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INEDIT - Pension, bizutage... Yannick Noah se livre sur ses débuts difficiles à Nice

Yannick Noah

Yannick Noah est arrivé à Nice à 12 ans pour une formation de tennis intensive. © PHILIPPE HUGUEN / AFP

Alexandre Dalifard / Crédit photo : PHILIPPE HUGUEN / AFP 06h00, le 31 mai 2023

L'édition 2023 de Roland-Garros est marquée par les 40 ans de la victoire de Yannick Noah aux Internationaux de France. Pour l'occasion, Europe 1, radio officielle du tournoi, s'est rendue au Cameroun pour rencontrer la légende du tennis français qui a accepté de se livrer au micro de Jacques Vendroux. Il revient notamment sur son arrivée à Nice

Alors que la phase de qualification pour Roland-Garros a débuté le 22 mai, l'édition 2023 des Internationaux de France est particulière pour Yannick Noah qui fêtera les 40 ans de sa victoire sur la terre battue parisienne. Pour l'occasion, Europe 1, radio officielle du tournoi, s'est rendue au Cameron pour rencontrer la légende du tennis français et consacre un podcast événement en son honneur. De son enfance en Afrique, jusqu'à son triomphe à Roland-Garros, Yannick Noah se confie longuement au micro de Jacques Vendroux.

Dans ce troisième épisode, le champion français aborde une partie de sa vie pour laquelle il garde un souvenir douloureux et difficile. Après une blessure importante de son père, qui devra arrêter sa carrière de footballeur par la suite, la famille de Yannick Noah part s'installer à Yaoundé, capitale du Cameroun. C'est dans ce pays qu'il découvre le tennis et qu'il se fait remarquer par l'Américain Arthur Ashe, premier joueur noir à remporter un tournoi du Grand Chelem. Une rencontre qui changera son destin et qui le poussera à s'envoler pour Nice et à participer à une formation intensive de tennis sous la houlette de Patrice Beust. Un exil en France douloureux pour Yannick Noah.

"Un voyage pénible pour un gamin de 12 ans"

"Le voyage a été très pénible pour un gamin de 12 ans", admet l'ancien champion de tennis français. À l'époque, il est arrivé tout seul à Marignane avec seulement un papier manuscrit qui lui précisait les indications à suivre. C'est là que débute un petit périple pour lui. De cette ville du sud de la France, il a dû prendre le bus pour se rendre à la gare Saint-Charles de Nice pour enfin marcher jusqu'au parc Impérial. Un dernier trajet difficile en pleine montée. "À l'époque, les valises n'avaient pas de roues. Maintenant, on a tous des roulettes. Mais quand tu pars avec tout ton matériel, tes livres, tes albums de photos, tes tenues de tennis et d'école... C'était hyper lourd pour moi, j'étais tout frêle. J'ai dû m'arrêter 100 fois, j'avais mal partout et d'un coup j'arrive devant le collège du parc Impérial. C'était majestueux", explique-t-il au micro d'Europe 1.

À peine arrivé, Yannick Noah était attendu par les autres pensionnaires. "On m'aide avec ma valise et là j'arrive au dortoir où m'attendaient tous les gars. Il faut savoir qu'ils avaient 14 ou 15 ans alors que moi j'en avais 12. C'est un peu la surprise, mais tout de suite les grands-frères. Forcément, on te donne le dernier lit, c'est de bonne guerre, puis un jeune me souhaite la bienvenue en disant 'Bamboula' (rire). Mais non, très bien accueilli", raconte le vainqueur de Roland-Garros 1983. Sur place, Yannick Noah se retrouve sous les ordres de Patrice Beust aux côtés de Dominique Bedel et des champions de France minimes et cadets.

Ciblé par des bizutages

Avec son nouvel entraîneur, un lien s'est tout de suite créé. "Il me parlait comme à un enfant, sachant que mes parents étaient à l'autre bout du monde. Donc, dans son ton, il y avait tout de suite de l'affection. La première chose que j'ai aimé chez Patrice Beust c'est qu'il était déjà comme un tonton. Il y avait ce côté affectif qui était essentiel et c'est ce qui m'a permis de rester", admet-il. En plus de ce soutien, Yannick Noah a pu compter sur l'appui de l'intendant de la pension. Nommé Robert Clément, ce monsieur considérait les pensionnaires comme ses enfants. "C'était comme un deuxième papa aussi. Donc j'ai eu cette chance d'avoir cette affection à ce moment-là de ma vie, de ce môme complètement déraciné, à moitié perdu avec sa raquette", se réjouit-il au micro de Jacques Vendroux.

Etant le nouveau pensionnaire, plus jeune que les autres, Yannick Noah a été la cible de bizutages. "J'ai été bizuté comme ça se faisait, donc tu ne te poses pas trop de questions. En plus de ça, je ne pouvais pas me retourner. Je n'ai pas osé aller en parler à Patrice Beust ni à l'intendant. Pour moi cela signifiait que je n'étais pas fort si j'allais me plaindre. Et au final, ce sont des humiliations", assure-t-il. Si aujourd'hui Yannick Noah peut mettre des mots sur ces sentiments, à l'époque, il ne pouvait aller plus loin que les émotions. "Mais dans ces émotions, je sais qu'il y avait quelque chose en moi qui disait : 'vous allez voir, un jour, je vais vous massacrer'", se souvient-il.

L'influence de son ami Pierrot

Pour ses premières vacances, Yannick Noah retourne pendant trois mois et demi au Cameroun. "Je ne voulais plus revenir en France. Trop de blancs, trop froid, trop perdu et la nourriture de la cantine trop pourrie. Je les aime tous mais je ne voulais pas revenir", avoue-t-il. Malgré l'amour pour le Nice Lawn Tennis Club (LTC) et cette atmosphère familiale, Yannick Noah admet que c'est un proche qui l'a convaincu de rester. "Quand tu as un ami en pension, c'est comme à l'armée ou à la guerre. Et moi j'étais à la guerre en fait et mon ami Pierrot, c'était comme mon frangin", se souvient-il.

À son départ, Yannick Noah explique à son ami pensionnaire qu'il va quitter la formation. "C'est bon les bizutages et tout ça, moi je rentre à la maison", lui a-t-il dit. "Si tu ne reviens pas, je ne reviens pas non plus. Par contre, si tu reviens, je reviens", lui aurait répondu son ami Pierrot.