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En Ukraine, quels scénarios pour la paix ?

Entre la reprise de territoires par les forces ukrainiennes et les missiles que fait pleuvoir le pouvoir russe sur des cibles civiles, l’espace de négociation semble des plus étroits. Des discussions se tiennent en coulisses, mais, après neuf mois de conflit, la fin de la guerre semble dépendre de facteurs qui échappent en bonne partie au contrôle de Kiev, analyse ce magazine britannique.

L’attaque éclair lancée par la Russie contre la capitale ukrainienne, Kiev, a été un échec. Sa guerre d’usure à coups d’artillerie pour s’emparer de la région orientale du Donbass s’est enlisée et transformée en une impasse sanglante. Moscou a perdu une partie du territoire qu’elle avait volé au sud de la ville de Kharkiv, et [à la mi-novembre] a annoncé le retrait de ses troupes de Kherson, la seule capitale provinciale qu’elle avait prise depuis le déclenchement de son invasion en février.

À chaque revers, le président russe, Vladimir Poutine, s’est efforcé de trouver de nouveaux moyens de tourmenter l’Ukraine. Le dernier en date consiste à bombarder sans répit le pays afin de réduire à néant ses infrastructures. Il a été annoncé aux habitants de la capitale qu’il leur faudrait peut-être évacuer si le réseau énergétique s’effondrait.

Les coupures de courant n’ont pas suffi à saper la volonté des Ukrainiens de se battre. Mais elles prouvent que, neuf mois après le début de son invasion injustifiée, Poutine cherche toujours à faire monter les enchères. Certains craignent qu’il ne détruise un barrage sur le Dniepr pour freiner la progression de ses adversaires, comme Staline en 1941.

“Où est la diplomatie ?”

L’assaut russe, qui évolue sans cesse, soulève aussi une question embarrassante : combien de temps encore les États-Unis et l’Europe continueront-ils à fournir à l’Ukraine les milliards de dollars d’aide militaire et économique dont elle a besoin chaque mois pour repousser la Russie ? “Aussi longtemps qu’il le faudra”, assurent les dirigeants occidentaux. Mais nombre de leurs citoyens sont hostiles à l’idée que l’on finance un conflit interminable avec la Russie. Le 5 novembre, à Rome, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue pour appeler à mettre fin aux combats. “Nous ne voulons pas la guerre. Ni armes ni sanctions. Où est la diplomatie ?” pouvait-on lire sur une pancarte.

Aux États-Unis aussi, des questions se posent. Des démocrates d’extrême gauche ont appelé, il y a peu, à des négociations, avant de se rétracter promptement. Lors des élections de mi-mandat du 8 novembre, les républicains du camp de Trump ont remporté moins de victoires qu’attendu, mais cela n’en démontre pas moins que la politique américaine pourrait basculer radicalement au lendemain de la prochaine présidentielle, dans deux ans, et avec elle la politique de la Maison-Blanche vis-à-vis de l’Ukraine.

Jake Sullivan, conseiller à la sécurité nationale de Joe Biden, a effectué un voyage surprise à Kiev, le 4 novembre, pour assurer les Ukrainiens du soutien “inébranlable” des États-Unis. Mais il a aussi incité Kiev à réfléchir aux conditions d’une paix future. Depuis, on a appris qu’il était entré en contact avec ses homologues russes, pour les avertir de ne pas avoir recours aux armes nucléaires. Le 9 novembre, Biden a annoncé que les Russes et les Ukrainiens allaient “panser leurs blessures” après la bataille de Kherson, et qu’ils seraient prêts à des compromis. Tout en soulignant qu’il ne dicterait pas son comportement à l’Ukraine.

Une perte de 100 000 hommes des deux côtés

En privé, les responsables occidentaux et ukrainiens commencent à se demander à quoi pourrait ressembler une sortie stable du conflit. L’Ukraine deviendra-t-elle une nouvelle Finlande, contrainte de céder des terres aux envahisseurs et de rester neutre pendant des décennies ? Ou une nouvelle Allemagne de l’Ouest, dont le territoire national serait divisé par la guerre, la moitié démocratique se retrouvant absorbée dans l’Otan ? Un modèle est souvent évoqué, celui d’Israël, pays constamment menacé, qui a réussi à se défendre sans conclure d’alliances officielles, mais avec une aide militaire considérable de la part des États-Unis.

Les termes précis de tout accord négocié dépendent de ce qui se passe sur le champ de bataille. Il faut sans doute s’attendre à encore bien des combats avant que l’un ou l’autre camp ne soit disposé à cesser les hostilités. Selon une estimation, la Russie et l’Ukraine auraient chacune perdu environ 100 000 soldats, tués et blessés, mais elles espèrent toujours manœuvrer afin de se retrouver en position favorable.

La retraite de Kherson est une humiliation pour Poutine. Mais elle offre aux forces russes une ligne plus facile à défendre le long du Dniepr. Rien ne prouve que le maître du Kremlin soit sur le point de jeter l’éponge. Il a mobilisé des centaines de milliers de recrues supplémentaires. Certaines ont été jetées dans la bataille presque sans formation ni équipement pour tenir le front ; le reste pourrait servir à lancer une nouvelle offensive l’an prochain.

L’Ukraine, quant à elle, espère conserver son élan. Cet hiver, son armée va recevoir des renforts, sous la forme de milliers de soldats entraînés par le Royaume-Uni et d’autres pays occidentaux. Les armes continuent d’affluer de l’Ouest. Le 4 novembre, le Pentagone a annoncé de nouvelles livraisons d’armes, d’un montant de 400 millions de dollars, incluant 45 chars T-72B modernisés et 1 100 drones. Les premières batteries antiaériennes Nasams ont été déployées [à la mi-novembre].

Les stocks d’armements de l’Occident ne sont pas illimités. Les armées européennes ont sérieusement puisé dans leurs réserves ; même la puissante Amérique redoute d’éroder ses propres capacités à mener des guerres à l’avenir. Mais c’est la Russie qui semble le plus immédiatement confrontée aux pénuries. Elle a utilisé l’essentiel de