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L'extrême droite de Twitter peut remercier Elon Musk

Temps de lecture: 5 min

«Venez comme vous êtes.» C'est peu ou prou le message envoyé par Twitter ces derniers jours en réintégrant de nombreuses personnalités d'extrême droite. Banni fin 2021, Renaud Camus a pu réintégrer la plateforme le 25 janvier et il ne s'est pas privé de rattraper le temps perdu en tweetant de manière compulsive, relayant au passage ses vieilles publications. «Un charter qui décolle c'est une prison qui ferme», a-t-il ainsi retweeté, comme pour tester la nouvelle politique de modération de la plateforme rachetée par Elon Musk.

Le retour de l'homme qui a mis le «grand remplacement» sur toutes les lèvres à l'extrême droite a immédiatement été salué par Gilbert Collard, un temps cadre du Rassemblement national avant de passer à Reconquête, et par Damien Rieu, ancien porte-parole de Génération identitaire rallié à Éric Zemmour.

Twitter ne s'est pas arrêté en si bon chemin. Par un tir groupé, la plateforme a également mis fin à la suspension de Jean Messiha, lui aussi banni en 2021. «L'oiseau est libre! Jean Messiha est de retour! Merci beaucoup Elon Musk!», s'est empressé de commenter l'ex-soutien du RN et de Reconquête.

Le compte «Alain Soral» de la messagerie Telegram revendique également la réouverture du compte de l'essayiste antisémite. Petite subtilité: son compte n'est toujours pas accessible depuis la France (une contrainte pas bien compliquée à contourner avec un VPN).

Modération à la sauce Musk

Quelques semaines après avoir officiellement racheté Twitter fin octobre, Elon Musk ouvrait les hostilités en tweetant: «Le peuple a parlé. L'amnistie commence la semaine prochaine. Vox Populi, Vox Dei.» Le patron de Tesla a le beau rôle et il se l'est lui-même attribué. Avec cette annonce, il jure respecter les résultats d'un sondage publié sur son compte à propos d'une «amnistie générale» des comptes suspendus.

The people have spoken.

Amnesty begins next week.

Vox Populi, Vox Dei.

— Elon Musk (@elonmusk) November 24, 2022

Du côté de l'extrême droite, le message est reçu cinq sur cinq. Contrairement à Donald Trump qui n'a encore réinvesti sa plateforme préférée, l'antisémite et négationniste Hervé Ryssen, condamné à plusieurs reprises, n'a pas attendu bien longtemps avant de tweeter à nouveau.

D'autres, comme Pierre-Nicolas Nups, responsable Lorraine du Parti de la France condamné pour incitation à la violence et à la haine homophobe en 2018, ont même pu revenir sur la plateforme avant le sondage. Comme Hervé Ryssen, ce cadre d'un mouvement proche de Reconquête ne se prive pas d'user à l'excès de la «liberté» mise en avant par Elon Musk. Sous un tweet expliquant que «le premier amour d'Hitler était Juif», il répond qu'«elle lui a brisé le cœur, donc il lui a niqué sa race». Des propos qui, six jours après avoir été publiés, sont toujours en ligne.

Elle lui a brisé le cœur, donc il lui a niqué sa race.

— Pierre-Nicolas NUPS (@pnnups) January 24, 2023

Cette résurgence des composantes les plus radicales de l'extrême droite sur Twitter était si prévisible… qu'elle l'a elle-même vue venir. Dès les premières rumeurs sur le rachat de Twitter par le patron de Tesla, Mathieu Goyer, jeune responsable Civitas Paris, s'amusait à prédire le futur de la plateforme avec jubilation: «Nous allons peut-être pouvoir voir le retour sur Twitter des comptes de Donald Trump, Rivarol, Alain Soral, Égalité & Réconciliation, Hervé Ryssen, Thaïs d'Escufon… et tant d'autres. Le rachat de Twitter annonce vraiment une grande bonne nouvelle

Force est de constater que la prédiction s'est révélée juste: une grosse partie de ces personnalités a déjà retrouvé une place sur le réseau social. Elon Musk, l'extrême droite lui dit merci.

«Un Twitter enfin libre!»

Elon Musk s'époumone à force de le répéter: son rachat de Twitter s'accompagnera d'une plus grande liberté d'expression. Cette communication a très vite séduit l'extrême droite française qui, à l'image de Mathieu Goyer de Civitas, voit le milliardaire comme un allié de circonstance lui permettant de tenir tous types de propos. Mais que gagne le patron de Tesla dans cette affaire? Le rachat de Twitter n'a pour le moment rien du bon plan côté financier. Il permet à Elon Musk, tout au plus, de renforcer son image de libertarien et de se mettre dans la poche les militants les plus dissidents de son réseau social. Une façon peut-être également de tenter de le redynamiser en le polarisant.

Quelle que soit la manière dont Elon Musk en tire parti, cette nouvelle politique de modération ne profite pas seulement à l'extrême droite française, mais aussi aux sphères pour qui la pandémie n'est que conspiration. Opposé aux restrictions sanitaires et grand pourfendeur du «Great Reset», l'ufologue Silvano Trotta a, lui aussi, bénéficié de l'«amnistie générale». Loin de Twitter, il avait réuni avec succès une nouvelle communauté sur la messagerie Telegram. Il n'a pourtant pas boudé la possibilité de retrouver ses 90.000 abonnés sur le réseau social à l'oiseau bleu, tweetant mi-décembre:

Je disais que cette soirée n'allait pas être tranquille pour certains, vu les derniers Tweets d'@elonmusk . Et Oh surprise, mon compte est réactivé. D'habitude je ne reviens jamais, mais là, la situation est assez exceptionnelle avec un Twitter enfin libre ! Bonsoir les Amis.

— SILVANO TROTTA OFFICIEL (@silvano_trotta) December 16, 2022

Tout le monde ne se montre pas aussi satisfait que Silvano Trotta. Quelques déçus constatent qu'il existe toujours une modération sur le réseau social, aussi infime soit-elle. Thomas Joly, président du Parti de la France, en a fait les frais à la mi-décembre. «La liberté d'expression sur Twitter version Elon Musk atteint très vite ses limites», s'est-il indigné, sur Telegram, après la suspension de son compte.

Donald Trump bientôt de retour?

Sans surprise, un mouvement similaire se produit de l'autre côté de l'Atlantique. Banni d'Instagram, de Twitch, de TikTok et de YouTube, le streamer nationaliste blanc Nick Fuentes, pour qui Hitler était «vraiment cool», a vu son compte Twitter débloqué le 24 janvier. Un «Space» sur Twitter et puis s'en va: moins de vingt-quatre heures après avoir été autorisé, son compte a été de nouveau fermé à la suite de propos antisémites. D'autres figures extrémistes américaines comme Ryan Dawson et Andrew Anglin sont, pour le moment, toujours les bienvenues.

À un peu plus d'un an de la présidentielle américaine, c'est peu dire que Donald Trump est très attendu sur Twitter. L'ancien président des États-Unis avait fait du réseau social son arme de communication préférée. Avec la reprise en main de la plateforme par Elon Musk et la politique d'«amnistie générale», le chef de file de l'alt-right est en droit de revenir. Et ce n'est peut-être qu'une question de mois.

Selon le magazine Rolling Stone, le milliardaire attendrait l'expiration en juin prochain de son contrat d'exclusivité avec Truth, le réseau social qu'il avait créé dans la foulée de son bannissement. Après des midterms décevantes pour les Républicains, récupérer 87 millions de twittos aidera-t-il Trump à regagner sa place à la Maison-Blanche?