Les chercheurs l'appellent le peptide sexuel (PS). Il s'agit d'une protéine du liquide séminal trouvée chez les drosophiles mâles qui enclenche chez les femelles un étonnant bouleversement de leur rythme circadien, ainsi que le révèle une nouvelle étude américaine.
Une molécule à tout faire
Le peptide sexuel de la drosophile est transféré à la femelle lors de l'accouplement. Cette protéine agit comme une phéromone, c'est-à-dire une molécule produite par un organisme et qui suscite une réponse chez un autre organisme. Dans le cas de cette molécule, les effets sont nombreux.
"Les réponses médiées par le peptide sexuel comprennent une augmentation de la ponte et une réceptivité réduite aux accouplements supplémentaires, et le PS est nécessaire pour libérer le sperme des organes de stockage, souligne l'étude parue en janvier 2023 dans la revue PNAS. Le PS entraîne une augmentation des niveaux d'hormones juvéniles, des modifications de l'immunité, des altérations du métabolisme de la femelle, de la morphologie et de l'excrétion intestinale, des modifications des niveaux d'activité, un appétit accru, avec une préférence pour les aliments riches en protéines, une agressivité accrue et une mémoire à long terme améliorée". Rien de moins. Et ces effets peuvent durer des jours.
Que fait exactement ce peptide dans l'organisme féminin ? "Bien que l'on sache que le peptide sexuel y parvient (à ces résultats, ndlr), au moins en partie, en modifiant la signalisation neuronale chez les femelles, l'architecture génétique et la dynamique temporelle de la réponse de la femelle au peptide sexuel restaient insaisissables", expliquent les auteurs, une équipe de l'Université de Cornell (Etats-Unis). Leurs travaux ont donc permis de se pencher notamment sur l'aspect génétique de ces changements.
Les chercheurs l'appellent le peptide sexuel (PS). Il s'agit d'une protéine du liquide séminal trouvée chez les drosophiles mâles qui enclenche chez les femelles un étonnant bouleversement de leur rythme circadien, ainsi que le révèle une nouvelle étude américaine.
Une molécule à tout faire
Le peptide sexuel de la drosophile est transféré à la femelle lors de l'accouplement. Cette protéine agit comme une phéromone, c'est-à-dire une molécule produite par un organisme et qui suscite une réponse chez un autre organisme. Dans le cas de cette molécule, les effets sont nombreux.
"Les réponses médiées par le peptide sexuel comprennent une augmentation de la ponte et une réceptivité réduite aux accouplements supplémentaires, et le PS est nécessaire pour libérer le sperme des organes de stockage, souligne l'étude parue en janvier 2023 dans la revue PNAS. Le PS entraîne une augmentation des niveaux d'hormones juvéniles, des modifications de l'immunité, des altérations du métabolisme de la femelle, de la morphologie et de l'excrétion intestinale, des modifications des niveaux d'activité, un appétit accru, avec une préférence pour les aliments riches en protéines, une agressivité accrue et une mémoire à long terme améliorée". Rien de moins. Et ces effets peuvent durer des jours.
Que fait exactement ce peptide dans l'organisme féminin ? "Bien que l'on sache que le peptide sexuel y parvient (à ces résultats, ndlr), au moins en partie, en modifiant la signalisation neuronale chez les femelles, l'architecture génétique et la dynamique temporelle de la réponse de la femelle au peptide sexuel restaient insaisissables", expliquent les auteurs, une équipe de l'Université de Cornell (Etats-Unis). Leurs travaux ont donc permis de se pencher notamment sur l'aspect génétique de ces changements.
10 moments étudiés
Pour mieux comprendre les changements génétiques déclenchés par l'accouplement, et plus précisément le peptide, les chercheurs ont étudié des transcriptomes, soit l'ensemble des ARN (molécules qui permettent la synthèse des protéines à partir du programme génétique délivré par l'ADN) à différents moments de la journée après la rencontre entre la femelle et le mâle. Les femelles drosophiles utilisées ont été séparées en trois groupes : certaines ne se sont pas accouplées, d'autres l'ont fait avec un mâle normal et les dernières se sont accouplées avec des mâles ne produisant pas de peptide sexuel (des mutants).
Ensuite les femelles ont été décapitées, les unes après les autres, à dix moments différents de la journée durant les 24 heures qui ont suivi l'accouplement. Ce sont les tissus de ces têtes qui ont servi à étudier les changements d'expression des gènes, le peptide sexuel ayant un effet indéniable sur le cerveau de ces insectes.
Une modification du rythme circadien
A l'aide de ce protocole, les chercheurs ont repéré un changement dans l'expression de plus de 1000 gènes dévoilant ainsi comment le peptide sexuel modifie l'activité génétique des femelles.
"Notre étude nous en dit long sur le moment où le peptide sexuel modifie l'expression des gènes féminins, mais nous devons faire plus d'expériences pour savoir exactement comment le peptide sexuel le fait", préviennent d'emblée Sofie Delbare, Andy Clark et Mariana Wolfner, trois des auteurs de l'étude, dans une réponse par email adressée à Sciences et Avenir. Ainsi, ces travaux démontrent clairement que durant les quatre premières heures qui suivent l'accouplement, l'expression génique change chez toutes les femelles qui ont rencontré un mâle, mutant ou non.
La différence survient cinq heures après l'accouplement : les changements d'expression des gènes sont seulement maintenus chez les femelles ayant reçu le peptide sexuel. Celles qui n'en ont pas reçu finissent par avoir un profil d'expression identique à celui des femelles qui ne se sont pas reproduites. "Cela nous indique que les effets du peptide sexuel sont assez lents à s'établir (ils mettent 4 à 5 heures pour devenir visibles). Cela nous indique également qu'un autre composant du mâle initie des changements chez les femelles dès le début (il pourrait s'agir d'une autre protéine du liquide séminal ou de phéromones), et que le peptide sexuel est nécessaire pour maintenir ces changements d'expression génique à long terme", précisent les trois chercheurs.
Et ces résultats sont très clairs pour plusieurs gènes situés dans la tête des femelles, qui répondent au PS et qui sont connus pour être des régulateurs de l'horloge circadienne, ce processus biologique qui donne un rythme quotidien à l'organisme. Car comme nous, ces insectes aiment manger ou se reposer à certains moments de la journée. Et c'est l'horloge circadienne qui pilote ces préférences.
Chez les femelles qui ne se sont pas accouplées, l'expression de ces gènes suit toujours une périodicité de 24 heures. Pas chez celles qui ont reçu le peptide d'un mâle. "Parmi ces gènes aux profils d'expression altérés, on retrouve ceux qui sont impliqués dans les comportements de sommeil, d'alimentation et d'accouplement", expliquent les chercheurs à Sciences et Avenir.
Le peptide sexuel des drosophiles mâles arriverait donc à déclencher de tels changements comportementaux et physiologiques en altérant le rythme circadien des femelles, déréglant les comportements malgré l'alternance du jour et de la nuit. "C'est un peu comme induire une sorte de jet lag pour affecter ses habitudes de sommeil et d'alimentation", illustrent les auteurs de l'étude.
D'autres études nécessaires pour mieux comprendre le mécanisme sous-jacent
"Nous avons une hypothèse sur la façon dont le peptide sexuel initie ces changements, mais nous n'avons jusqu'à présent pas fait d'expériences pour la tester", reconnaissent les chercheurs. Ce que les scientifiques savent, c'est que la majorité des réponses induites par le peptide sexuel sont dues à sa liaison avec un récepteur que l'on trouve dans un sous-ensemble de neurones du système nerveux de la femelle. Cette liaison modifie la signalisation neuronale induisant les changements comportementaux et physiologiques. Mais les scientifiques ont encore du mal à remettre les étapes dans l'ordre entre le bouleversement génétique et celui neuronal.
"Nous pensons qu'il est probable que les changements d'expression génique dans notre ensemble de données se produisent après l'effet du peptide sexuel sur la signalisation neuronale, expliquent les chercheurs. Cela pourrait également expliquer pourquoi les changements d'expression génique induits par le peptide sexuel dans la tête de la femelle sont 'lents' à s'établir : puisqu'il s'agit d'une protéine du liquide séminal, le peptide sexuel est présent dans l'appareil reproducteur féminin et doit se lier à son récepteur, puis modifier la signalisation neuronale jusque dans le cerveau féminin, avant qu'il ne puisse modifier l'expression des gènes dans la tête". De prochaines études pourraient démentir ou confirmer cette hypothèse.