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Guerre nucléaire : la Russie envisage-t-elle une attaque nucléaire tactique ?

Guerre nucléaire : la Russie envisage-t-elle une attaque nucléaire tactique ? GUERRE NUCLEAIRE. La menace nucléaire plane sur l'Ukraine depuis le début de la guerre mais s'amplifie à chaque nouvelle allusion de Vladimir Poutine sur une offensive russe. Cette fois il pourrait être question d'arme nucléaire tactique.

[Mis à jour le 4 octobre 2022 à 17h58] La menace nucléaire n'est pas nouvelle dans le contexte de la guerre en Ukraine mais elle n'a jamais été aussi élevée que depuis l'annexion par la Russie de quatre régions ukrainiennes. Avant la prise du Donbass, Vladimir Poutine a assuré être prêt à recourir à "tous les moyens" nécessaires et disponibles pour défendre l'intégrité du territoire russe. Et le Kremlin ne manque pas d'armes dans son arsenal nucléaire, mais les déclarations du leader Tchétchène Ramzan Kadirov ont attiré l'attention sur une possible attaque nucléaire tactique. Ces bombes atomiques sont moins dévastatrices que leurs grandes sœurs stratégiques mais elles restent capables de dégâts ravageurs sur un périmètre aussi vaste qu'une grande ville française.

Ces armes nucléaires tactiques, qui peuvent être des bombes ou des missiles armés de têtes nucléaires, ont été pensées pour être lancées sur les champs de bataille pour anéantir l'ennemi lorsqu'il a l'avantage. Mais si l'assaut frapperait un grand coup, il paralyserait ensuite l'affrontement car tout serait détruit et surtout, la zone serait contaminée par les radiations. Militairement, les avantages d'une attaque nucléaire tactique sont donc discutables mais sur le plan politique ils sont nuls. Un assaut tactique reste une attaque nucléaire qui appellerait une réponse sévère et immédiate de l'Occident. Les Russes "ont les moyens de le faire, mais ils savent que c'est une arme de dernier recours et [ils] n'en sont militairement pas là", a estimé le colonel Michel Goya sur BFM Business le 4 octobre. La Russie n'a donc pas fait le pas entre dissuasion et intimidation nucléaire mais l'Occident garde un œil averti sur les mouvements russes.

Les Américains sont particulièrement sur le qui-vive fin septembre, aucune "indication d'un usage imminent d'armes nucléaires" n'avait été détecté par les Etats-Unis, avait indiqué Jake Sullivan, conseiller pour la sécurité nationale à la Maison Blanche. Mais l'usage d'"armes nucléaires de faible puissance" comme aime les appeler le dictateur tchétchène est-il aussi facilement repérable ? Il apparait toutefois difficile que la préparation d'une attaque nucléaire tactique passe à travers les mailles de la surveillance de l'Otan. Plus que de surveiller, les forces de l'alliance sont prêtes à réagir comme l'a indiqué l'ancien directeur de la CIA, David Petraeus, sur ABC dimanche 2 octobre : "Nous répondrions en menant un effort de l'Otan qui éliminerait toutes les forces conventionnelles russes que nous pouvons voir". L'homme a toutefois ajouté : "on ne veut pas se lancer, une nouvelle fois dans une escalade nucléaire."

La Russie peut-elle entamer une guerre nucléaire ?

Les menaces de guerre nucléaire sont une rengaine de la Russie depuis le début de l'année 2022. Elles vont de pair avec l'invasion de l'Ukraine par les forces russes lancée le 24 février dernier et sont depuis régulièrement proférées par les dirigeants du Kremlin. Mais à chaque fois qu'une attaque nucléaire a été mentionnée, la possibilité de subir un assaut a été écartée d'une part par les renseignements militaires, de l'autres par la réglementation sur les attaques nucléaires.

Le lancement d'une attaque nucléaire offensive est formellement interdit à toutes les puissances nucléaires et la Russie se mettrait en porte à faux si elle initiait l'attaque. De plus les conséquences du largage d'une bombe atomique seraient sans précédent et n'épargneraient pas la Russie. Reste que la doctrine du Kremlin permet d'user d'armes nucléaires pour des attaques tactiques sur certaines zones et cette possibilité a déjà été avancée par les forces russes il y a quelques mois. Selon le général Jérôme Pellistrandi, invité sur BFMTV le 21 septembre, "ce type d'armes peut être utilisé contre les forces ukrainiennes pour essayer de provoquer une panique". 

La doctrine russe sur les attaques nucléaires autorise aussi un assaut si les intérêts vitaux de la Russie sont menacés et Vladimir Poutine a entrouvert cette porte lors de son discours du 21 septembre en assurant que l"intégrité territoriale, [la] liberté, [la] souveraineté seront défendues [de la Russie] par tous les moyens nécessaires" et qu'elles étaient déjà mises en danger par les actions de l'Occident. Cela concerne désormais, en plus, à ses yeux, les quatre régions ukrainiennes qu'il a annexées. Enfin le caractère "jusqu'au boutiste" de la Russie est le dernier facteur qui fait craindre une attaque. "On sait qu'il est prêt à aller au sacrifice. Evidemment, les Russes ne reculeront pas, c'est un paramètre que nous devons prendre ne compte, il n'y aura pas de recul, de défaite historique de la Russie, il ira jusqu'au bout s'il pense qu'il peut perdre", a ainsi souligné le colonel Peer De Jong, vice-président de l'Institut Themis, également sur la chaîne d'information en continu.

Quelles sont les réactions face à la menace d'une guerre nucléaire ?

La Russie est la seule a avoir brandi, à plusieurs reprises, la menace nucléaire et la seule aussi à soutenir l'idée. En Occident, un assaut nucléaire est considéré comme le pire des scénarios et la Chine et l'Inde qui se présentent comme des alliés de Moscou face au bloc occidental ont aussi refusé l'hypothèse d'une attaque nucléaire en appelant à trouver "cessez-le-feu à travers le dialogue" ainsi qu'une "solution qui règle les préoccupations sécuritaires légitimes de toutes les parties dès que possible". Difficile dès lors pour Vladimir Poutine de trouver du soutien. Reste que la menace nucléaire plane toujours et que les réactions au discours vindicatif du chef du Kremlin ne se sont pas faites attendre. A New-York, lors de l'Assemblée générale de l'Onu, le chef de l'Otan a dénoncé la "rhétorique nucléaire dangereuse" du président russe. Il a été suivi du président américain Joe Biden qui a accusé la Russie de "violer de manière éhontée" les principes fondateurs des Nations unies.

À l'opposé de Washington, le président ukrainien, Volodymyr Zelenksy a, lui, affirmé ne "pas croire" à l'utilisation d'armes nucléaires par la Russie, dans une interview accordée à la chaîne télévisée allemande Bild TV, tandis qu'Emmanuel Macron a invité la communauté internationale à "mettre le maximum de pression" sur Vladimir Poutine. S'exprimant en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, le président français a par ailleurs salué les déclarations de la Chine et de l'Inde.

"Le discours de Vladimir Poutine et sa décision de mobiliser la population russe est un aveu clair que son invasion est un échec", a, quant à elle, jugé la nouvelle Première ministre britannique Liz Truss, tandis que le chancelier allemand Olaf Scholz a estimé que "Poutine ne fait qu'empirer les choses" et qu'"il a depuis le début complètement sous-estimé la situation, et la volonté de résistance des Ukrainiens".

Plusieurs menaces nucléaires proliférées par Vladimir Poutine

On ne compte plus les fois où la Russie a menacé l'occident d'user de sa force nucléaire, que se soit ouvertement ou entre les lignes. A intervalle régulier et en particulier lorsque l'armée du Kremlin est en mauvaise posture ou en perte de vitesse, le stratégie de dissuasion nucléaire revient sur le devant de la scène et la mise en garde de Vladimir Poutine dans son discours du 21 septembre 2022 est une nouvelle étape de cette guerre. Mais si les menaces se succèdent, elles sont toujours présentées comme des réponses à une offensive nucléaire occidentale. Le maître du Kremlin a inversé les rôles lors de son allocution en accusant l'Otan de faire du "chantage de l'arme nucléaire", une tactique qui a plutôt été observée dans le camp russe.

Avant la prise de parole comprise comme un signe de faiblesse de Vladimir Poutine, la précédente menace nucléaire russe remonte au 6 juillet 2022 et est signée par le vice-président du Conseil de sécurité, Dmitri Medvedev. Sur son compte Telegram le responsable politique avait agité l'arsenal russe à la figure de l'Occident : "L'idée même de châtier un pays qui a le plus grand arsenal nucléaire au monde est absurde en soi. Et cela crée potentiellement une menace pour l'existence de l'humanité". Et l'ancien président de la Fédération de Russie n'en n'était pas à son coup d'essai puisqu'en mars, seulement quelques jours après l'invasion de l'Ukraine par l'armée russe, il avait détaillé les scénarios dans lesquels la Russie était autorisée à faire usage de ses armes nucléaires, des cas de figure qui rejetaient bien souvent la faute sur l'Occident. Entre temps, le ministre russe des Affaires étrangères a aussi brandi la menace nucléaire par intermittence avec le maitre du Kremlin, Vladimir Poutine.

Que prévoient les simulations d'une attaque nucléaire russe ?

La menace nucléaire a été brandie plus d'une fois depuis le début de la guerre en Ukraine. Mais l'hypothèse d'une attaque a pris une autre dimension au printemps 2022 quand en échos aux discours de Vladimir Poutine sur la force de frappe et l'arsenal russe, les médias proches du Kremlin ont participé à la propagande et se sont prêtés à des simulations d'une attaque nucléaire. Sur la chaîne publique Rossiya 1, des chroniqueurs ont assuré le 28 avril 2022 qu'il ne suffisait que de quelques minutes pour qu'un missile rase les villes européennes : 106 secondes pour rayer Berlin de la carte, 200 pour Paris et 202 pour Londres. La scénario apocalyptique a de quoi faire peur mais il est surtout biaisé par le discours pro-russe et véhicule de fausses informations. 

Les jours suivants, le discours des médias russes et les simulations ont été discrédités par les explications de Benjamin Gravisse dans les colonnes de Libération. Le politologue spécialiste des questions militaires russes a affirmé que les scénarios s'appuyaient sur les capacités du missile Satan 2 qui est bien en possession de la Russie mais encore en phase de test et inutilisable avant la fin de l'année. Deuxième problème, les simulations tenaient compte d'un lancement opéré depuis de l'enclave de Kaliningrad alors que cette base militaire n'est pas équipée pour lancer un missile nucléaire et enfin, même lancé depuis cette zone, un missile prendrait plus de temps pour atteindre les capitales européennes.

Si ces simulations d'attaques nucléaires sont erronées, les risques d'un assaut à l'arme atomique sont toujours possibles et les dégâts seront sans précédent. Reste qu'à l'heure actuelle à part les capacités et les périmètres des destruction estimés de chaque missile, rien ne permet de simuler les conséquences d'une attaque nucléaire. L'on sait simplement qu'au sein de l'arsenal russe, certaines ogives nucléaires peuvent réduire en poussière un territoire sur des dizaines de kilomètres. A noter que l'Occident dispose de missiles à la force de frappe équivalente.