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Guerre Hamas-Israël : « Depuis le 7 octobre, nous sommes malades d’angoisse »

Des bruits de coups de feu, cette supplique en hébreu : « Shani, ils m'ont eue. » Puis le silence, étourdissant. Mercredi 25 octobre, près de trois semaines après l'attaque sanguinaire des terroristes du Hamas sur Israël, quatre membres de familles de personnes prises en otage et détenues dans la bande de Gaza participaient à une conférence de presse organisée à Paris par le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), en présence, notamment, de la journaliste Anne Sinclair.

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Il est 7 h 30, ce 7 octobre, quand Shani et May, 25 et 20 ans, reçoivent un coup de téléphone de leur sœur Eden, qui a fêté ses 24 ans la semaine dernière, retenue en zone palestinienne. Serveuse dans un bar de Tel-Aviv, Eden travaillait ce jour-là au festival Nova, qui se déroulait à quelques kilomètres seulement de Gaza, quand, au petit matin, les terroristes ont surgi pour semer la mort. Au cours de cette rave party, 270 jeunes ont été tués par les attaquants venus de Gaza. « Eden nous a appelées pour nous dire qu'on lui tirait dessus. Elle criait, pleurait, on essayait de la guider comme on pouvait, puis elle s'est réfugiée dans une voiture », relate Shani, s'accrochant au regard de sa jeune sœur May pour maîtriser sa voix.

Pendant plus d'une heure, sa sœur est restée dans ce véhicule, aux côtés des corps sans vie de deux de ses amies, pétrifiée. « Leurs téléphones n'arrêtaient pas de sonner, elle avait peur que les terroristes entendent alors elle est partie se cacher derrière un buisson. Eden est très menue, mais le buisson n'était pas assez grand pour la cacher […] On entendait les coups de feu, puis les voix des terroristes se rapprocher de plus en plus, comme s'ils nous parlaient directement », explique Shani. Quelques secondes plus tard, la famille d'Eden reçoit une note vocale déchirante pour les prévenir qu'elle a été attrapée et que Shani a tenu à diffuser ce mercredi. « Voilà ce qu'elle a dû endurer pendant plus de quatre heures, conclut sa sœur, nous n'avons pas de nouvelles depuis. »

« On peut encore sauver Itay »

Ofir a quant à elle perdu son oncle et sa tante, tués de sang-froid dans le kibboutz de Be'eri, situé à quatre kilomètres de la bande de Gaza et où les commandos du Hamas ont massacré au moins 100 personnes, selon les autorités israéliennes. À l'évocation de ses proches, la jeune fille aux cheveux blonds et au visage juvénile ne peut contenir ses larmes. « Je ne peux pas expliquer le sentiment que vous avez quand vous perdez chaque membre de votre famille les uns après les autres… » dit-elle en anglais. Elle est venue pour parler de son cousin Itay, le fils de son oncle et de sa tante, emmené lui aussi par les terroristes à Gaza. « Il habitait à Tel-Aviv, mais il était allé rendre visite à sa famille pour la fête de Sim'hat Torah », explique Ofir, brandissant une photo de son cousin, sur laquelle on voit le jeune homme brun arborant un magnifique sourire. Ofir poursuit : « Samedi matin, nous avons reçu des messages sur notre groupe WhatsApp familial. Ma tante a écrit : Priez pour nous, nous entendons des tirs et des cris dans les rues. Puis à 10 h 14, mon oncle a ajouté : Ils sont là. Appelez de l'aide ! » Ofir porte dans son regard une infinie tristesse.

Le dernier message est un cœur rouge envoyé par Orit, sa tante, à 10 h 48, accompagné de ces mots : « Ils sont à l'intérieur de la maison, j'ai peur. » « Puis nous avons perdu le contact », dit Ofir dans un sanglot. « Ils ont tué mon oncle et ma tante, mais on peut encore sauver Itay », supplie-t-elle. « Il faut envoyer la Croix-Rouge dans Gaza pour vérifier les conditions de détentions des otages », insiste Ofir. C'est aussi le message que voulait faire passer Moran Betzer Tayar ce mercredi. Son neveu Yagev et la femme de ce dernier, Rimon, ont été enlevés dans le kibboutz de Reïm le 7 octobre. « C'est le jour où nos vies se sont arrêtées, nous sommes malades d'angoisse », témoigne cette femme de 54 ans.

Dans la maison du couple, le père de Yagev a découvert partout les stigmates d'une violence inouïe : des impacts de balles dans les murs, des bris de verre et, un peu partout, des traces de lutte. « Ce 7 octobre, Rimon a envoyé un dernier message à sa mère pour lui dire qu'elle l'aimait et qu'elle était désolée. Depuis, c'est le silence. Nous sommes venus ici pour sensibiliser l'opinion, nous devons ramener les otages à la maison, tous les otages ! Et faire entrer la Croix-Rouge dans Gaza […] Nous voulons que nos proches aient des noms, pas qu'ils deviennent de simples chiffres. » Selon les dernières estimations, 220 personnes ont été enlevées par le Hamas et, depuis le 7 octobre, seuls 4 otages ont été libérés.

« Un problème mondial »

Dans le cas de chacune de ces familles, les forces de défense israéliennes ont confirmé l'enlèvement de leur proche. Toutes disposent d'un référent au sein de Tsahal, qui les informe régulièrement de l'évolution de la situation. Mais aucune d'entre elles n'a pour l'heure obtenu d'informations sur les otages en captivité. « Ils ont kidnappé des enfants, des personnes âgées, des femmes enceintes… Aucune famille ne sait comment ils se portent. Capturer des civils est un crime de guerre. Nous avons besoin que le monde sache et qu'ils soient de retour », ajoute May, la plus jeune sœur d'Eden.

Incapables de regarder les vidéos des otages diffusées par le Hamas depuis Gaza, qu'elles préfèrent donner à visionner à leurs proches, May et Shani disent tout de même encore avoir de l'espoir. « Nous faisons appel à la France, mais aussi à tous les autres pays du monde : ce n'est pas un problème israélien, c'est un problème mondial, et nous sommes à court de temps », déclare aussi Ofir. La veille de la conférence de presse, les quatre Israéliennes se sont rendues au Sénat pour rencontrer Gérard Larcher. « Il a assuré qu'il allait saisir la Croix-Rouge internationale pour avoir des nouvelles des otages », a déclaré Yonathan Arfi, le président du Crif.

Devant l'assemblée réunie ce mercredi, c'est Anne Sinclair qui a conclu le tour de parole : « Je pense qu'il est important de dire que les gens qui vivaient dans ces kibboutz décimés ne sont pas des colons. Ce sont des populations éprises de justice, de liberté, qui font preuve de beaucoup de bienveillance, acteurs de nombreuses missions humanitaires… » « Tous les membres de ma famille de Be'eri sont militants pour la paix, les valeurs du kibboutz, c'est d'aider les autres. Communiquer sans violence, voilà ce que mes grands-parents m'ont toujours enseigné », confirme Ofir.

« Nous sommes tous des gens très pacifiques, nous croyons à l'idée de vivre tous ensemble. Nous avons seulement de très gros problèmes avec les organisations terroristes et avec ceux qui justifient leurs actions », abonde Moran. Venu visiter les kibboutz martyrs il y a quelques jours, Yonathan Arfi est tombé sur une maison où toute une famille a été tuée. Devant celle-ci trônait encore un panneau du mouvement israélien Shalom Akhshav. En Français, ces mots signifient : « La paix maintenant. »