pour percer tous les secrets de ces vestiges de notre Système solaire. Les comètes issues du Nuage de Oort sont d’ailleurs au cœur d’une future mission spatiale européenne, dont le lancement est prévu en 2029. « Le but est de positionner la mission dans une orbite d’attente et dès qu’on aperçoit une comète du Nuage de Oort, on la déplace pour aller l’étudier de près », explique Jérémie Lasue.

Peut-être ne la reverra-t-on jamais

La cible ne sera pas C/2022 E3 (ZTF), sa trajectoire l’aura déjà beaucoup éloignée de la Terre en 2029. Peut-être ne la reverra-t-on jamais revenir des frontières de notre Système solaire, même dans 50 000 ans : « Plus vous êtes loin, plus la force gravitationnelle qui vous lie au Soleil est faible. Il est donc possible qu’elle puisse être éjectée de son attraction. Cela peut se produire quand certaines étoiles voisines ne passent pas très loin de nous, à quelques années-lumière. Elles peuvent interagir avec les comètes, modifier leur vitesse, et celles-ci se retrouvent alors dans le milieu interstellaire ». Une telle comète venue d’un autre monde, 2I/Borissov, a d’ailleurs été repérée dans notre Système solaire, le 30 août 2019.