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Femmes fontaines : on sait d'où vient le liquide expulsé

Le phénomène concerne au moins 5% des femmes (certaines études chiffrent jusqu'à 40%). Et pourtant, même si le phénomène est largement connu dans la culture populaire, les femmes fontaines sont encore très mal étudiées sur le plan scientifique. Une récente étude, parue en août 2022 dans The international journal of urology, a toutefois permis de comprendre d'où vient le liquide expulsé par les femmes fontaines.

Il y a quelques années déjà, le voile commençait à se lever sur ce phénomène longtemps resté mystérieux. La recherche a commencé par procéder par élimination. L'observation anatomique a tout d'abord permis de montrer que le liquide expulsé ne provient pas du vagin - mais bien de l'urètre - et qu'il n'est donc pas composé de cyprine sécrétée par les glandes de Bartholin. Cette piste écartée, des travaux publiés ont ensuite montré que les femmes fontaines était un phénomène physiologique tout à fait unique et non la conséquence d'une forme d'incontinence urinaire chez les femmes qui se déclencherait au moment de l'orgasme.

 Crédit : GILLES / BSIP / BSIP via AFP

L'anatomie féminine se compose (de gauche à droite sur l'image) : du clitoris (rayé en rose), de l'urètre qui mène à la vessie (en jaune), du vagin (en rose avec des rayures) qui mène à l'utérus au dessus duquel se trouvent les ovaires (ici en blanc) et enfin du rectum, la plus grande cavité à droite. Crédit photo : GILLES / BSIP / BSIP via AFP. 

La science a traditionnellement considéré que femmes fontaines et l'éjaculation féminine étaient la même chose. Mais des travaux de 2011 ont permis d'établir que deux types différents de fluides sont relâchés par l'urètre. Un fluide laiteux sécrété en très petite quantité durant l'éjaculation féminine ; et un fluide transparent expulsé en grande quantité par les femmes fontaines. On sait désormais que lors de l'éjaculation féminine, les quelques millilitres de sécrétions épaisses et laiteuses proviennent de petites glandes, appelées les glandes de Skene, situées près de l'urètre. Aussi surnommées "la prostate féminine" car les fluides qu'elles produisent contiennent des antigènes spécifiques de la prostate (PSA), qui servent à liquéfier le sperme chez l'homme. Encore une piste en moins.

Sur la piste de la vessie

Restait encore à comprendre d'où provient le liquide émis par les femmes fontaines. Un gynécologue-obstétricien français, le Dr Samuel Salama, a postulé en 2014 que le fluide provenait de la vessie. Son étude, menée sur 7 patientes sans incontinence urinaire a permis de montrer que même après avoir les avoir vidées, leurs vessies se remplissaient au moment de l'excitation puis étaient vides après avoir eu un rapport. "L'excitation sexuelle produirait de l'urine de façon accélérée", commente le Dr Salama auprès de Sciences et Avenir. Pour le spécialiste, le liquide expulsé serait tout simplement de l'urine. Cette étude a toutefois été critiquée par des femmes fontaines elle-mêmes, expliquant que la couleur et l'odeur du liquide étaient bien différents de leur urine.

Cette fois, une équipe japonaise a voulu en avoir le coeur net et a publié ses résultats dans l'International journal of urology. L'équipe a injecté un mélange d'eau et de colorant bleu dans la vessie de cinq femmes fontaines. Après avoir été stimulées, le liquide recueilli était bien bleu. "Cet essai confirme bien que le liquide provient de la vessie. Mais de nombreuses questions restent en suspens", commente auprès de Sciences et Avenir Jessica Pafs, experte en sexologie à l'Université de Gothenburg en Suède. "On ne peut pour l'instant pas expliquer pourquoi ce liquide, même s'il sort de la vessie, ne semble pas avoir la même composition. De plus amples travaux vont être nécessaires."

La composition toujours en débat

Les travaux japonais présentent en effet de nombreuses limitations. Quatre des cinq femmes recrutées semblent être à la fois des femmes fontaines et connaître des éjaculations féminines. En effet, après analyse, le liquide produit par ces quatre volontaires contenait également des PSA, le marqueur des glandes de Skene. Deux liquides se seraient donc mélangés dans l'urètre. De plus, l'expérience semble avoir certaines limitations éthiques. "Si le chercheur restait à proximité, la volontaire ne parvenait pas à avoir de relation sexuelle. Ainsi, le chercheur s'est introduit dans la pièce en silence juste avant que le squirting [le phénomène de femme fontaine, ndlr], a pu réaliser une vidéo et collecter du fluide expulsé", peut-on lire dans l'étude, qui précise "qu'il est difficile de collecter le liquide du squirt car la direction de l'expulsion est variable."

La querelle d'experts se poursuit. Une chose est sûre, le fluide expulsé provient donc bien de la vessie, même si sa composition fait toujours débat. De plus amples recherches, aussi délicates soient-elles, semblent nécessaires afin de savoir ce qui compose exactement ce liquide. L'étude elle même va dans ce sens. Si "la composante principale" semble être de l'urine, "on ne sait pas de quoi est composé le liquide expulsé ; de plus amples recherches sont nécessaires", admettent les auteurs. Pour le Dr Salama en revanche, cette expérience n'est qu'une confirmation que le fluide en question n'est autre que de l'urine. Miyabi Inoue, l'urologue japonaise à l'origine de ces travaux, n'a pas répondu aux questions de Sciences et Avenir.