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« L’ADN ancien ouvre une fenêtre sur l’archipel du monde ashkénaze »

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Par Nathaniel Herzberg

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EntretienPour les professeurs de génétique des populations David Reich et Shai Carmi, l’analyse des squelettes retrouvés dans un cimetière médiéval, à Erfurt, en Allemagne, apporte des résultats inédits sur l’origine de la communauté juive ashkénaze. Entretien croisé.

Professeurs de génétique des populations, David Reich (Harvard) et Shai Carmi (Université hébraïque de Jérusalem) ont publié, mercredi 30 novembre, dans la revue Cell, l’analyse de squelettes retrouvés dans un cimetière juif médiéval, à Erfurt, en Thuringe (Allemagne). Elle apporte des résultats inédits sur l’origine de la communauté juive ashkénaze et témoigne des apports de l’ADN ancien pour retracer l’histoire des populations.

Votre étude plonge dans le passé de la communauté ashkénaze. Le mot est familier mais de qui parle-t-on ?

Shai Carmi, en décembre 2015.
Shai Carmi, en décembre 2015.

Shai Carmi On parle d’un groupe constitué aujourd’hui d’environ 10 millions d’individus, vivant essentiellement en Israël et aux Etats-Unis, mais également en Europe et en Amérique du Sud. Il y a cent cinquante ans, cette population était exclusivement européenne. Mais l’immigration et l’extermination de 6 millions de juifs par les nazis en ont largement réduit l’importance. Selon les travaux des historiens, il s’agit d’une population relativement récente, puisqu’elle serait apparue au Xsiècle, en Rhénanie.

Depuis quand la génétique s’y intéresse-t-elle et qu’a-t-elle apporté ?

David Reich, en février 2021.
David Reich, en février 2021.

David Reich Cela a commencé dans les années 1980. On savait depuis longtemps que les juifs ashkénazes souffraient plus que d’autres de certaines pathologies héréditaires rares. Les chercheurs ont identifié les gènes à l’origine de la plupart de ces maladies. L’apport a d’abord été médical. Il a permis la détection embryonnaire de ces pathologies, et finalement leur quasi-éradication. Sur le plan historique, cette surreprésentation a prouvé que cette population provenait, ou était passée par un goulot d’étranglement, autrement dit par un groupe réduit d’individus, sans quoi ces mutations délétères auraient disparu avec le temps. On a aussi constaté que certaines mutations étaient partagées avec d’autres populations juives, et ainsi pu établir que les échanges entre communautés n’étaient pas seulement culturels.

Ces acquis proviennent-ils d’études de l’ADN ancien ?

S.C. Non, presque exclusivement d’analyses de l’ADN actuel. D’abord parce que la technologie de l’ADN ancien est relativement récente. Les développements essentiels pour nos recherches datent d’une dizaine d’années. Ensuite, elle s’est portée en premier lieu sur des sujets plus universels, l’origine de Sapiens, les croisements avec Neandertal, etc. Enfin, l’accès aux restes humains juifs est particulièrement difficile en raison des lois religieuses qui imposent de ne pas déranger les morts.

D.R. C’est vrai dans de nombreux cultes, et particulièrement dans les populations minoritaires. On retrouve les mêmes contraintes aux Etats-Unis avec les Native Americans. Pour les juifs, on a quand même une chance, c’est que différents rabbins peuvent avoir des points de vue différenciés.

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