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Julie Otsuka : « J’écris pour fendre le cœur des lecteurs »

De passage à Paris, l’écrivaine américaine évoque l’histoire des Nippo-Américains, mais aussi la mémoire et le vieillissement, thèmes abordés dans son nouveau roman, « La Ligne de nage ».

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« La Ligne de nage » (The Swimmers), de Julie Otsuka, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Carine Chichereau, Gallimard, « Du monde entier », 176 p., 19 €, numérique 14 €.

« Ma voix spontanée est celle de l’humour. » De la part de Julie Otsuka, on ne s’attendait guère à ce genre d’affirmation, tant ses romans sont d’abord empreints d’une mélancolie douloureuse. Celle des Nippo-Américains dont, au fil des récits, elle retrace la tragédie : le départ subi vers les Etats-Unis, une vie de labeur, l’internement dans des camps après l’attaque de Pearl Harbor, en 1941. Celle, encore, des mémoires balayées par les ravages de l’âge.

Et donc, l’humour ? « Il était très présent dans mes premières nouvelles, et, depuis ­quelque temps, je me l’autorise à nouveau », assure l’écrivaine américaine, promenant son regard pétillant sur les vastes fenêtres du bureau de Claude Gallimard où, de passage à Paris, elle nous accorde un peu de temps. Il est vrai que le rire habite La ­Ligne de nage, son nouveau roman. Subtilement, telle une musique de fond dont on perçoit parfois la mélopée lointaine, lorsqu’une éclaircie le ­permet.

Le livre débute comme une plongée dans le quotidien d’une attachante communauté de nageurs. Dans l’eau où ils barbotent chaque semaine, les hiérarchies du monde extérieur s’effacent. Mais la formation d’une fissure au fond du bassin bouscule leur routine. Les accros aux longueurs échafaudent des hypothèses plus ou moins loufoques quant à son apparition, jusqu’à ce que la direction décide, sécurité oblige, de fermer la piscine. Le livre se ­concentre ensuite sur l’une d’entre eux, Alice, bientôt placée en maison de retraite, car ses souvenirs s’estompent. La quasi-comédie des premières pages se mue alors en tragédie. « J’aime l’idée de mettre le lecteur à l’aise avec un peu de légèreté, puis de le surprendre à la moitié du livre. L’humour et la tristesse sont les deux faces d’une même pièce. »

« La mélodie rythmique du “nous” »

Le lecteur sera aussi frappé par l’usage de la première personne du pluriel, choisie pour incarner la voix collective des nageurs. Tel un chœur antique, ce « nous » faisait déjà la force de son deuxième roman, Certaines n’avaient jamais vu la mer (Phébus, prix Femina étranger 2012), poignant récit sur le destin des « picture brides », ces ­Japonaises « choisies sur photo » envoyées aux Etats-Unis, au début du XXe siècle, pour épouser des inconnus. Il s’ouvre par ces mots : « Sur le bateau, nous étions presque toutes vierges. Nous avions de longs cheveux noirs, de ­larges pieds plats et nous n’étions pas très grandes. » L’autrice explique : « La mélodie rythmique du “nous” me convient mieux. Elle permet de raconter une histoire plus vaste que celle d’un seul personnage. » Chaque détail concernant ces femmes déracinées est tiré des recherches étendues qu’elle a menées sur le sujet.

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