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Et si le pic de la consommation de pétrole était enfin là (et vraiment, cette fois-ci) ?

Quelles vont être les conséquences de ce dépassement du pic de la consommation ?

© SPENCER PLATT / GETTY IMAGES AMÉRIQUE DU NORD / GETTY IMAGES VIA AFP

Evolution des marchés

Selon les estimations de Bloomberg, le pic pétrolier est enfin arrivé. Les fortes hausses des taux mondiaux nuisent à la consommation.

Jean-Pierre Favennec est un spécialiste de l’énergie et en particulier du pétrole et professeur à l’Ecole du Pétrole et des Moteurs, où il a dirigé le Centre Economie et Gestion. 

Il a publié plusieurs ouvrages et de nombreux articles sur des sujets touchant à l’économie et à la géopolitique de l’énergie et en particulier Exploitation et Gestion du Raffinage (français et anglais), Recherche et Production du Pétrole et du Gaz (français et anglais en 2011), l’Energie à Quel Prix ? (2006) et Géopolitique de l’Energie (français 2009, anglais 2011).

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Atlantico : Depuis un siècle, les prévisions sur le retournement de la consommation de pétrole se sont toutes révélées erronées. Pourquoi les prévisions de Bloomberg, selon lesquelles la consommation de pétrole a atteint un pic définitif, seraient-elles bonnes cette fois-ci ? Sur quels éléments s’appuient-elles ?

Jean-Pierre Favennec : Depuis les débuts de la production de pétrole en 1859, lorsque le Colonel Drake forait à… 20 mètres de profondeur le premier puits de pétrole qui permettait enfin d’avoir accès au pétrole lampant qui allait remplacer l’huile de baleine et permettre aux lampes à pétrole de nos ancêtres de nous éclaires, les prévisions de « manque de pétrole » ont été nombreuses. Un vice-président de la Standard Oil dans les années 1900 s’engageait « à boire tout le pétrole qui serait produit à l’Ouest du Mississipi ». Il est mort avant d’avoir à boire les millions de barils produits en Californie.

Les découvertes de pétrole du Moyen Orient dans les années 1930 et 1940 ont mis fin aux craintes de manque de pétrole. En réalité nous n’avons jamais manqué de pétrole. La demande de pétrole a explosé entre 1945 et 1979 car l’Europe et le Japon après la Seconde Guerre mondiale devaient être reconstruits. Les besoins en énergie étaient immenses et le pétrole facile à produire et à utiliser était la source d’énergie idéale. Les parcs automobiles se sont extraordinairement développés, le fuel domestique pour le chauffage des locaux a remplacé les poêles à bois, l’industrie est passée du charbon au fuel lourd. En 1970, la consommation de pétrole avait augmenté dans des proportions telles que les réserves de pétrole, inépuisables en 1950, laissaient entrevoir une fin du pétrole en 2000. D’où le fameux rapport du Club de Rome « Halte à la croissance » en 1972 qui mettait en évidence les limites de notre modèle de développement et anticipait un épuisement de nos ressources en matières premières. 

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Sommes-nous prêts à assumer le coût du paradoxe des énergies fossiles ?

La situation actuelle est différente. Les réserves de pétrole sont considérables et leur utilisation sera limitée par les émissions de gaz à effet de serre et l’impact sur le changement climatique qu’entrainerait une utilisation incontrôlée des énergies fossiles et en particulier du pétrole. 

La crainte d’un pic de la production de pétrole, faute de ressources – hypothèse peu vraisemblable – fait place à une anticipation d’un plafonnement puis d’un déclin de la consommation de pétrole. Cette prévision d’un pic de consommation s’appuie sur des prévisions de croissance économique très pessimistes et sur un remplacement rapide du pétrole par d’autres sources d’énergie. Ceci mérite d’être discuté. 

Comment en est-on arrivés à cette situation ? Qu’est-ce qui explique que les prédictions se soient révélées erronées jusqu’à présent ?

Les prévisions de « pic de pétrole » se sont révélées erronées car le pétrole est une énergie facile à produire, facile à utiliser et à contenu énergétique élevé. On fait le plein d’une voiture dans une station-service en 2 minutes et l’on peut ensuite rouler au moins 6 ou 800 kilomètres pour un coût relativement modeste si l’on oublie les taxes qui représentent les deux tiers du prix du litre de carburant. 

La priorité devient bien entendu de faire face au changement climatique, de limiter les émissions de gaz à effet de serre et donc de limiter la consommation de combustibles fossiles. 

Mais si dans les pays occidentaux et en particulier en Europe cette nécessité est au cœur des préoccupations, n’oublions pas que sur les 8 milliards d’habitants de la planète, 7 habitent en Asie, en Afrique, en Amérique Latine et leur préoccupation est de sortir de la pauvreté. Ceci passe par une consommation d’énergie accrue, et, dans un premier temps par une augmentation de la consommation d’énergies fossiles et en particulier de pétrole. 

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Quelles vont être les conséquences de ce dépassement du pic de la consommation, s’il se confirme ?

Il y aura sans doute un pic de la consommation de pétrole mais ce pic n’interviendra pas dans les prochaines années car les besoins des pays émergents restent importants. La voiture électrique est parée de toutes les vertus, mais elle est chère car le prix des batteries reste très élevé et les voitures thermiques resteront majoritaires encore plusieurs années.

On peut imaginer un pic de consommation (et donc de production de pétrole) dans 10 ou 20 ans. Mais on observera sans doute une augmentation de la demande dans les prochaines années. 

Comment la consommation de pétrole peut-elle évoluer dans les prochaines semaines voire les prochains mois ?

Nous assisterons dans les prochaines années à une légère augmentation de la demande de pétrole car les pays émergents ont besoin d’une énergie bon marché... et les pays producteurs restent dépendants des recettes pétrolières.

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