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Journée mondiale de la contraception : "Une dizaine de méthodes, c'est trop insuffisant"

Dix ans après la "crise" de la pilule, provoquée par le décès d'une femme par AVC, le doute subsiste encore chez les femmes qui en font néanmoins le premier moyen de contraception (une sur trois), devant le stérilet et le préservatif. Mais 8 % d'entre elles, sans désir d'enfant, ne se protègent pas. Et les hommes dans tout ça ? Les lignes bougent quand on parle de contraception, au cœur d'une journée mondiale d'information et de mobilisation le 26 septembre. 

Après les polémiques sur la pilule ces dernières années, quelles sont les questions les plus prégnantes qui se posent aujourd'hui en matière de contraceptions ?

La tendance reste à la remise en question des hormones, pour les effets secondaires, pour l'écologie, avec la volonté de passer sur d'autres moyens de contraception comme le stérilet (DIU) au cuivre que de plus en plus de sages-femmes et de gynécologues n'hésitent plus à poser à des femmes qui n'ont jamais eu d'enfants. Un retour à une contraception dite naturelle aussi : calcul des cycles, retrait... ce qui entraîne un gros risque d'échec. 

Les jeunes ne se détournent pas pour autant de la contraception...

Non. Mais va on va peut-être lâcher plus facilement les préservatifs. Les jeunes restent conscients qu'il faut prendre une contraception, Mais ils mettent au même niveau les méthodes "naturelles" et les autres, alors qu'elles n'ont une fiabilité que de 70 %. On ne peut pas tout mettre sur le même plan. La pilule, c'est plus de 98 %.

Et l'industrie du médicament n'a pas fait des progrès pour les rassurer... 

Attention, il ne faut pas se tromper de débat, il y a énormément de femmes qui sont très bien sous pilule. On met en lumière le discours des opposantes, mais ça marche généralement très bien. Mais, oui, il y a de plus en plus de pilules qui limitent ces effets indésirables.

Y a-t-il vraiment une flambée des infections sexuellement transmissibles chez les moins de 30 ans, le ministre de la Santé François Braun a annoncé le 20 septembre un dépistage gratuit jusqu'à 26 ans ?

Oui, complètement, il y a un retour des IST, la syphilis, des chlamydias, parce qu'on abandonne complètement le préservatif, parce qu'on a cette idée générale qu'on ne meurt pas du sida, qu'un traitement existe, avec une totale méconnaissance de ce que peut entraîner un traitement. 

C'est une prise de risques ou une méconnaissance ?

Clairement une méconnaissance. On peut "attaquer" le gouvernement qui ne remplit pas son devoir, faire appliquer une loi qui date de 2001 et qui dit que tout élève de la maternelle à la terminale reçoit trois heures par an d'éducation à la vie sexuelle et affective. Ce n'est pas la réalité. 

C'est le cas pour 15 % des élèves selon le rapport de l''inspection générale remis en 2021 à Jean-Michel Blanquer...

Il y a clairement une responsabilité car faire de l'éducation sexuelle et affective, c'est aussi parler de plaisir, de consentement.. tout en mettant en garde contre les IST. Il y aurait peut-être moins de problèmes sur les relations non consenties, les jeux de pression et de domination autour du préservatif.

"Il faut faire une campagne de communication sur le préservatif"

Selon les chiffres, moins de 1 % des hommes mettent des préservatifs en France...

Je suis une fervente défenseuse du préservatif contre les IST et comme moyen de contraception, il n'a pas du tout la cote ! On lui a collé l'étiquette de "c'est pas cool", "c'est moins sensible", "ça enlève les érections"... C'est un moyen de contraception qui va à beaucoup de personnes. Il faudrait faire une campagne de communication sur le fait que c'est un moyen de contraception en plus d'être le seul moyen de se protéger des IST.

Les hommes restent moins concernés que les femmes sur ces questions ?

Oui, totalement, la charge mentale, c'est pour la femme. Et quand les hommes le sont, ils questionnent leur partenaire pour connaître son moyen de contraception. Mais il y a quand même un net changement. Ces dernières années, les hommes se posent des questions et se sentent un peu plus concernés.

D'autant qu'il y a d'autres moyens de contraception pour les hommes...

Pour moi, le préservatif n'est pas un moyen de contraception masculin. Il y a des préservatifs masculins et féminins. C'est un moyen de contraception collaboratif. Mais c'est vrai qu'il y a d'autres moyens de contraception masculins : la remontée testiculaire par exemple, même si c'est une méthode décriée qui a fait l'objet d'une intervention de police sanitaire, l'agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM) interdit la vente mais n'a pas fait pression sur le gouvernement pour qu'on travaille sur l'amélioration du dispositif. La police sanitaire (manque de marquage CE, non-inscription dans la démarche des dispositifs médicaux) est justifiée, mais n'est pas accompagnée. C'est dommage parce que la prise de conscience des hommes se traduit par exemple par une demande croissante de vasectomie (NDLR : stérilisation définitive) on est passé de 0,8 % en 2017 à plus de 2 %. Et encore, les urologues sont réticents, on est dans une société très paternaliste.

Vous êtes satisfaite de l'annonce, cette semaine, de la gratuité de la pilule du lendemain pour toutes les femmes, sans ordonnance ?

Ne l'appelons pas "pilule du lendemain" mais "pilule d'urgence"...  Oui, c'est très bien ! Mais on ne peut pas dire que le gouvernement se "mouille" beaucoup avec cette mesure, comme avec la contraception gratuite pour les femmes de moins de 26 ans (NDLR : depuis le 1er janvier 2022). C'est bien de rendre gratuit des choses qui étaient déjà remboursées, mais à quand le développement de nouvelles méthodes de contraception, notamment chez les hommes ? Au planning familial, on voudrait une démédicalisation des moyens de contraception quand c'est possible, et on milite pour qu'on ait beaucoup plus de moyens de contraception, il faut investir dans la recherche. Il en existe seulement une dizaine, c'est trop insuffisant !