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En Charente, razzia sur les stations Total

En Charente, razzia sur les stations Total
Ristourne à la pompe et prix les plus bas. Les stations-service Total sont prises d’assaut et ont par intermittence, du mal à fournir.

Quentin Petit

Par Jean-François BARRÉ - jf.barre@charentelibre.fr, publié le 4 octobre 2022 à 19h43.

Des pompes à essence prises d’assaut, des files d’attente qui débordent sur la route, des cuves vidées en une matinée. La ristourne supplémentaire de 20 centimes se traduit par une ruée sur les stations Total.

Cela n’est jamais arrivé ». La petite station Total de Vœuil-et-Giget, sur la route de Montmoreau, qui tient la dragée haute à la grande distribution ! Alexandre Pla-Gassol, le gérant du garage et de la station-service fait exploser ses scores. « De 1 000 à 3 500 litres par jour », annonce-t-il, un œil sur les bordereaux. « C’est énorme. 50 000 litres le mois dernier ! » Un peu les prix, beaucoup les ruptures de stock des pompes angoumoisines. « 95 % de la clientèle, c’est des cartes GR des professionnels, des commerciaux, qui cherchent l’enseigne. »C’est aussi...

Cela n’est jamais arrivé ». La petite station Total de Vœuil-et-Giget, sur la route de Montmoreau, qui tient la dragée haute à la grande distribution ! Alexandre Pla-Gassol, le gérant du garage et de la station-service fait exploser ses scores. « De 1 000 à 3 500 litres par jour », annonce-t-il, un œil sur les bordereaux. « C’est énorme. 50 000 litres le mois dernier ! » Un peu les prix, beaucoup les ruptures de stock des pompes angoumoisines. « 95 % de la clientèle, c’est des cartes GR des professionnels, des commerciaux, qui cherchent l’enseigne. » C’est aussi de nouveaux clients particuliers. La contrepartie, c’est la pénurie. « Je ne peux être livré qu’une fois par semaine, le vendredi. Alors, souvent, dès le mercredi, je suis à sec. »

À Vœuil-et-Giget, Alexandre Pla-Gassol n’avait plus connu de tels volumes depuis 2012.
À Vœuil-et-Giget, Alexandre Pla-Gassol n’avait plus connu de tels volumes depuis 2012.

Photo CL

Depuis que Total a baissé ses prix à la pompe, au-delà de la ristourne du gouvernement, les pompes ne s’arrêtent que lorsqu’elles sont vides. Les stations, pas vraiment habituées à une telle affluence, pas vraiment dimensionnées pour stocker autant de véhicules, sont devenues championnes de l’intermittence. Au gré des ravitaillements et du passage des camions citernes.

Livré, aussitôt vidé

Lundi encore, à Angoulême, la station-service Total du boulevard du 8 mai, face à la concession Renault, a dû fermer ses pistes à la mi-journée, un manchon rouge HS sur tous les pistolets. « Ils ont pourtant dû être livrés à 6 heures, le matin », note un employé du pétrolier. Les cuves n’auront alimenté les automobilistes que quelques heures avant de se retrouver à sec. Régulièrement, la file d’attente embouteille le rond-point de la rue de Paris. Idem chez Total Access à Sillac, où la circulation est régulièrement perturbée.

Conséquence de la ruée sur les pompes, des pénuries fréquentes, entre deux livraisons.
Conséquence de la ruée sur les pompes, des pénuries fréquentes, entre deux livraisons.

Photo Quentin Petit

Aux Chauvauds, à Champniers sur le bord de l’ancienne RN 10, l’employé de la station s’est fait plein de nouveaux amis. « 80 % des clients ne venaient jamais se servir ici », estime-t-il, en voyant la file d’attente s’allonger sur la route. « Et encore, c’est calme », lâche-t-il. « Les deux ou trois premiers jours, la file d’attente s’étirait jusqu’à la déviation, deux ronds-points plus bas. »

Avec 50 kilomètres par jour, on fait attention à la dépense. Le salaire, il augmente moins vite que l’essence.

Depuis, la station est livrée au quotidien, écoule ses 36 000 litres à vitesse grand V. C’est trois fois plus que d’habitude. « C’est l’effet prix ». À 1,60 € le gazole, 1,44 le sans-plomb, difficile de trouver mieux. Sauf à rouler jusqu’à Reignac ou Barbezieux. Jusqu’à chez… Total, encore. 1,54 le gazole, 1,44 l’essence.

À Reignac, où la maison Lautret vend du carburant depuis, plus de cinquante ans, les habitués ont profité de l’occasion. Comme Fabrice, le routier, chauffeur chez CFF, qui fait Bordeaux au quotidien. Ou Maxime Vizcarro, le Dacquois, qui passe par là le lundi et arrête son camion à chaque fois. « II y a le prix, reconnaît-il, mais on s’arrêtait avant. On a la carte ici. Et le matin, on a le café. On est très bien accueillis. »

Je cherche sur les applis

Mais même sans le café réservé aux fidèles, ils sont nombreux à quitter les quatre voies de la RN 10 pour emprunter l’ancienne nationale sur quelques centaines de mètres. Pierre travaille chez Engie et roule pas mal. « Dans l’entreprise, on doit se servir chez Total. » Il a préféré faire halte à Reignac, où une dizaine de véhicules encombrent la piste. « Il y a des stations où c’est encore plus la folie. À Bordeaux, c’est même pas la peine. »

En Charente, selon l’heure, c’est encore praticable. Paradoxalement, l’immense station Total du relais routier de Plaisance, à Barbezieux, n’est pas prise d’assaut. Hélène, croisée sur place, travaille à Barbezieux, vit en Charente-Maritime et fait des infidélités à Leclerc où elle se servait avant. Émilie, de Graves-Saint-Amant, qui travaille à l’hôpital de Barbezieux a fait le même calcul. « Le gazole est à 1,54. À Châteauneuf, il est à 1,60. Ça vaut le coup. Avec 50 kilomètres par jour, on fait attention à la dépense. Le salaire, il augmente moins vite que l’essence », glisse-t-elle encore. « Avant, on ne réfléchissait pas. Aujourd’hui, je cherche sur les applis pour trouver la station la moins chère. On essaye de regarder, de gratter quelques euros. On fait tous pareil ».

À l’instar des professionnels. Yohan, chauffeur routier du Loir-et-Cher, chargé de bouteilles vides, termine sa journée et le plein du camion. Le tableau des prix a emporté son adhésion. « On a consigne de prendre du gazole à moins de 1,60 € si on le peut. Là, j’ai de la marge. »

“C’est une concurrence déloyale” 

Sept stations Total aux sept premières places du palmarès des stations-service, hier sur le site gouvernemental prix-carburants.gouv.fr. Carton plein. La ristourne accordée par le pétrolier a placé les stations de l’enseigne devant les autres en termes de tarifs, treize centimes de moins que la concurrence sur le gazole, douze sur le sans-plomb. La concurrence ne peut pas suivre.
« Concurrence déloyale, puisque Total a le monopole », tacle ainsi Simon Ricaud, le patron du magasin Leclerc Lunesse à Angoulême. « Mais cela n’a jamais été la station qui nous a fait vivre », précise-t-il. Le carburant, pour les grandes surfaces, c’est un produit d’appel. « Cela ne change rien du tout pour nous », affirme Simon Ricaud qui peut au moins compter sur les automobilistes qui ne sont pas prêts à faire un détour, ou perdre du temps dans les interminables files d’attente pour gagner quelques centimes. Quelques euros sur un plein.