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« Fragmenter l’Occident » : Macron bombe le torse face à Biden

Avant même de rencontrer le président américain, le locataire de l’Élysée a sonné la charge à deux reprises depuis Washington contre l’Inflation Reduction Act.

Par Mathilde Siraud, envoyée spéciale à Washington
Les deux hommes ont dine ensemble mercredi soir a Washington.
Les deux hommes ont dîné ensemble mercredi soir à Washington.  © LUDOVIC MARIN / AFP

Temps de lecture : 3 min

Emmanuel Macron sait qu'il n'y a aucune chance pour que Joe Biden revienne sur son Inflation Reduction Act (IRA, loi de réduction de l'inflation), voté cet été et qui entrera en vigueur en janvier. Ce plan d'investissement massif de 369 millions de dollars (356 millions d'euros) en faveur de la transition énergétique désavantage pourtant considérablement les industries européennes, et donc françaises, au profit des productions « made in USA ». Le locataire de l'Élysée, qui ne cesse de protester contre cette législation protectionniste, a durci le ton mercredi, lors de sa première journée de visite à Washington.

Avant même de rencontrer son homologue américain, le président a voulu plaider la cause des Européens et exprimer ouvertement son mécontentement à deux reprises, et dans des termes pour le moins virulents. Lors d'un déjeuner avec des parlementaires dans la bibliothèque du Congrès consacré à la biodiversité et au changement climatique, Emmanuel Macron a mis les pieds dans le plat.

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Selon des participants, le président a expliqué que leurs mesures étaient légitimes, mais qu'elles devaient être « rééquilibrées » pour que la France n'en soit pas la « victime ». « C'est agressif pour nos entreprises », a-t-il regretté, comme l'a rapporté l'Agence France-Presse. « J'ai une classe moyenne [qui doit] travailler et des gens qui doivent trouver du boulot. Et la conséquence de l'IRA est que vous allez peut-être régler votre problème, mais vous allez aggraver le mien. Je suis navré d'être aussi direct », a-t-il poursuivi.

« Resynchronisation »

Quelques heures plus tard, et alors que ses propos avaient fuité dans les médias, le chef de l'État s'est expliqué devant la communauté française de Washington, allant jusqu'à accuser les États-Unis de « fragmenter l'Occident » et évoquant le risque que « l'Europe devienne une sorte de variable d'ajustement ». Emmanuel Macron a donc plaidé pour une « resynchronisation » et une meilleure « coordination » entre les deux continents, appelant à « bâtir des outils au moins aussi puissants pour éviter que se développe une forme d'hostilité commerciale ».

Engager l'Union européenne sur la voie d'un Buy European Act, un plan similaire de réindustrialisation, prendra du temps et n'est pas chose aisée. À court terme, l'Élysée nourrit l'espoir d'obtenir de la Maison-Blanche des « exemptions » concernant certains secteurs. « Il n'est pas possible que l'un gagne aux États-Unis et l'autre perde en Europe », insiste la présidence française, soulevant « un risque de distorsion ». Et d'enfoncer le clou : « On n'est pas venus ici pour célébrer l'alliance, car celle-ci est acquise. Le président veut de la substance. »

Voilà de quoi donner du grain à moudre aux rencontres officielles organisées jeudi à la Maison-Blanche. « Cette visite d'État n'est pas que protocolaire, il y a des vrais sujets de discussion à tenir », insiste un membre de la délégation française, sans que l'on sache véritablement quel geste Joe Biden pourrait accorder à la France.

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Précision et rigueur

L'entourage présidentiel met en avant les bonnes relations entre les deux dirigeants, teintées de confiance mutuelle. « Le président Biden écoute beaucoup le président Macron, notamment sur l'Ukraine. Parce qu'Emmanuel Macron s'est rendu avant même la guerre à Kiev et à Moscou. Le président Macron apprécie le sens de la précision et la rigueur du président Biden sur les affaires internationales. On le constate, notamment, sur la relation avec la Chine », fait savoir Sébastien Lecornu, ministre des Armées.

Les mots choisis jeudi lors d'une conférence de presse commune à l'issue d'un entretien dans le Bureau ovale seront scrutés de près, tant sur l'IRA que sur les conséquences de la guerre en Ukraine. « Dans cette visite, il y a 50 % d'enjeux liés à l'économie, à l'industrie, à l'innovation. Et 50 % d'échanges de vues sur les questions géostratégiques », confie un représentant français.

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