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Du Tchad au Sénégal, trois bandes dessinées qui racontent l’Afrique

En écho au festival d’Angoulême, focus sur les albums « Djarabane », d’Adjim Danngar, « T’Zée », d’Appolo et Brüno, et « Que la mer vous soit légère », de Stefano Boroni.

Le 50e Festival de la bande dessinée d’Angoulême, qui s’achève dimanche 29 janvier, a une nouvelle fois reçu les plus grands noms de la BD française et internationale. L’occasion de découvrir des albums consacrés aux questions sociopolitiques africaines. Zoom sur le devenir de la jeunesse tchadienne, le passé récent de la République démocratique du Congo (RDC) et le naufrage tragique du Joola au Sénégal.

« Djarabane », d’Adjim Danngar

En 1984 à Sarh, une ville du sud du Tchad, le petit Kandji commence à porter un nouveau regard sur le monde qui l’entoure. Du haut de ses 7 ans, il est à l’âge des questionnements encyclopédistes : « Pourquoi la terre est-elle si brûlante ? » Pourquoi Zarathoustra, l’original du quartier, défie-t-il les militaires en se mettant toujours en travers de leur chemin ? Quand le méchant Absakine libérera-t-il le singe qu’il maintient en cage ? Qui est cet homme que les grandes personnes appellent « le président Hache Hache » (Hissène Habré) ? Et enfin, qui donc a bien pu peindre la belle image fixée au mur du salon de la maison ? Une image magique, à tout le moins, car il suffit de la regarder pour se retrouver aussitôt au cœur d’un beau village paisible, loin de la bruyante rudesse citadine. Kandji aimerait tellement devenir dessinateur un jour, lui aussi !

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Connu pour son personnage de grand-mère pétroleuse, Mamie Denis, évadée de la maison de retraite (L’Harmattan), l’auteur et illustrateur Adjim Danngar se lance cette fois dans une chronique de la vie quotidienne pour beaucoup inspirée de sa propre expérience. D’origine tchadienne, aujourd’hui résident en France, il jette un regard sans concession sur son pays natal, où les difficultés économiques et l’instabilité politique empêchent, pour des millions de jeunes, toute projection dans l’avenir. « Que faire ? » Telle est la signification, en langue sara, de Djarabane, le titre de son album. Par ses dessins riches en détails (seule l’image du salon, comme un signe d’espoir, est en couleur), Adjim Danngar se retourne sur son passé et salue la ténacité de son jeune héros accroché à son rêve.

Ed. Delcourt, 192 pages, 23,95 euros.

« T’Zée », d’Apollo et Brüno

L’intrigue de T’Zée, une tragédie africaine se passe dans un pays longtemps dirigé par un président despote. L’heure est à la fin de règne et l’atmosphère, étouffante, n’est pas seulement due à la chaleur humide de cette partie du monde proche de l’équateur, mais à la situation du dictateur, désormais en prison, et aux questions que sa captivité soulève pour l’avenir. Que va-t-il se passer pour le grand T’Zée, pour les siens et pour le pays ? Dès le titre et la première page de l’album, des indices narratifs éclairent les lecteurs. Un okapi, animal que l’on trouve dans une seule région du monde, occupe le premier strip. Viennent ensuite les graphismes ornementaux d’un impressionnant palais dressé au centre d’un tapis de verdure.

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Enfin, pour ceux qui peuvent le décrypter, le titre de l’album est un jeu de mots sur « M’Zée », (patriarche, en swahili), le surnom que la population congolaise attribuait au président Laurent-Désiré Kabila. Aucun doute cependant, on est bien au temps du Zaïre du maréchal Mobutu (1930-1997), qui occupa le pouvoir dans son pays, trente-et-un ans durant, sans partage. Ce décor est celui qu’il fit édifier dans la région dont il était originaire. Importance du sujet, force du scénario, précision imparable de l’image… Le duo formé par le scénariste Appollo et le dessinateur Brüno a frappé fort, il y a quelques mois, avec cette BD à charge. Une tragédie politique qui trouve malheureusement des échos répétés dans l’actualité.

Ed. Dargaud, 160 pages, 22,50 euros.

« Que la mer vous soit légère », de Stefano Boroni

Vingt après le drame national que fut pour le Sénégal le naufrage du Joola, le ferry qui faisait la navette entre Dakar et Ziguinchor, une BD repose avec originalité et subtilité les questions restées sans réponse après la tragédie. L’auteur et illustrateur suisse Stefano Boroni a en effet eu l’idée de donner la parole aux victimes en imaginant ce que seule une BD permettait : faire parler les disparus, qui vivent et tiennent désormais palabre depuis leur monde subaquatique. Les protagonistes sont d’abord des visages, des attitudes, des vêtements, toute une population diverse et ordinaire. Peu à peu, ils s’interpellent et se mettent à converser, passant en revue les différents points d’achoppement qui ont conduit à la tragédie.

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Ils évoquent bien sûr la surcharge du bateau (plus de 2 000 passagers au lieu des 550 prévus). « L’inclinaison était effrayante », dit un personnage. « Les bateaux préparés au sparadrap », évoque un autre. « La vitesse à laquelle le bateau, ce 26 septembre 2002, s’est retourné est proportionnelle à la négligence de son entretien et à la corruption du gouvernement, » tente de rationaliser un autre. La beauté des illustrations et de la mise en page fait de cet album hommage une fable émouvante et onirique. Des illustrations intermédiaires, offertes par des contributeurs au projet, en rythment les différentes parties. Une approche émouvante et sensible, à la force poétique salvatrice.

Ed. L’Harmattan-BD et Sept Editions, 144 pages, 20 euros. Une partie des ventes sera reversée à l’Association nationale des familles des victimes et rescapés du naufrage du Joola.

Kidi Bebey

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