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DIRECT. Crime gratuit dans le Gard : "Je ne comprends pas et ça me torture, je vais en crever" s'écrie la mère de l'accusé

Le jeune homme, rejugé depuis lundi 3 octobre à Mende, a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité et à 22 ans de sûreté en janvier dernier à Nîmes, pour avoir poignardé à mort une autostoppeuse de 39 ans à Villevieille, près de Sommières, le 19 juin 2028. Son seul but : connaître la sensation de tuer. Suivez les temps forts de l'audience en direct.

La deuxième journée du procès de Mathieu Danel, 27 ans, va être consacrée à l'audition de l'accusé, de plusieurs de ses proches et de certains experts psychiatres, après une première audience occupée par les auditions des enquêteurs. L'accusé a fait appel de sa condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, prononcée en janvier 2022 par la cour d'assises du Gard.

- 11 h : La mère de l'accusé vient témoigner

À la barre, la mère de Mathieu Danel vient témoigner, très stressée par la situation.

"Mathieu a été un enfant désiré, il n’y a rien à dire jusqu’à ce qu’il aille en fac. Pour l’école, toujours des félicitations, aucun problème avec rien, avec les amis, rien, jusqu’à ce qu’il aille en fac où il était loin de la maison, à Valencienne. En fin de première année il a rencontré Solène, c’était le grand amour qui lui est tombé dessus et à partir de là plus rien n’allait. On lui a dit, fais bien attention de ne pas te perdre. Au début de deuxième année on a vu que ça se passait moins bien, il nous a dit que Solène l’avait quitté pour un autre garçon. Après il est à nouveau avec elle pendant quelques mois, puis il me rappelle à nouveau au fond du trou."

"Moi je lui dis que quand il y a plusieurs séparations ce n’est pas bon, tu devrais laisser tomber. Elle est toxique, cette fille. Je lui ai dit, aussi, à Solène."

La magistrate revient sur ce jour où Mathieu lui parle de cette envie qu'il a de tuer quelqu'un. 

"Je n'y ai pas cru. Je lui ai dit je vais t’emmener aux urgences psychiatriques et ça va être vite vu, je n’ai pas vu ça comme une menace. Il est entré dans la pièce et il nous a lancé ça comme ça, je lui ai dit je ne pense pas que je t’ai élevé pour ce genre de chose."

"Ce questionnement sur la mort il ne l’a jamais eu avec vous ?"

"Non. C’était un peu comme les bipolaires, tout est merveilleux, puis je suis foutu. Je pense qu’à mesure que le temps passait il refoulait toutes ses émotions et il y a mis un verrou dessus et après il n’en sortait plus rien. Après c’était le vide, parce que je pense qu’il souffrait trop."

Me Arnal revient sur son vécu des faits. "Quand on vous dit ça... le ciel me serait tombé dessus ce serait pareil". Elle pleure. "C’était un gamin parfait, je disais à mes amies, il est parfait. Je n’ai pas eu un reproche à lui dire, rien. C’est impossible, et pourtant, c’est vrai. Je ne comprends pas, et ça me torture, je vais en crever" s'écrie-t-elle en pleurs.

- 10 h 30 : Me Chabert passe l'accusé sur le gril

Me Chabert, partie civile, visiblement agacé par les réponses de l'accusé, se lance dans une série de questions : "Est-ce que vous avez pensé à vous faire aider ? J’en ai parlé à mes parents, à ma petite amie et sur internet et à tous ceux qui étaient suffisamment proches de moi pour me prendre au sérieux. Pour la recherche d’aide psychiatrique, sur les conseils de ma mère, il m’était apparu à l’époque que cette démarche allait m’empêcher d’avoir une réponse à cette question, que j’allais être enfermé ou empêché."

"Pourquoi n'avoir pas essayé d'autres façons d'avoir des sensations fortes, les sports de combat, à forte intensité, le saut à l’élastique, en parachute, vous y aviez pensé ?"

"J’avais expérimenté suffisamment dans la vie, j’ai pratiqué beaucoup de sports, de métiers, d’études, et force est de constater que rien ne m’emballait vraiment".

"Vous n'avez rien expérimenté, et vous avez tout de suite pensé à tuer quelqu'un dans des conditions qui ne vous mettaient pas en danger."

"Je ne suis pas certain que je n’étais pas en danger, elle faisait la même taille que moi elle était un peu plus lourde que moi donc si elle avait réagi…"

Me Chabert : "Vous ne mesurez pas la portée de ce que vous venez de dire. Vous avez écarté tout ce qui pouvait vous mettre en danger. Vous avez voulu ressentir cette émotion sans vous mettre en danger."

"Je ne suis pas d’accord."

"Vous ne prenez jamais d’autostoppeur. Claire est la première que vous prenez en stop de votre vie. Et il y a la dague dans la voiture depuis un mois. Et vous voulez nous faire croire que vous n'avez eu l’idée de la tuer que quand vous êtes sur les hauteurs de Sommières ?"

"À chaque étape j’étais prêt à repartir" répond l'accusé.

"Pour moi vous étiez prêt à la tuer dès le départ."

Me Arnal, en défense, s'insurge. "Vous n'avez pas à donner votre opinion, confrère!"

Me Chabert à l'accusé : "Dans vos dépositions vous avez reconnu que l’idée vous est venue à la sortie du restaurant. "

Mathieu Danel reste en retrait. "C’est une idée qui m’avait traversé l’esprit comme cela le faisait assez régulièrement ; mais à ce moment-là je n’avais aucune idée que cela se présenterait. L’idée générale de tuer était toujours plus ou moins présente, mais avant d’arriver dans les hauteurs de Sommières ce ne me serait pas venu à l’esprit de le faire avec elle."

"Vous nous dites que vous vouliez un meurtre chirurgical mais ça s’est transformé en boucherie".

"Non."

"Moi c’est le terme que j’emploie. C’est quoi le regard que vous avez aujourd'hui  sur cet acte ?"

"Maintenant je peux plus facilement réagir émotionnellement. Plus j'avance et tant mieux, plus je me rends compte que c’était atroce. Terrible. Justement parce qu’elle n’avait rien fait pour mériter ça, j’ai pris sa vie dans l’égoïsme d'une recherche personnelle. Ça paraît évident pour tout le monde ici. Plus j'avance plus je réalise le caractère horrible de cet acte."

L'avocat général revient sur son projet de "tour de France aléatoire" dans lequel Mathieu Danel s'apprêtait à se lancer au moment des faits. Il avait aménagé son Kangoo pour pouvoir y dormir, mais avait aussi acheté un gros bidon d'acide chlorhydrique et du permanganate de potassium, deux produits qui ensemble peuvent avoir une action mortelle. 

"Cela ne vous paraît pas anormal ? Vous avez une idée derrière la tête?"

"Non."

"Vous vouliez connaître la sensation de tuer, pourquoi vous ne tuez pas un animal, pourquoi ne pas prendre une arme de chasse et aller abattre un sanglier?  ça, c’est autorisé!"

L'accusé : "C’est tuer un être humain qui est sous-entendu. Avec un animal il n’y a pas d’égalité, tuer un être humain, il aurait été mon égal.  Pas avec un animal, à moins d’aller tuer un tigre à main nue."

- 10 h : "Je lui explique que je m'apprête à mettre fin à ses jours"

Mathieu Danel poursuit son terrifiant récit, de la même voix monocorde, sans aucune variation dans son débit.

"Je lui explique que je m’apprête à mettre fin à ses jours. Elle me demande si elle a fait quelque chose de mal. Quand elle me dit qu’elle ne veut pas mourir je la frappe."

La présidente : "Vous pourriez nous montrer le geste du premier coup ?"

Mathieu Danel tremble un peu, les mains jointes devant lui.  Il reste immobile. "Je l’ai frappée de la main droite."

"Ce premier coup, vous espériez qu’il soit fatal ?"

"J’ai frappé aussi fort que je pouvais, avec la pointe. Elle était paniquée, elle n'a pas essayé d’esquiver, parce qu’elle n’a pas dû en revenir. Elle s’effondre sur le bas-côté, elle est allongée. Comme je vois qu’elle n’est pas décédée, je réalise qu’elle est en train de souffrir et j’essaie de remédier à ça, et je la frappe à la tête en me disant que si j’atteins le cerveau elle cessera instantanément de souffrir. Mais j’avais grandement sous-estimé la résistance du crâne. J’étais focalisé sur l’idée d’abréger ses souffrances."

"Pourquoi autant de coups ?"

"Je ne suis pas en colère, je suis simplement concentré sur la finalité du décès. Je frappe aussi fort et aussi rapidement que je peux. Je suis concentré sur cet objectif-là, avec peut-être un début de panique à l'idée qu’elle soit en train d’agoniser alors que ce n’était pas du tout l’objectif."

"Est-ce que vous avez pu percevoir des cris, des gémissements de douleur ? Tout ça se traduit par un acharnement ?"

"Je vois qu’elle tremble, qu’elle cherche à se protéger mais je sais qu’elle ne crie pas."

"À aucun moment du processus, après avoir porté le premier coup qui n’est pas fatal, vous ne vous êtes dit : "qu’est-ce que je suis en train de faire, je m’arrête ?"

"Non pour moi à partir du premier coup pour moi c’était le point de non-retour. Je me dis simplement que cela aurait pu être plus rapide."

"Elle est recroquevillée sur le côté. J’ai seulement remarqué qu’elle ne tremblait plus."

"Cette image vous a impacté quand vous quittez la scène de crime ?"

"Pendant les deux jours après les faits c’est une image qui était dans mon esprit mais je n’étais pas certain de sa réalité. C’était une image tellement intense, tellement grave, et c’était surréaliste car à côté je n'avais aucune sensation, je me disais que ce n’était peut-être que dans ma tête. C'était pas une image anodine, c’est un corps sans vie, c’est pas quelque chose qu’on peut voir sans une manifestation émotionnelle, et c’est le fait que je n’ai pas eu cette manifestation émotionnelle qui m’a fait me demander si c’était réel."

La présidente : " Vous n'avez pas de regrets, pas de remords d’avoir ôté la vie de cette jeune femme? Et pas d’exaltation ou de fierté d’avoir accompli cet acte ? Calme plat sur le plan de l’émotion ?"

"C’est ça. Je m'étais dit que tout et son contraire auraient pu arriver, ressentir un immense plaisir ou être dégoûté de moi-même, ressentit tout le panel des émotions humaines, je n’avais pas d’a priori.

"Pendant toute l’instruction et même au procès de Nîmes vous avez manifesté cette espèce de détachement et cette froideur."

"Depuis le début de mon incarcération j’ai demandé à être suivi par une psychologue et un psychiatre et on se voit toujours très régulièrement. J'analyse ma vie, ce qui a provoqué chez moi ce détachement, j’ai la volonté de corriger ce qui de toute évidence ne tourne pas rond chez moi. On a essayé divers traitements et le dernier a des effets positifs, qui m’aide à amplifier les pincées d’émotion qui me restent."

- 9 h 30 : L'accusé poursuit son terrible récit du crime

La présidente revient sur la victime : "Vous la trouvez comment ?"

"Un petit peu inhabituelle, surprenante, elle pouvait se mettre à rire après un silence sans aucune raison, peut-être un peu lunatique.  Les conversations sont restées très superficielles, on ne s’est pas rapprochés. On était peut-être un peu plus proche que les autostoppeurs lambda sans pour autant regretter de devoir se séparer."

On l'interroge sur sa proposition de relation sexuelle faite à Claire avant de la tuer. 

"Là je me suis dit, on est dans un endroit isolé, à l’abri des regards, peut-être que c’est cela qu’elle veut me faire comprendre. Je suis assez maladroit pour interpréter les signes de flirt, donc je lui ai posé la question pour savoir si c’est de cela qu’il s’agissait, sauf que non. Je l’ai analysé comme une explication possible."

"Est-ce que vous vous aviez envie de cette relation sexuelle ou est ce faute d’avoir autre chose à faire ?"

"C’est un peu ça, je n’en n’avais pas spécialement envie, mais si ça s'était proposé, oui."

"Comment a-t-elle réagi ?"

"Elle a pris ça sur le même ton que le reste de la conversation, pas outrée, pas surprise même elle a dit simplement que ce n’était pas possible. Je me suis simplement dit ben, j’ai mal compris. Je n’étais pas en colère, de toute façon je n’étais pas particulièrement motivé à ce moment-là."

Sur le passage à l'acte: 

"Je remarque la dague, c’est là que tout se met en place dans ma tête, je remarque que les lieux sont déserts qu’il n'y a aucun lien qui permettrait mon arrestation, que les circonstances étaient favorables à la mise en place de ce que j’avais en tête."

"Depuis deux ans j’avais remarqué qu’il n’y avait pas grand-chose qui pouvait déclencher une réaction émotionnelle chez moi alors que c’était le cas avant. Je m’ennuyais dans mon travail je m’ennuyais chez moi et je me demandais ce qui pourrait déclencher quelque chose chez moi."

"Parallèlement dans l’univers dans lequel on vit on est exposé à des séries télévisées, à des tas de choses qui parlent de meurtre, et j’avais dû me poser la question. J’ai perdu petit à petit la capacité à éprouver des émotions mais ce n’était jamais tari complètement."

"Je savais que c’était interdit, que c’était terrible mais je n’avais plus le filet de la moralité et de l’émotionnel pour que je réalise à quel point ce que je m’apprêtais à faire était monstrueux."

La magistrate : "Vous avez choisi de tester vos émotions sur le terrain morbide et criminel et non au plan sexuel. Qu’est ce qui fait que ça s’est ancré sur le terrain criminel? "

"Il me fallait quelque chose de suffisamment extrême pour me dire que si cet acte-là ne me faisait rien, rien ne me ferait quoi que ce soit."

"C’est pendant ces deux jours après en y réfléchissant plus sérieusement que je me suis rendu compte de la certitude d’être capturé et du mal causé. Comme on regardait souvent des séries télé avec ma mère elle disait que le méchant est toujours capturé, que ça prenne deux jours ou vingt ans c’est toujours l’équipe des enquêteurs qui gagnent. Je pouvais reprendre ma vie mais c’était une épée de Damoclès, et à tout moment dans les 40, 50 prochaines années je pouvais être arrêté."

Sa réaction quand elle voit la dague ? "Un peu apeurée, surprise, elle cherchait à comprendre, tellement ça sortait de nulle part. Elle avait raison, ça l’était. Sous le choc."


- 9 h 10 : Mathieu Danel est à la barre

La présidente a fait conduire Mathieu Danel à la barre, "compte tenu des mauvaises conditions acoustiques dans le box", car la veille, ses déclarations dans le micro étaient quasiment inaudibles.

La magistrate : "Je vais vous demander de nous relater la journée où le crime s’est déroulé".

Mathieu Danel prend la parole d'un ton monocorde, qui ne va pas varier même lorsqu'il va raconter les moments les plus terribles de cette journée du 19 juin 2018.

"Je me baladais en voiture sans but précis et j’ai vu cette jeune femme sur le côté de la route faire du stop, elle m’a dit vouloir aller à Nîmes en y arrivant elle m’a précisé vouloir aller à Sommières, en arrivant, je m’apprêtais à repartir et elle m’a proposé en indiquant être guide touristique de visiter le secteur."

"Je n’avais rien à faire, on a visité en me racontant des anecdotes. Plus tard on cherchait une supérette pour acheter à manger c’était fermé, on s’est rendu dans une pizzeria, on a mangé et partagé l'addition. J’étais prêt à repartir, elle m’a indiqué vouloir monter sur les hauteurs de la ville pour prendre l’air car il faisait chaud."

"À ce moment-là il faisait nuit, on est resté dans la voiture je lui ai proposé une relation sexuelle, elle a décliné très poliment en disant qu’elle était plutôt pour, mais qu’elle avait un problème médical, et qu'elle ne pouvait pas. Je n’en ai pas pris ombrage."

"Au moment de repartir je lui propose de la déposer dans un hôtel, parce qu'on était au milieu de rien et elle me dit vouloir dormir à la belle étole. Au moment de repartir je vois la dague dans la portière et je me dis que c’est pour moi l’occasion de la tuer car le lieu est très propice."

"Je retourne vers elle, quand elle la voit elle panique un peu... beaucoup. Je lui explique ce que je voulais faire, que je voulais la tuer non pas parce qu’elle avait fait quelque chose de mal à mon égard, elle avait l’air d'être quelqu'un de très sympathique, mais je voulais voir depuis quelques années ce que ça faisait de tuer quelqu'un, donc je l’ai fait."

"Je l'ai frappée plusieurs fois en essayant de frapper les parties vitales pour que ça dure le moins longtemps possible parce qu’à aucun moment je ne voulais la faire souffrir plus que nécessaire."

"Je n’avais jamais fait ça avant, j’ai vu dans le rapport d'autopsie qu'elle n’était pas morte immédiatement. Une fois que je me suis assuré qu’elle était bien décédée je suis rentré chez moi."