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La Géorgie et le Kazakhstan entre méfiance et hospitalité face à l’afflux de citoyens russes

Face à une deuxième vague massive de Russes fuyant leur pays après l’annonce par Vladimir Poutine, le 21 septembre, d’une mobilisation partielle de la population masculine, Ambebi.ge s’interroge : “Une immigration ou une expansion en douce ?” Cette vague d’exilés, la deuxième observée en Géorgie après celle de février et mars, “inquiète la société géorgienne”, affirme le journal en ligne géorgien. “Tbilissi parle désormais d’une ‘occupation pacifique’ par la Russie”, constate le journal moscovite Nezavissimaïa Gazeta.

“Ce ne sont pas des touristes [russes, que la Géorgie accueille par centaines de milliers chaque année], mais des déserteurs, et si on laisse entrer tous ceux qui fuient la guerre, il ne restera plus de place pour les Géorgiens”, fulmine le leader du mouvement proeuropéen Citoyens, Levan Iosseliani, cité par le site géorgien InterPressNews.

“Une annexion sans les tanks”

Ces citoyens russes, dont le nombre total en Géorgie approche, selon des estimations locales, 200 000 personnes (pour environ 3,7 millions d’habitants dans le pays), “peuvent apporter des avantages économiques certains, car ils amènent des capitaux [en ouvrant des entreprises et en rachetant massivement des biens immobiliers]”, souligne le quotidien de Tbilissi Resonance Daily. Mais le journal y entrevoit aussi une source de “tensions politiques” potentielles en Géorgie.

“Cette entrée massive de Russes a tout l’air d’une annexion de la Russie sans les tanks”, a déclaré à InterPressNews Guiorgui Vachadzé, dirigeant du mouvement politique d’opposition Stratégie Agmachenebeli. Il est inquiet : selon lui, la part des immigrés russes dans la population totale de la Géorgie a “quasiment atteint 10 %, ce qui signifie qu’ils auront une très forte influence en Géorgie.” Vachadzé n’y va pas par quatre chemins :

“La Géorgie doit fermer sa frontière [aux Russes]. Qu’ils se cachent en Yakoutie ou en Sibérie [régions de la Fédération de Russie] !”

“Le nombre de Russes entrant en Géorgie [notamment par la frontière terrestre] est de 10 000 personnes par jour”, a déclaré le 27 septembre le ministre de l’Intérieur géorgien, Vakhtang Gomelaouri, cité par le site News Georgia. Une accumulation importante de véhicules privés (3 500 au total) “faisant la queue pour franchir le poste de contrôle [à la frontière russo-géorgienne] de Verkhni Lars”, est rapportée par le site russe Vzgliad. Mais les autorités russes semblent avoir trouvé une parade : “Un bureau de recrutement militaire sera ouvert dans les prochains jours à Verkhni Lars.”

À vélo ou à trottinette

Pour contourner la loi géorgienne, qui interdit de traverser la frontière à pied, les déserteurs arrivent “qui à vélo qui à trottinette”, indique Nezavissimaïa Gazeta. “La Géorgie craint que ce processus migratoire n’échappe à tout contrôle”, note le journal russe.

Nona Mamoulachivli, la députée du Mouvement national uni (parti de l’ex-président Saakachvili, en opposition) annonçait le 25 septembre “l’interdiction d’entrer en Géorgie aux hommes russes de 18 à 55 ans dès le lendemain”.

Annonce précipitée : Irakli Kobakhidzé, président de Rêve géorgien, au pouvoir depuis 2012, a affirmé qu’“il n’y avait aucune menace sur la sécurité nationale de la Géorgie” et que “tout [était] sous contrôle”, relaie InterPressNews. Une des raisons “de la non-fermeture de la frontière russo-géorgienne est que des Géorgiens [près de 1 million] habitent en Russie et certains veulent aussi rentrer au pays”, a précisé Kobakhidzé.

La tradition de l’hospitalité

Le Kazakhstan, voisin centrasiatique de la Russie, est aux prises avec une vague migratoire similaire : “Près de 100 000 Russes ont traversé la frontière depuis le 21 septembre”, a annoncé Aslan Atalykov, haut fonctionnaire au ministère de l’Intérieur kazakh, dont les propos sont relayés par le journal russe Izvestia. En même temps, plus de 64 000 de ces immigrés “ont déjà quitté le territoire du pays”, utilisant ainsi le Kazakhstan seulement comme un pays de transit. Ce flux s’ajoute à la première vague, en février, qui selon le journal russe RBC se chiffre à “près de 1,5 million de personnes”.

Bien que certains exigent de fermer la frontière kazakhe aux Russes, “la majorité des Kazakhstanais comprennent l’importance du soutien à ces gens, car l’hospitalité fait partie de la culture et de l’éducation des Kazakhs”, indique le site kazakh Informburo.

“Ces derniers jours, nous accueillons beaucoup de gens de Russie, dont la plupart sont obligés de partir en raison d’une situation sans issue. Nous devons prendre soin d’eux et garantir leur sécurité. C’est une question politique et humanitaire”, a déclaré le président du Kazakhstan Kassym-Jomart Tokaev, tout en précisant que ces Russes “n’auront pas de privilèges” et que dans son pays “il n’y a ni crise ni panique”, rapporte Vzgliad. Tokaev a toutefois annoncé des “négociations” avec Moscou, pour “résoudre ce problème [migratoire] dans les intérêts du Kazakhstan”.