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Le maire de Lyon annule une conférence avec Salah Hamouri après une vive controverse

Une invitation controversée. Le maire écologiste de Lyon, Grégory Doucet, a annulé lundi une table ronde en présence de l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri, pour «assurer la concorde» dans sa ville face aux «tensions très fortes» suscitées par cet événement. «Je le fais dans mon rôle de maire qui doit assurer la paix civile et la concorde dans la ville», a-t-il dit au cours d’un point de presse, en soulignant qu’il regrettait de ne pouvoir «garantir sereinement la liberté d’expression» dans un contexte marqué ces derniers jours par une flambée de violences entre Israéliens et Palestiniens. Dans son entourage, on explique à Libération que «c’est allé trop loin, le rôle du maire en tant qu’élu de la République, c’est d’assurer la liberté d’expression mais aussi d’assurer la sécurité des Lyonnais et de chercher la concorde».

Dimanche, une de ses adjointes, Florence Delaunay, a dû quitter précipitamment une cérémonie dédiée au souvenir de la libération du camp d’Auschwitz après avoir été huée par le public, a constaté un correspondant de l’AFP. «Il y a eu violence verbale très forte, une forme d’intimidation […] et je dois tout faire pour que la violence subie là-bas ne soit pas importée ici», à Lyon, a souligné Grégory Doucet lundi. L’incident de dimanche, abondamment relayé et commenté sur les réseaux sociaux locaux a marqué le point culminant des critiques virulentes suscitées par l’organisation de cette conférence prévue mercredi en présence de Salah Hamouri. Mais sans la participation d’un contradicteur Israélien.

Du fait des «risques de troubles à l’ordre public», la préfecture du Rhône adressait au même moment une mise en demeure à la mairie en lui demandant d’annuler la conférence intitulée «Trente ans après la signature des Accords d’Oslo, regards sur la Palestine».

Dans l’entourage du maire écologiste, on admet que le sujet est sensible, mais «ça nous semblait important de permettre le dialogue, cette instrumentalisation a attristé, touché Grégory Doucet», explique-t-on. La personnalité de Salah Hamouri est certes contestée, mais «cette personne a été soutenue par le Président, par le ministre des affaires étrangères, c’est la position diplomatique qui prime, on s’y réfère», souligne-t-on.

Salah Hamouri est une personnalité contestée : il est soupçonné par Israël de liens avec le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), une organisation jugée terroriste par l’Etat hébreu et l’Union européenne. L’avocat de 37 ans a toujours nié ces liens, même s’il a plaidé coupable devant un tribunal militaire israélien pour tenter d’obtenir une peine moins longue. Depuis son expulsion d’Israël en décembre 2022, Salah Hamouri vit en France. L’expulsion est jugée «contraire au droit» par Paris et condamnée par l’ONU qui l’a qualifiée de «crime de guerre».

Son invitation à Lyon, tout comme l’intitulé de la table ronde, a été perçue comme une «provocation» par plusieurs acteurs locaux, à commencer par le grand rabbin de Lyon Daniel Dahan qui, pour protester, a démissionné vendredi d’une instance interconfessionnelle créée en 2002 par la mairie de Lyon pour promouvoir le «bien vivre ensemble». L’Organisation juive européenne (OJE), qui lutte contre l’antisémitisme, a de son côté saisi le tribunal administratif de Lyon pour faire suspendre la conférence, au nom de «la neutralité du service public». Sa demande a été rejetée lundi matin par le juge des référés.

Le CRIF, Conseil représentatif des institutions juives de France, qui avait prévu une conférence de presse lundi après-midi sur «les répercussions et dangers consécutifs au maintien de la conférence organisée par la mairie de Lyon» a fait savoir par voie de communiqué que la mobilisation «n’avait plus lieu d’être» du fait de la décision du maire.

De leur côté, les soutiens de Salah Hamouri ont dénoncé par communiqué les «intimidations […], le harcèlement et la diffamation des censeurs» qui «veulent le condamner au silence». La semaine dernière encore, Grégory Doucet défendait dans les colonnes du Progrès sa décision d’inviter l’avocat franco-palestinien pour ce «focus sur le territoire palestinien». «C’est un citoyen français qui a le droit de s’exprimer», a-t-il souligné lundi, rappelant que lui-même était «aligné sur la position de la France sur une solution à deux Etats», également soutenue par les Nations Unies. Il a aussi annoncé qu’il ne renonçait pas au «projet de décrire, avec toutes les bonnes volontés et les personnes respectueuses du cadre démocratique, la situation réelle en Israël et en Palestine» et prévoyait «de prochaines rencontres grand public sur cette thématique», dans une lettre adressée lundi à différentes associations. «C’est tout l’esprit de notre démarche, aussi bien pour aborder des enjeux géopolitiques complexes que des situations locales épineuses : être respectueux des valeurs républicaines […], veiller à maintenir la concorde, et, jamais, ne se taire devant des injustices ou des contre-vérités», dit ce courrier.