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La Juventus Turin perd son conseil d’administration et voit l’avenir plus noir que blanc

On ne verra plus la tignasse blonde de Pavel Nedved s’agiter en tribune. L’ancienne gloire tchèque du club italien de la Juventus de Turin, devenu depuis 2015 son vice-président, a présenté sa démission lundi. Tout comme la totalité des membres du conseil d’administration, y compris son président Andrea Agnelli, depuis douze ans à la tête de l’institution. L’information a été confirmée par le club du Piémont par communiqué, lundi soir.

Le directeur général de la Juve, Maurizio Arrivabene, a été chargé de rester en place. Il expédiera les affaires courantes le temps qu’un nouveau conseil soit constitué, a précisé la Juventus, qui assure que le club «continuera à collaborer et à coopérer avec les autorités de surveillance et du secteur». L’homme d’affaires Guianluca Ferrero, par ailleurs expert comptable, a été recommandé comme nouveau président de la Juventus Turin, a annoncé ce mardi l’actionnaire principal du club italien, le fonds d’investissement Exor, propriété de toujours de la famille Agnelli, qui détient 64 % du club. La prochaine assemblée générale se tiendra le 18 janvier.

Lundi soir, le journal italien La Gazetta dello Sport a publié la lettre écrite par le désormais ex-président Andrea Agnelli, adressée à la «planète Juventus». Loin d’expliquer les raisons de son départ, il affirme néanmoins vouloir continuer «à imaginer et à travailler pour un football meilleur», avant de citer Friedrich Nietzsche. «Et ceux que l’on voyait danser étaient considérés comme fous par ceux qui ne pouvaient pas entendre la musique», écrit celui qui était à la tête du club depuis juillet 2010, cinquante ans après son père Giovanni, l’historique dirigeant de la Fiat. Sous sa direction, la Juventus est redevenue un gros d’Italie et a remporté le Scudetto 9 fois de suite, de 2012 à 2020.

Dans son communiqué, le club bianconero rappelle plus sobrement que le conseil a «estimé qu’il était dans le meilleur intérêt social» de démissionner, en «considérant la centralité et la pertinence des questions juridiques et technico-comptables en suspens», précise le communiqué du club. Une allusion directe à l’enquête que mène la justice italienne.

155 millions d’euros de plus-values «fictives»

Car depuis plus d’un an, le parquet de Turin s’intéresse à la pratique des «faux échanges» de joueurs que la Juventus a pratiqués à plusieurs reprises. On parle de ventes croisées avec d’autres clubs, sans échange d’argent mais permettant tout de même d’inscrire des plus-values dans les bilans. Selon les médias italiens, ces plus-values «fictives» sont chiffrées à quelque 155 millions d’euros entre 2018 et 2021 par les magistrats. Coté en Bourse, le club aurait également dissimulé à ses investisseurs l’existence d’accords privés conclus avec des joueurs. Notamment avec l’attaquant portugais Cristiano Ronaldo, passé par la Vieille Dame entre 2018 et 2021.

La Juventus compte néanmoins se défendre. Le club a estimé lundi avoir «de nouveau examiné les objections du ministère public» du tribunal de Turin, et décidé «d’adopter des méthodologies comptables alternatives légitimes» concernant les compléments de salaire. «Ces révisions des estimations et des embauches entraînent donc des ajustements des estimations de charges imputables» entre 2020 et 2022, dont les effets sont «sensiblement nuls sur les flux de trésorerie et la dette financière nette, tant pour les exercices précédents que pour l’exercice clos et les années à venir», pointe le club.

A ces déboires judiciaires s’ajoutent des problèmes financiers. Depuis cinq saisons, le club du nord du pays est dans le rouge. Eliminée dès les phases de poule de la Ligue des champions en novembre dernier, cette sortie prématurée va engendrer un manque à gagner de quelque 20 millions d’euros cette année, souligne le site italien Calcio e Finanza. La saison dernière, la structure avait enregistré un déficit record dans le football italien de 255 millions d’euros. La démission surprise du conseil d’administration n’arrange rien. Mardi, le titre du club de football Juventus Turin a chuté de près de 5 % à la Bourse de Milan. Les rêves de grandeur d’Agnelli autour d’une Super Ligue, projet de compétition européenne privée dévoilé en avril 2021 et torpillé de toute part, semblent bien loin.

Pour de nombreux observateurs, les déboires actuels de la Juve rappellent le scandale de corruption du Calciopoli survenu peu avant la Coupe du monde en Allemagne, en 2006. Condamnée dans cette vaste affaire d’achats d’arbitres et reléguée en seconde division, la Juventus de Turin avait alors été dépossédée de ses deux derniers titres et de ses stars telles que Patrick Vieira, Gianluca Zambrotta ou encore Fabio Cannavaro, partis vers d’autres horizons. Avant qu’un Didier Deschamps n’arrive pour coacher l’équipe la plus titrée d’Italie et revenir l’année suivante dans l’élite.