Au moins 125 personnes sont mortes samedi soir à la suite d’un mouvement de foule après un match, dans l’est de Java. L’historien et sociologue Sébastien Louis, qui a étudié le supporteurisme en Indonésie, revient sur le contexte sportif.
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Samedi 1er octobre, le stade Kanjuruhan, près de la ville de Malang, sur l’île de Java, en Indonésie, a été la scène de l’une des pires tragédies jamais survenues dans un stade de football. Au moins 125 personnes sont mortes dans un mouvement de foule, selon un dernier bilan des autorités locales revu à la baisse.
Initialement, plusieurs miliers de supporteurs en colère de l’équipe de l’Arema FC avaient pénétré sur le terrain du stade Kanjuruhan, après la défaite de leur équipe 3 à 2 contre celle de Persebaya Surabaya. Les supporteurs ont ensuite été aspergés de gaz lacrymogène par la police. De nombreuses personnes ont été mortellement piétinées ; des survivants ont décrit des spectateurs pris de panique, bloqués par la foule.
Lire aussi :Auteur du livre Ultras, les autres protagonistes du football (Mare et Martin, novembre 2017, 440 pages), l’historien et sociologue Sébastien Louis s’était rendu au stade Kanjuruhan en 2018.
Comment se caractérise la passion pour le football en Indonésie ?
Ce n’est pas très connu, mais l’Indonésie est un pays où les gens sont des fanatiques de football. Quand il y a un match entre deux clubs dont les supporteurs sont rivaux ou amis, cela draine des publics considérables. Les « mania », ce sont les supporteurs locaux organisés sur le modèle sud-américain. Ils chantent tout le match en soutien de leur club. Il existe également des groupes ultras et des bandes de hooligans, sur le modèle anglais. Quand j’étais en Indonésie en 2018, j’ai vu 5 000 supporteurs de club de l’Arema FC [basé dans la région de Malang] se déplacer à Jakarta, à plus de 800 kilomètres.
A Malang (comme à Surabaya), le club est partout dans la rue, notamment avec des peintures murales et des banderoles sur les murs des maisons parfois. Il y a aussi un quartier proche du centre-ville qui est entièrement peint en bleu, la couleur du club de l’Arema FC.
Samedi soir, la tragédie s’est déroulée à l’issue d’un match entre deux clubs rivaux. Quel était le contexte ?
C’est un derby régional, sur l’île de Java est, entre Persebaya, l’équipe de Surabaya, la deuxième plus grande ville du pays, et l’Arema FC, l’équipe de Malang. Il faut savoir que les joueurs de Persebaya sont arrivés au stade Kanjuruhan dans un véhicule blindé de la police. Les supporteurs ont jeté des pierres contre le véhicule. Même s’il n’y avait aucun risque pour les joueurs d’être touchés, cela illustre le niveau de tension de ce match.
Depuis 2006, il est interdit aux supporteurs des deux camps de se déplacer dans la ville du club rival. Il y a une telle tension que lorsque les supporteurs adverses ne sont pas là, ce sont les joueurs qui sont pris pour cibles. [Samedi] soir, les supporteurs de l’Arema, déçus, voulaient s’en prendre à leurs propres joueurs. La défaite de leur équipe (3-2) a précipité l’invasion de terrain.
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