France
This article was added by the user . TheWorldNews is not responsible for the content of the platform.

Le dépistage des cancers, enjeux d’une recherche multidisciplinaire

Comment bien se soigner, bien vivre, bien vieillir ? Rendez-vous à Caen, les 9 et 10 décembre au MoHo avec le LibéCare pour débattre avec médecins, intellectuels et experts. En attendant l’événement, réalisé en partenariat avec la région Normandie, la MGEN et l’ADMD, Libération publiera dans un espace dédié articles, tribunes et témoignages.

L’intérêt du dépistage pour les individus et pour la société repose à la fois sur la puissance des innovations technologiques et la pertinence de son organisation dans la société pour assurer son efficacité, son efficience et son équité. Si au départ, le principe du dépistage semble simple («il vaut mieux prévenir que guérir»), l’évolution des connaissances, en particulier sur les effets délétères potentiels du dépistage des cancers, a profondément complexifié la problématique, en particulier, la mise en évidence du risque de détecter de très petits cancers d’évolution très lente qui n’auraient jamais eu d’impact sur la vie (surdiagnostic) et dont la découverte est finalement nuisible à la personne.

Ces progrès ont imposé la prise en considération de la balance bénéfice potentiel-effets délétères dans l’appréciation de la pertinence du dépistage d’un cancer. Comme dans le domaine du soin, les pratiques de dépistage doivent se fonder sur des arguments scientifiques du plus haut niveau de preuve possible pour assurer un meilleur service rendu aux individus et à la population.

Chronique «Aux petits soins»

L’enjeu est ici pour les experts et pour les médecins comme pour les individus concernés de pouvoir apprécier justement la balance bénéfice-risques à la fois au niveau individuel comme au niveau collectif. Pour répondre à la fois aux textes fondateurs de notre société et à la déontologie médicale, l’équité de l’accès au dépistage est un enjeu fondamental. Il s’agit ici pour les chercheurs de déconstruire les mécanismes de ces inégalités et d’identifier les clés propres à les réduire. En la matière, on sait que s’il n’existe pas en amont dans l’organisation du dépistage des dispositifs pensés et testés scientifiquement pour réduire les inégalités sociales, en fonction en particulier du principe d’universalisme proportionné, alors l’organisation du dépistage dans la population générale risque bien en fait d’aggraver ces inégalités sociales de santé.

Enfin, pour le développement d’une démocratie sanitaire souhaité par tous, le rôle du médecin n’est plus de décider, en fonction de ses propres convictions, pour une personne s’il doit pratiquer ou non le dépistage, mais d’apporter à cette personne, de la manière la plus didactique et loyale, les informations qui lui permettront de prendre sa décision en fonction de ses propres préférences. Cette tâche n’est pas aisée, particulièrement en l’absence de certitude scientifique, et le rôle des chercheurs et des autorités sanitaires est ici d’inventer les outils qui aideront les médecins à développer cette décision partagée.

Ainsi, les progrès en matière de dépistage des cancers convoquent de très nombreuses disciplines scientifiques et médicales, allant de la biologie et de l’imagerie à l’épidémiologie et aux sciences humaines et sociales. C’est bien tout l’enjeu du développement d’une recherche multidisciplinaire qui permette de rendre plus efficace et équitable l’organisation du dépistage utile des cancers, mais aussi de protéger la population des dépistages délétères. Il s’agit enfin de développer une éthique du dépistage répondant à deux exigences, celle liée au respect des critères de qualité de la décision publique et celle du respect de la liberté de la personne, et de sa décision, quels qu’en soient les fondements.