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Depeche Mode : on a classé leurs 10 meilleures chansons

Formé en 1977 par des copains de classe dans une ville industrielle du sud de Londres, Depeche Mode a symbolisé l'avènement d'une nouvelle ère musicale, effaçant le punk chaotique et destructeur pour des mélodies reflétant l'espoir de la croissance et du progrès des années 1980, mais aussi (surtout ?) sa face obscure. Après avoir vendu plus de 100 millions d'albums dans le monde sans cesser de chercher ni d'innover, ces pionniers de la pop synthétique viennent de sortir un quinzième album décevant (à part peut-être le kitch « Ghost Again », enfin, non, pardon, mais franchement on a l'impression d'écouter Indochine). Memento Mori est un hommage à Andy Fletcher, mort soudainement l'année dernière d'une dissection aortique, à 60 ans. Le quatuor devenu trio va maintenant devoir trouver son rythme en duo. En attendant des lendemains qui enchantent, il ne nous reste qu'à nous replonger dans leur abondante discographie de tubes bien exécutés. Car ils ne manquent pas ! Attention, ce classement, totalement subjectif, fera peut-être grincer quelques dents.

Dès son deuxième album A Broken Frame sorti en 1982, Depeche Mode a trouvé son ton complexe, une danse bercée d'une mélancolie inquiétante. « Leave in Silence », avec ses chœurs graves, sa ligne de piano simple mais entêtante, ses beats invitant au langoureux balancement, est un des bijoux les plus sous-estimés du groupe.

Plus de 30 ans après sa formation, Depeche Mode prouve qu'il en a encore sous le capot. « Wrong » est un excellent morceau rock, avec une montée angoissante, du Radiohead sous stéroïdes, avec une violence à peine contenue. D'ailleurs, son clip, réalisé pour une fois par Patrick Daughters (qui a travaillé avec Snow Patrol ou Muse), est d'une brutalité extrême. « C'était de l'humour noir ! » se défendra Martin Gore, qui a imaginé l'album dont il est issu (Sounds of the Universe, sorti en 2009), dans une envolée créative depuis son home studio en Californie. Il y renoue avec les sonorités 1980 de son passé, ainsi que ses thèmes de prédilection (Dieu, le monde qui part en vrille et les politiciens pourris...). Il n'est pas question ici de révolution, mais peut-être de nostalgie et de survie ? D'ailleurs, contrairement à tous ceux qui ont laissé leur marque sur l'histoire du rock, les membres du groupe ne portent pas sur leur visage les stigmates de leurs excès (de drogue, d'alcool, de fêtes, de femmes).

C'est un ovni dans la discographie de Depeche Mode. Ce slow aurait pu être composé par Elton John ou Queen, avec ses lourds pianos, ses chœurs chantés la bouche en cœur et son cri déchirant : « Accusations / Lies / Hand me my sentence, I'll show no repentance / I'll suffer with pride… » Petite respiration dans le huitième album du groupe, Songs of Faith and Devotion (1993), celui du virage grunge (le groupe n'a jamais ignoré les tendances), un énorme succès dans les charts qui nous laisse un peu de glace, cette mélopée gospel chantée par Dave Gahan conserve tout son charme. Surtout qu'une respiration, le groupe en a alors bien besoin, miné par les excès d'alcool, de drogue, la dépression… Et bientôt le départ d'Alan Wilder.

Issu de leur premier album Speak & Spell, sorti en 1981, « Just Can't Get Enough », joyeuse ritournelle aussi acide et collante qu'un bonbon, en a assuré le carton critique et commercial immédiat. C'est le seul disque où figure Vince Clarke, qui a écrit la majorité des titres. On reconnaît sa patte badine et légère comme une musique de jeu vidéo, aujourd'hui presque insupportable, même si elle donne toujours (à certains) envie de se désarticuler compulsivement. En effet, comment résister à ces sept notes vivement pressées sur un synthé qui influencèrent – pour le meilleur et pour le pire – le paysage sonore de la décennie qu'elle ouvrait. Étonnamment, Vince Clarke est parti tout de suite après ce premier coup de force. Avait-il du mal à s'entendre avec les membres du groupe ? Les tournées et les fans étaient-ils trop pesants ? Toujours est-il que le virage plus sombre pris par Depeche Mode après ce premier album qualifié par la presse anglaise de « bubble gum » n'était pas de son goût. Vince Clarke a ensuite créé plusieurs groupes au succès honorable : Yazoo, The Assembly, Erasure… Et il a même retrouvé Martin Gore trente ans après pour créer un groupe techno : VCMG.

Figurant sur le quatrième album de Depeche Mode, enregistré en 1984 dans les mythiques studios Hansa Mischraum à Berlin, « People Are People » est un bijou de musique industrielle complexe, aux sonorités graves, aussi entraînantes que son message antiraciste, anti-homophobe et pacifiste. Composé de boucles de divers sons enregistrés (des casseroles dégringolant les escaliers, des coups portés sur des poêles, ou des « oh oh » gutturaux), savamment mélangés aux batteries et synthés habituels, c'est un des plus grands succès du groupe, un hymne gay… Et pourtant, ils le détestent ! Martin Gore, le trouvant trop commercial, refuse de le jouer depuis 1988. Dommage.

En 1997, alors que le groupe est au plus bas, physiquement et psychiquement, il arrive à sortir du fond de son trou avec le bien nommé « It's No Good », extrait de l'album Ultra. La production un peu futuriste avec une esthétique à la Matrix (qui sortira deux ans plus tard) est fine, rien ne dépasse, et l'ensemble semble ralenti, comme si le vice les collait au sol. C'est un des titres les plus sexy de Depeche Mode. Incapables à l'époque de le jouer en live, « It's No Good » deviendra par la suite un des incontournables de leur setlist.

Est-ce l'influence d'Alan Wilder, formé au piano classique et arrivé dans le groupe un an plus tôt (pour la petite histoire, ils l'ont recruté via une petite annonce anonyme postée dans le cultissime magazine Melody Maker) ? Le joyau de Some Great Reward (1984) est un parfait équilibre entre des jeux vocaux audacieux, des roulements de batterie irrésistibles, une inventivité phonique et des paroles sulfureuses sur les relations SM, avec des sous-entendus politiques. Oui ! On perçoit même les claquements des chaînes et des fouets… Bannie de la BBC et des radios américaines (pas étonnant), « Master and Servant » est tout de même un tube à sa sortie (pas étonnant non plus).

C'est tout simplement le morceau d'ouverture d'un de leurs plus grands albums. Après avoir brièvement pataugé dans la soupe (avec Black Celebration), Music for the Masses (1987) est tout simplement un chef-d'œuvre intemporel. Le groupe, alors au top de sa popularité, s'apprête à jouer devant 60 000 personnes au mythique rendez-vous de football américain : le Rose Bowl à Pasadena. Toujours en quête de nouvelles technologies, il maîtrise désormais parfaitement l'utilisation des samples. « Never Let Me Down Again » est d'une élégance rare. Ses orchestrations et ses chœurs ou synthés magistraux (la frontière s'efface), son côté rock, symbolisent subtilement les allusions à la prise de drogue. D'une modernité folle, on a pu l'entendre encore récemment dans la série The Last of Us, blockbuster hivernal de HBO…

Ballade up-tempo sortie en single en 1990, « Enjoy the Silence » est un pont entre les décennies 1980 et 1990, entre la synth-pop new wave déclinante et la techno dance naissante. Litanie à la fois proche et lointaine, dure et tendre, intime et universelle, elle touche au désespoir dans lequel on aime parfois se lover, celui d'un amour que l'on tient dans ses bras pour la dernière fois. Le clip est signé par leur collaborateur visuel de toujours : Anton Corbijn (il a réalisé la majorité de leurs clips depuis 1986), qui s'est inspiré du Petit Prince de Saint-Exupéry. On y voit la rose, figurant aussi sur la pochette de l'album, symbole du romantisme triste qui pique, teintant ses chansons.

Enregistré à Milan lors des sessions de leur sixième album Violator (1990), c'est jusqu'à ce jour un de leurs plus grands succès commerciaux. Repris avec brio par Marilyn Manson, Johnny Cash, Nina Hagen… « Personal Jesus » a érigé Depeche Mode au rang de superstars internationales, capables de provoquer des émeutes. C'est pourtant un titre très différent de leur répertoire. On retrouve, certes, la ténébreuse voix de baryton de Dave Gahan, les boucles électroniques hypnotiques qui sont leur marque de fabrique, mais il y a ici quelque chose d'organique dans ce génial riff de guitare dont on ne se lassera jamais, du blues et de la religion, ou plutôt de l'adoration, celle des rockstars comme Elvis élevées au rang de dieux. En 1989, ça fait polémique, évidemment, et le public aime ça… forcément.