France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Effet nocebo : des malades pas vraiment imaginaires

Cet article est issu du magazine Les Indispensables de Sciences et Avenir n°210 daté juillet/ septembre 2022.

Avant d'introduire l'aiguille dans la peau, l'infirmière annonce souvent "une petite piqûre". Il y a fort à parier que si elle plissait les yeux et, bouche déformée, vous prévenait d'une possible douleur, vous auriez très, très mal... C'est l'effet nocebo, induit dans ce cas par le discours peu rassurant de l'infirmière. Une sorte de miroir du placebo.

Quand celui-ci minore les symptômes de la maladie, celui-là a des incidences délétères qui n'ont pas lieu d'être. Ces effets indésirables, le plus souvent des maux de tête, de ventre ou de la fatigue, ne s'expliquent pas par la composition du médicament, qui ne contient pas de substance susceptible de les causer. "Pour autant, ils ne sont absolument pas imaginaires, prévient Mathieu Molimard, chef du service de pharmacologie médicale du CHU de Bordeaux. Ils sont véritablement ressentis par les patients, mais leur origine est psychologique ou physiologique. Autrement dit, on peut observer des modifications cérébrales ou neurobiologiques réelles, par exemple une augmentation de la sécrétion de cholécystokinine, une hormone impliquée dans la perception de la douleur."

"La manière de prescrire est presque aussi importante que ce que l'on prescrit"

Comment expliquer l'effet nocebo ? Les chercheurs n'ont pas encore fait le tour de ce phénomène complexe. En simplifiant, on pourrait dire que de la même façon que l'effet placebo repose sur la conviction que le médicament va apporter un bénéfice, l'effet nocebo provient d'une crainte surdimensionnée des effets indésirables.

"Les personnes anxieuses et pessimistes sont plus à même de souffrir d'effet nocebo, surtout en période de stress ", explique Mathieu Molimard. Mais cette anxiété peut aussi survenir chez tout un chacun à la lecture d'une notice de médicament ou lors d'une visite médicale. "La manière de prescrire est presque aussi importante que ce que l'on prescrit", résume Mathieu Molimard, qui souligne que présenter les bénéfices et les risques d'un traitement est un exercice subtil.

L'efficacité du médicament repose d'ailleurs aussi sur l'image qu'en ont médecin et patient. Pour preuve, on constate davantage d'effets secondaires avec les génériques. Selon les scientifiques, ce qui est alors en cause, c'est l'image dégradée d'un médicament bon marché. Et rien de plus.

Par Marine Cygler