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Inflation : 40% de la hausse des prix attribués à la spéculation sur les matières premières

Si la guerre en Ukraine a déréglé beaucoup de marchés, les effets d'aubaine sont nombreux, y compris sur le cours du blé. Des banques américaines sont notamment pointées du doigt.

Sur un an, selon l’estimation provisoire réalisée fin janvier 2023 par l'INSEE, les prix à la consommation ont augmenté de 6%, contre 5,9% en décembre. Preuve que la hausse des prix est loin d'être terminée. Des taux jamais observés depuis les années 1980 et qui s'expliquent en grande partie par la reprise économique anarchique post-covid et par l'impact de la guerre en Ukraine sur les matières premières.

L’Ukraine et la Russie représentant à elles deux un tiers du blé commercialisé dans le monde, les cours se sont fatalement envolés de près de 75% dans les semaines suivant le début du conflit avec une tonne de céréales à plus de 400 euros. En  gardant ses stocks de blé pour affoler les marchés, Vladimir Poutine sait qu'il dispose d'une arme commerciale.

Négociations tendues entre fournisseurs et distributeurs

A contrario, la flambée du prix du gaz est liée à la décision des Européens de cesser toute importation de gaz russe. Et comme les prix du gaz et de l'électricité sont liés, les factures des entreprises et des particuliers explosent. Les fournisseurs de produits alimentaires demandent donc une augmentation de leurs tarifs pour compenser ces coûts. Des négociations tendues avec les distributeurs sont engagées à ce sujet.

Mais une étude du cabinet AgileBuyer, dévoilée dans une enquête de France Info révèle que 80% des distributeurs soupçonnent certains de leurs fournisseurs de pratiquer une inflation opportuniste.  Toujours selon cette enquête, une étude du Sénat et de l’inspection générale des finances fin 2022 aurait conclu que fournisseurs et distributeurs ont comprimé leurs marges pour éviter une inflation plus forte.

Acteurs financiers qui spéculent sur le blé

D'autres acteurs sont soupçonnés de spéculer fortement sur le prix des matières premières cotées en Bourse, agricoles notamment. À l’inverse des négociants physiques, qui échangent réellement des marchandises, les acteurs purement financiers (banques, fonds d’investissement, établissements de crédit) sont pointés du doigt.

“On a vu que ces acteurs représentent une large part des achats sur ces marchés”, dénonce sur France Info Jean-François Dubost, du CCFD-Terre Solidaire. Selon une sur le prix du Blé à Paris réalisée par son ONG, “En juin 2022, huit actions sur 10 étaient spéculatives."

Trading à très haute fréquence

Des acteurs qui interviennent le plus souvent juste avant la hausse des prix pour faire une plus-value et viennent dérégler le marché en "profitant d’une crise alimentaire”, contribuant à accroître l'inflation. Plusieurs banques américaines ont ainsi été identifiées comme des profiteuses de la crise par des observateurs de l'ONU. Celles-là mêmes qui étaient impliquées dans la crise des subprimes en 2007-2008.

Le phénomène est accentué par l'utilisation d'un trading à haute fréquence avec des ordres d'achat ou de vente passés sur les marchés via des centres de données informatiques placés le plus près possible de l’endroit où le marché va réceptionner les ordres pour prendre la concurrence de vitesse.

Frilosité du Parlement européen

À ce petit jeu, quatre grands groupes appelés les "ABCD” à cause de leurs initiales tirent les marrons du feu en revendant très cher lors d ela montée des cours : Archer Daniels Midland (ADM), Bunge, Cargill et le groupe Louis Dreyfus. Selon certains spécialistes, Dreyfus réaliserait 30 milliards de dollars de chiffre d’affaires et plus d’un milliard de bénéfices par an. Cette spéculation compterait pour près de 40% dans la hausse des prix des matières premières.

Pour lutter contre ce phénomène, le Parlement européen examine une directive sur les instruments financiers, afin de mieux encadrer le trading à haute fréquence. Il reste en effet réticent à interdire le phénomène, comme le réclament de nombreux eurodéputés écologistes.