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Gazoducs Nord Stream : les marines russe et américaine présentes au moment des fuites de gaz

Difficile d'y voir encore vraiment clair dans le bouillonnement des eaux de la Baltique provoqué par des fuites de gaz massives au large des côtes danoises dans les eaux internationales. Coïncidence ou pas, au moment des fuites de gaz, les marines russe et américaine étaient présentes sur les lieux, selon nos informations. Ces deux marines sont toutes les deux capables de mener des opérations de sabotage de ce type, si la thèse du sabotage des gazoducs est validée. Des drones sous-marins équipés de caméras pourront prochainement déterminer la cause de ces fuites, voire la caractériser si des résidus de poudres d'explosifs peuvent être prélevés à l'issue d'investigations subaquatiques. En général (sauf billard à trois bandes), les explosifs utilisés révèlent leur provenance.

Des explosions sous-marines

Les quatre fuites touchant les gazoducs Nord Stream en mer Baltique sont dues à des explosions sous-marines équivalant "à des centaines de kilos" de TNT, a indiqué vendredi un rapport officiel de la Suède et du Danemark remis aux Nations Unies. "La magnitude des explosions a été mesurée respectivement à 2,3 et 2,1 sur l'échelle de Richter, soit probablement l'équivalent d'une charge explosive de centaines de kilos", indiquent les deux pays scandinaves dans une communication au Conseil de sécurité de l'ONU. "Toutes les informations disponibles indiquent que ces explosions sont la conséquence d'un acte délibéré", écrivent la Suède et le Danemark dans leur lettre adressée au secrétaire général de l'ONU, sans pointer un pays responsable.

Si cette thèse se confirme, quel modus operandi ? Il est exclu qu'un sous-marin de taille conventionnelle soit à l'origine d'une telle opération. En revanche, les gazoducs très endommagés sont situés à une profondeur estimée entre 70 à 80 mètres, accessibles encore à des plongeurs appartenant à des forces spéciales (maximum 80 mètres). Il est également possible que les gazoducs aient pu être endommagés par des mines mobiles (torpille spéciale, mine maraudeuse) déclenchées depuis la surface ou un sous-marin ou par un minuteur, voire même par un drone kamikaze téléopéré depuis la surface ou par un sous-marin. Les Russes et les Américains possèdent un certain nombre de capacités offensives pour réaliser ce type d'opérations. Des opérations navales qui vont très certainement se multiplier à l'avenir. Pourquoi ? "Elles sont non-attribuables et ne sont pas censées déclencher une guerre", explique-t-on à La Tribune.

Etats-Unis : leader de la guerre hybride sous-marine

Depuis la guerre froide, les États-Unis possèdent une solide expérience des opérations conduites sur, et depuis le fond des mers. Le réseau historique SOSUS (SOund Surveillance System), réseau américain d'hydrophones passifs destiné à la détection des sous-marins et navires a notamment fourni du renseignement acoustique de qualité sur les activités navales soviétiques, y compris près des côtés russes. Actuellement, la marine américaine met notamment en œuvre une flotte de deux câbliers et six navires océanographiques.

Selon le ministère des Armées, ces navires, qui possèdent tous de puissants sondeurs multi-faisceaux, peuvent mettre en œuvre des drones sous-marins autonomes (Autonomous Underwater Vehicle). Ces AUV sont capables d'opérer jusqu'à 6.000 m de profondeur (AUV de type Hugin-6000 et AUV de type Remus-6000) et une combinaison de véhicule sous-marin téléopéré (ROV) pouvant atteindre 4.000 m (ROV de type Hercules et Sea Horse) et 6.000 m (ROV de type CURV-21). La compétition croissante avec la Russie, qui monte en puissance dans le domaine de la maîtrise des fonds marins, et la Chine qui investit massivement dans ce domaine, a conduit les États-Unis à relancer leur effort

Dans ce contexte de tensions, la marine américaine modernise son système SOSUS de détection acoustique, désormais appelé l'Integrated Undersea Sound System (IUSS). Il intègre notamment des dispositifs d'écoute projetables sur un théâtre d'opération. Parallèlement, avec le soutien de la Darpa, elle développe plusieurs projets visant à se doter d'une gamme complète de drones sous-marins, compatibles avec les porteurs existants ou futurs. Elle travaille à la conception d'un drone de taille intermédiaire désignés MUUV (Medium Unmanned Underwater Vehicle), destiné à la fois à des missions de Guerre des mines et de collecte de données environnementales. Ce programme va permettre de développer des grands drones multi-missions disposant d'une grande autonomie (XLUUV Echo Voyager/Orca par exemple - XLUUV : Extra-large uncrewed underwater vehicles).

La marine travaille à l'amélioration de l'autonomie et de l'endurance des drones sous-marins grâce à des stations sous-marines fixes, destinées à leur rechargement énergétique, aux communications et au transfert de données (Forward Deployed Energy and Communications Outpost - FDECO). Enfin, elle imagine des réseaux de systèmes autonomes, rapidement projetables et configurables (Advanced Undersea Warfare System - AUWS), ou des systèmes de charges utiles fixes encapsulées, capables de déployer des leurres, des armes, des nœuds de communication (Modular Undersea Effectors System - MUSE).

la montée en puissance de la Russie

Depuis plusieurs années, la Russie est complètement décomplexée dans le domaine de la guerre hybride. Elle est donc très active pour tout ce qui a trait à la lutte sous la mer. "La maîtrise des fonds marins fait partie intégrante de la stratégie navale russe avec un accent particulier sur la détection sous-marine et l'emploi de drones", explique le ministère des Armées. Créée en 1965, la Direction principale pour la recherche en grande profondeur (GUGI) est directement rattachée à l'État-major des armées russes. Elle réunit tous les moyens d'investigation et d'intervention sur les fonds marins jusqu'à une profondeur de 7.000 m et met en œuvre un panel complet de moyens comprenant des sous-marins d'intervention opérant à partir d'autres sous-marins « porteurs », des navires hydrographiques et océanographiques, mais aussi des mini-sous-marins habités, des AUV et des ROV.

Moscou investit dans le renouvellement et l'extension des moyens du GUGI, au-delà du seul besoin scientifique et dans un contexte de contraintes économiques. A un horizon plus prospectif, la Russie mise à l'instar des Etats-Unis sur le développement de drones lourds pour assurer certaines missions de lutte sous la mer, principalement dans les nouveaux espaces maritimes du Grand Nord. La Russie procède à un renforcement non négligeable de ses capacités navales avec, entre autres, l'adjonction de deux navires de collecte de renseignements de la classe Yantar (Yantar et Almaz) et de sous-marins auxiliaires.

En outre, les systèmes de propulsion à base de pile à combustible ou d'énergie nucléaire permettront aux drones de naviguer plus d'un mois. Enfin, en mars 2018, le président Poutine a annoncé le développement du système Poséidon, une torpille à propulsion nucléaire d'une portée de 10.000 km, qui porterait une charge nucléaire. Le nouveau méga-sous-marin mis en service en juillet, le Belgorod (184 mètres de long), serait capable de transporter jusqu'à huit Poséidon.