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Défense de la Terre : l'engin spatial Dart percutera cette nuit un astéroïde pour une mission expérimentale

Après dix mois de voyage, la sonde Dart de la Nasa croisera à 1 h 14 cette nuit la route de Didymos. Objectif de l'expérimentation : tester un dispositif de modification d'orbite par impact pour défendre notre planète de cette menace céleste.

La rencontre en elle-même semble incroyable, la collision, après dix mois de voyage et à 11 millions de kilomètres de la Terre, d'un engin spatial d'une demi-tonne, Dart, avec un caillou d'à peine 160 m de diamètre traversant le système solaire à plusieurs milliers de kilomètres par heure. La prouesse est pourtant masquée par l'enjeu. En l'occurrence, anticiper un cataclysme potentiel, "l'un des seuls risques naturels dont on pourrait se prémunir", glisse Aurélie Moussi, astrophysicienne au Cnes, le Centre national d'études spatiales.

"C'est une première mondiale", disait il y a quelques jours Ian Carnelli, mission manager, lors d'un point avec la presse organisé par l'Agence spatiale européenne. "Un vrai moment historique pour le monde entier, enchérissait son collègue de la Nasa Tom Statler, chercheur au Defense coordination office, le département défense planétaire de l'agence américaine. La défense planétaire est une problématique mondiale, qui réclame une réponse mondiale, et les astéroïdes sont une menace que nous pouvons prévenir."

Un inventaire des géocroiseurs

Dans ce but, à 1 h 14 la nuit prochaine, Dart va s'écraser à pleine vitesse sur Dimorphos, le satellite d'un astéroïde nommé Didymos. Un géocroiseur, l'un de ces objets célestes qui orbitent dans le système solaire, comme la Terre, dont certains constituent pour elle, pour la vie, un danger mortel potentiel.

"Ceux que l'on considère comme très dangereux, de plus d'un kilomètre de diamètre, sont répertoriés, on en a environ 1 200, détaille Aurélie Moussi. Ils sont l'objet d'un suivi depuis la Terre, mais la possibilité d'un impact est très faible, de l'ordre d'une fois toutes les 500 000 à un million d'années. Mais à partir d'une centaine de mètres de diamètre, ils peuvent faire des dégâts considérables." Plus de 4 000 ont été inventoriés, un tiers d'entre eux sont bien connus, indique l'astrophysicienne, des campagnes constantes d'observations étant menées pour affiner ce catalogage.

Un tout petit écart, peut-être d'1 %

Dimorphos et "Didymoon", son petit satellite, appartiennent à ceux que l'on connaît bien et la trajectoire du couple ne représente aucun danger pour la Planète bleue. Même déviée, ce à quoi va s'atteler Dart, cette nuit. Autonome, effectuant sa descente  à l'aide de sa caméra, Dart frappera Didymos "à 6,1 km par seconde", 24 000 km/h expliquait Nancy Chabot, de la Nasa lors de ce même point presse : "Il va simplement causer un petit changement, peut-être de 1 % de son orbite (autour de Dimorphos, NDLR) mais cette inflexion légère" sera, si elle est avérée, fondamentale.

?The latest episode of The Incredible Adventures of the #HeraMission is out now!

Next Tuesday, @NASA's #DARTmission is 'Creating a Crater' on the Dimorphos #asteroid which will be studied by ESA's Hera mission. Find out how and why in the latest episode ? pic.twitter.com/Rqr2vGA111

— ESA (@esa) September 22, 2022

Les distances parcourues sont telles, dans l'espace, qu'une variation d'orbite fut-elle très modeste peut suffire à créer un décalage considérable à l'arrivée et éviter un impact tragique. L'idée des scientifiques est donc avec ce test de commencer à "valider une technique de déviation que nous pourrons appliquer à n'importe quel autre astéroïde", se projetait Ian Carnelli, responsable de la mission Hera (ESA), qui ira en 2026 observer sur place les conséquences du "contact" de cette nuit. Mais avant cela, début de réponse un peu après une heure du matin sous le regard du cubesat italien Licia, qui n'en perdra pas une miette.

Un couple céleste assez intriguant

Il y a "un bonus à cette mission", sourit Aurélie Moussi, pour les astrophysiciens. Le couple Dimorphos - Didymos a été choisi pour des raisons liées au test : "Il fallait un astéroïde géocroiseur, qui se rapproche de la Terre à une date en rapport avec la mission. Et en impactant le plus petit, vous n'avez aucun risque de placer le duo sur une trajectoire nouvelle et menaçante." Mais cette paire de "voyageurs" a un autre intérêt : "C'est la première fois que l'on va visiter un astéroïde double."

Les scientifiques ont plein de questions à son propos. "Comment ils tiennent ensemble, comment ils se sont formés, de quoi ils sont constitués ?", liste la docteure en astrophysique, impliquée dans le groupe de la mission Hera en charge des deux cubesats qui accompagneront l'engin spatial. De quoi nourrir l'impatience des chercheurs - "il y a toujours des surprises avec les astéroïdes !" - et justifier une nuit blanche !