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IVG dans la Constitution : quand l'avortement y sera-t-il inscrit ?

IVG dans la Constitution : quand l'avortement y sera-t-il inscrit ? Le Sénat a voté le 1er février en faveur de l'inscription dans la Constitution de la "liberté" de recourir à l'IVG. Pour autant, la modification ne va pas entrer en vigueur tout de suite et un long travail parlementaire doit encore avoir lieu.

Ils l'avaient refusé à l'automne dernier, ils ont finalement changé d'avis. Les sénateurs ont voté en faveur de l'inscription du droit à l'interruption volontaire de grosses (IVG) dans la Constitution le mercredi 1er février 2023, à 166 voix contre 152. Mais il convient d'être plus précis, le Sénat a accepté de préciser à l'article 34 de la Constitution l'alinéa qui prévoit "la liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse, pas de droit à proprement parler donc comme l'aurait souhaité l'Assemblée nationale. Laquelle a voté le 25 novembre dernier la constitutionnalisation du droit à l'avortement, sur proposition des élus de gauche et bénéficiant d'un soutien transpartisan avec la majorité.

Dans sa première version, la proposition de loi constitutionnelle sur le droit à l'IVG n'a pas convaincu les occupants du palais du Luxembourg qui ont rejeté le texte en commission des Lois. Il a fallu trouver un autre consensus pour réunir une majorité de sénateurs prête à adopter le texte. Et c'est à Philippe Bas, sénateur LR de la Manche et ancien collaborateur de Simone Veil, qui est à l'origine de l'amendement qui a fait mouche en substituant le terme de "liberté" à celui de "droit". "Il n'y a pas de droit absolu, il y a une liberté déjà reconnue et que nous pouvons écrire dans la Constitution, mais à la condition qu'il y ait une conciliation entre les droits de la femme enceinte de mettre fin à sa grossesse et la protection de l'enfant à naître après un certain délai", a-t-il expliqué.

C'est un pas de plus vers l'inscription du droit à l'IVG dans la Constitution mais ce changement ne se fera pas demain. Le texte amendé et voté doit retourner à l'Assemblée nationale avant que d'autres étapes viennent entériner la chose.

De "droit à l'IVG" à "liberté", que prévoit le texte ?

Le texte sur l'avortement en France a été voté au Sénat mais sous une forme différente que celle qui a été adoptée par l'Assemblée nationale. La droite sénatoriale a fait barrage au texte qui prévoyait l'ajout d'un article 66-2 à la Constitution : "La loi garantit l'effectivité et l'égal accès au droit à l'interruption volontaire de grossesse". A la place, le sénateur de la Manche Philippe Bas a suggéré un amendement pour rendre acceptable la constitutionnalisation du droit à l'IVG : inscrire à l'article 34 du texte fondamental que "la loi détermine les conditions dans lesquelles s'exerce la liberté de la femme de mettre fin à sa grossesse". C'est ce texte amendé qui a remporté la majorité des voix de la chambre haute le 1er février 2023.

Le sénateur estime qu'avec cette modification, la constitutionnalisation du droit à l'IVG suit la dynamique instaurée par une décision du Conseil constitutionnel du 27 juin 2001 qui considère la liberté d'interrompre sa grossesse comme une composante de la liberté des femmes et "qui a donné valeur constitutionnelle". "L'inscription dans la Constitution de cette liberté viendrait parachever l'évolution ainsi engagée", a argumenté le sénateur.

Autre avantage que Philippe Bas trouve à son amendement sur l'IVG en France : la formulation proposée permet de laisser le champ libre à une modification de la loi Veil, comme cela avait été le cas pour l'allongement du délai pour recourir à l'avortement en avril 2020 ou pour sa prise en charge par l'Assurance maladie votée il y a quelques années. Des exemples choisis à dessein.

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Un nouveau vote à l'Assemblée, avant un référendum ?

Le vote du Sénat ne pas va entraîner dès demain la modification de la Constitution. Un long travail parlementaire doit encore avoir lieu. Le Sénat a adopté un texte amendé par rapport à la version votée à l'Assemblée nationale. Or, une proposition de loi constitutionnelle doit être votée dans les mêmes termes par les deux chambres. Le texte va donc retourner au palais Bourbon pour être voter sous sa nouvelle forme.

C'est donc une nouvelle séquence de travail parlementaire qui se prépare, d'autant que les députés pourraient débattre de la disparition de l'expression "droit à l'IVG" au profit de "liberté". Le texte restant une avancée malgré cette rectification, il pourrait être de nouveau adopter par l'Assemblée. Mais faut-il encore savoir quand le vote sera organisé alors que la réforme des retraites ou la loi immigration monopolisent l'attention des députés. L'entrée du droit à l'IVG dans la Constitution ne pourrait être à l'ordre du jour que dans plusieurs mois. Et après cette étape, il faudra de nouveau patienter soit jusqu'à l'organisation d'un référendum, soit jusqu'à la proposition par le gouvernement d'un projet de loi reprenant le texte adopté par le Parlement.

Il est de coutume pour les propositions de loi constitutionnelle de soumettre le texte aux citoyens Français après l'adoption du texte par les deux assemblées du Parlement. Mais le résultat du référendum pouvant comporter des risque, une autre issue et la proposition d'un projet de loi par l'exécutif mais alors un nouveau relai parlementaire sera nécessaire et sans la certitude que les deux chambres votent deux fois dans le même sens.

Un texte qui ne satisfait pas pleinement

L'amendement de Philippe Bas est un pas en avant fait par la droite sur l'IVG, mais il est loin de convaincre tout le groupe des Républicains. La contre-proposition fait également perdre en route tout le poids que la gauche a voulu donner au texte. La sénatrice socialiste Marie-Pierre de La Gontrie regrette le remplacement de l'expression "droit à l'IVG" par la "liberté" de recourir à l'avortement, rapporte ainsi Le Monde. Une autre sénatrice du PS, Laurence Rossignol, fait le même constat auprès du Parisien mais préfère retenir que "dès lors que la Constitution garantit que l'IVG est une liberté, elle est protégée".

Des voix s'élèvent avec plus de sévérité sur l'amendement Bas, comme celle de la sénatrice Mélanie Vogel qui juge que le texte "n'est pas satisfaisant, car rien n'empêchera un jour le législateur de régresser sur le droit à l'IVG". Si sur la forme, la gauche trouve à redire, dans le fond, l'amendement de Philippe Bas reste une solution pour constitutionnaliser le droit à l'avortement, une situation que Mélanie Vogel résume en une question, rappelle le journal du soir : "Vaut-il mieux un pas insatisfaisant, mais un pas tout de même, ou pas de pas du tout ?"

A droite, les élus toujours très prudents lorsqu'il s'agit de modifier la Constitution le sont encore plus quand il s'agit du droit à l'IVG. D'autant plus que le président du groupe LR au Sénat, Bruno Retailleau, s'oppose à la constitutionnalisation de ce droit, plus fermement encore quand la proposition vient, à l'origine, de la gauche radicale. Certains sénateurs jugent même "incompréhensible" la démarche de Philippe Bas qui avait lui-même rejeté le texte le 25 janvier. Mais chez LR, la liberté de vote pour les questions sociétales est actée.