C’est un chef-d’œuvre de l’art impressionniste. Classée «trésor national», et estimée à 43 millions d’euros, La Partie de bateau, peinte en 1878 par Gustave Caillebotte, vient d’intégrer ce lundi le musée d’Orsay, qui organisera en 2024 une exposition dédiée au peintre impressionniste, encore peu représenté dans les collections publiques françaises.
Parfois nommée Le Canotier au haut-de-forme, cette huile sur toile figure un jeune homme élégamment vêtu, installé au fond d’un frêle canot de bois clair. Le regard perdu au loin sous son chapeau noir, il rame paisiblement sur l’onde calme d’une rivière, dont la couleur olive se mêle aux reflets sylvestres des arbustes qui bordent la grève.
Or, pour la première fois, le tableau acquis grâce au mécénat du groupe de luxe LVMH sera également exposé dans plusieurs musées français, dans le cadre d’une célébration nationale autour des 150 ans de l’impressionnisme prévue en 2024. A cette occasion, des prêts exceptionnels à une vingtaine de musées permettront de valoriser les chefs-d’œuvre de ce mouvement, et une grande exposition Caillebotte viendra clore la manifestation à Orsay à l’automne 2024.
Succès de l’impressionnisme
«Né en France, l’impressionnisme a conquis le monde et a rencontré un immense succès populaire, qui ne cesse de se confirmer. Grâce au mécénat exclusif de LVMH, je me réjouis que ce chef-d’œuvre vienne enrichir le patrimoine de la Nation et puisse être présenté dans plusieurs villes de France», livre la ministre de la Culture Rima Abdul Malak. «C’est la première fois qu’une telle itinérance sera organisée pour un trésor national», souligne-t-elle encore.
De son côté, Jean-Paul Claverie, conseiller de Bernard Arnault, PDG de LVMH, s’est réjoui que «l’un des derniers chefs-d’œuvre de l’impressionnisme encore en mains privées», reste en France, et vienne enrichir les collections du Musée d’Orsay.
L’œuvre avait été classée «trésor national» en janvier 2020. Ce statut, accordé aux biens culturels ayant une importance majeure pour le patrimoine national - que ce soit du point de vue de l’histoire, de l’art ou de l’archéologie - justifie notamment une protection particulière en matière d’exportation.
Un peintre longtemps mal considéré
Célèbre pour ses vues de Paris, ami de Renoir et de Monet, Gustave Caillebotte (1848-1894), issu d’un milieu fortuné, a pu s’adonner sans souci d’argent à la peinture et aider ses amis. Mort à 45 ans, l’artiste a laissé quelque 500 œuvres personnelles, dont un certain nombre appartiennent à des privés, et une collection de Renoir, Monet, Manet et autre Cézanne, dont il a fait don à l’Etat français.
Les collections nationales françaises ne comptaient à ce jour que quatorze œuvres de Gustave Caillebotte. Avec Berthe Morisot et Mary Cassatt, il reste l’un des artistes impressionnistes les moins bien représentés au sein des collections publiques. A titre d’exemple, le Musée d’Orsay possède onze peintures de Caillebotte, mais 33 de Manet, 39 de Degas, 45 de Pissarro, 82 de Renoir et 88 de Monet.
La figure de Caillebotte collectionneur et donateur a longtemps masqué l’importance de son œuvre de peintre, progressivement oubliée à partir de la fin du XIXe siècle et reconnue seulement par l’histoire de l’art au cours de la seconde moitié du XXe siècle. Une autre de ses œuvres classée trésor national, Jeune homme à sa fenêtre, a été achetée en novembre 2021 pour 53 millions de dollars par le musée Getty de Los Angeles, pulvérisant le record pour des enchères du peintre français de plus en plus coté.
