France
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« Le Marais poitevin n’est pas qu’une carte postale »

Julien, le marais et la libellule, France 3, 23 h 15

Julien est batelier. Pigouilleur comme on dit dans le Marais poitevin. Il promène les touristes dans la « Venise verte », à la découverte de paysages de carte postale. Sauf que… « quand ils découvrent le paradis, pour moi c’est un paradis perdu… » Le paysage pour lequel ses passagers s’extasient est en train de disparaître. Et cela, Julien n’en veut pas.

Fabien Mazzocco n’a pas signé un documentaire touristique. On y voit certes de belles images, comme un témoignage de ce qui aura été si la situation n’évolue pas. Car ce marais est un milieu fragile : outil « de drainage », dans lequel passent les eaux du bassin-versant avant de se déverser dans l’Atlantique, il est tributaire du flux en amont. C’est là que le bât blesse, car il est entouré de plaines (créées par l’assèchement de l’ancien marais) où l’on pratique l’agriculture intensive. Pollution par les pesticides, le pétrole, mais surtout assèchement par des prélèvements hydrauliques massifs le menacent.

un projet de « bassines » pour les gros céréaliers

C’est ici que le projet de réservoirs d’eau censés prémunir la région contre la sécheresse, communément appelés « bassines », a vu le jour. Une quarantaine d’entre eux est déjà en service. « On a affaire à des fous », râle un opposant. « L’État ne respecte pas la loi sur l’eau », s’emporte-t-il. « On n’a plus d’eau mais l’irrigation est toujours autorisée », complète un autre. On l’aura compris, les appétits des gros céréaliers environnants, essentiellement producteurs de maïs, sont particulièrement visés par ces commentaires. Mais, dans tout projet d’aménagement, « il faut prendre en considération l’ensemble des vivants, pas seulement les humains », affirme Julien. Le batelier rappelle d’ailleurs que le Marais poitevin n’a rien d’une jungle : c’est « une construction humaine très organisée (…), un paysage hype­r­artificiel ». Et si là était (une partie de) la solution ? Un aménagement du territoire, certes artificiel, qui permette à la nature de se développer sans nuire aux activités humaines ?

Certes, le film de Fabien Mazzocco sera taxé de militant. Mais vu la façon de plus en plus aiguë dont les problèmes environnementaux se posent, notamment par la captation par les industries agricoles des ressources naturelles (et des subventions publiques), n’est-il pas logique que ce type d’expression se multiplie ? Jusqu’à faire suffisamment réfléchir les décideurs ? Rien d’impossible : « On est vraiment une chouette espèce, pense tout de même Julien. Ensemble, on peut construire des choses formidables. »