France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

L’immigration, autre chantier explosif

L’immigration, autre chantier explosif
Les demandes d’asile (137.000) ont augmenté de 31 % en 2022.

Photo AFP

publié le 1 février 2023 à 22h32.

Expulsions, régularisations, asile… Le projet de loi sur l’immigration a été entériné en Conseil des ministres ce mercredi. Il fâche déjà un peu tout le monde. À gauche, à droite et jusque dans la majorité.

C’est un nouveau chantier explosif qui s’ouvre pour le gouvernement, en pleine bataille sur le projet de réforme des retraites. L’exécutif a entériné en Conseil des ministres un projet de loi très controversé sur l’immigration dont l’adoption au Parlement s’annonce très compliquée. « On est certains (..) que nous arriverons à un compromis sans dénaturer le texte, en écoutant évidemment les oppositions, et singulièrement les oppositions de droite », a assuré le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin à l’issue du Conseil des ministres.

Le texte doit être examiné en mars au Sénat, dominé par l’opposition de droite, puis fin mai/début juin à l’Assemblée nationale où l’exécutif ne dispose que d’une majorité relative.

La régularisation dans les métiers en tension est déjà l’objet de marchandages assez insupportables.

Les Républicains (LR), dont le vote est indispensable pour son adoption, sont braqués contre la régularisation des sans-papiers dans les « métiers en tension », où les employeurs peinent à recruter, estimant que cela va créer un « appel d’air » et « ouvrir les vannes ». Le projet « ne permet pas de reprendre le contrôle, la maîtrise de l’immigration », a ainsi estimé le patron des sénateurs Les Républicains Bruno Retailleau, mettant en garde contre « des insurrections dans les urnes très prochainement » si la tendance n’était pas inversée.

Le texte prévoit des mesures pour faciliter les expulsions, surtout des étrangers « délinquants », une réforme du droit d’asile et un volet intégration, notamment l’octroi de titres de séjours pour les sans-papiers employés dans les « métiers en tension ».

Le spectre du 49.3

Destiné à séduire à la fois la droite républicaine, de plus en plus radicale sur le sujet, et la gauche, qui dénonce les conditions d’accueil des étrangers, le texte a fini par fâcher tout le monde… et pourrait nécessiter de déclencher l’arme constitutionnelle du 49.3, qui permet son adoption sans vote.

À l’extrême droite, la présidente du groupe Rassemblement national Marine Le Pen a jugé que le texte n’était pas « au niveau du problème ». La gauche est quant à elle vent debout contre son volet répressif en matière d’expulsions.

La majorité elle-même apparaît divisée, entre tenants de l’aile droite, prêts à durcir encore le projet, et élus issus de la gauche, qui y voient des lignes rouges.

Le texte arrive au lendemain d’un double constat : une hausse de 31 % des demandes d’asile (137.000) en 2022 et de 15 % des expulsions (15.400), celles-ci restant néanmoins inférieures d’un tiers à celles de 2019, avant le Covid-19.

Les associations inquiètes d’un durcissement du texte

« Ce projet de loi marque une nouvelle étape dans le détricotage des droits des personnes exilées », a dénoncé Jean-Claude Samouiller, président d’Amnesty international France. « Plutôt qu’un énième texte de loi », cinq ans après la loi dite « Collomb » de 2018, « le gouvernement se doit de mettre en œuvre des politiques qui organisent l’accueil des personnes exilées sur notre territoire », a-t-il poursuivi.
Le projet de loi, qui prévoit par exemple de « réduire le champ des protections » contre les obligations de quitter le territoire français (OQTF), notamment pour les étrangers arrivés en France avant l’âge de 13 ans, constitue « un changement de trajectoire » et un durcissement, a relevé Claire Rodier, responsable de l’association Gisti, lors d’une conférence du réseau Désinfox migrations mercredi.
Le texte prévoit certes un volet de régularisations pour les travailleurs dans les secteurs en pénurie de main-d’œuvre, mais cette mesure « est déjà l’objet de marchandages assez insupportables et de renoncements programmés », s’est inquiétée. la directrice générale de France terre d’asile, Delphine Rouilleault, sur Franceinfo. La responsable associative faisait référence aux déclarations du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin samedi dans Le Parisien : « Chez les LR, certains défendent l’idée d’instaurer des quotas pour limiter les régularisations. Discutons-en », avait-il dit. « Si on crée des critères de régularisation mais qu’ensuite on crée des quotas, quelque part on crée un paradoxe », estime Delphine Rouilleault.
Vingt et-une organisations et associations, dont l’Unicef, ont par ailleurs appelé mercredi le gouvernement à « interdire définitivement l’enfermement administratif des enfants », alors que le projet de loi prévoit l’interdiction du placement des mineurs de moins de 16 ans en centre de rétention (CRA) à l’horizon 2025.