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Le "marchand de mort" Viktor Bout, un russe libre grâce à Moscou

Jeudi, au terme d'intenses tractations, les États-Unis ont accepté de remettre à Moscou le Russe Viktor Bout, âgé de 55 ans, arrêté en 2008 lors d'une opération américaine en Thaïlande, en échange de la basketteuse Brittney Griner, détenue en Russie depuis des mois pour une affaire de cannabis. Portrait.

Son histoire aurait inspiré le personnage interprété par Nicolas Cage dans le film "Lord of War". Viktor Bout, ancien pilote de l'armée soviétique emprisonné depuis dix ans aux États-Unis, a été libéré le 8 décembre dans le cadre d’un échange de prisonniers avec la star américaine du basket Brittney Griner, détenue en Russie depuis neuf mois.

Condamné en 2012 à 25 ans de prison, ce moustachu charismatique faisait l'objet de négociations depuis des années entre Moscou et Washington. Le trafiquant d'armes présumé avait été arrêté dans un hôtel à Bangkok en mars 2008, au terme d'une opération menée conjointement par les forces thaïlandaises et des agents américains qui s'étaient fait passer pour des acheteurs potentiels agissant au nom des Farc. Piégé, Viktor Bout est alors incarcéré dans une prison de haute sécurité en Thaïlande.

En 2010, il est extradé de Thaïlande dans un jet spécialement affrété par les États-Unis pour être jugé. Reconnu coupable en novembre 2011 de trafic d'armes, il a été condamné en avril 2012 à New York à 25 ans de prison.

Un "marchand de mort" capable de fournir toutes sortes d'armes

Viktor Bout, né en 1967 au Tadjikistan, a suivi des études à l'Institut militaire des langues étrangères. Ce polyglotte, qui a "occupé à une époque un poste important au KGB, peut-être même celui de sous-directeur" selon l’ONU, aurait profité de l'effondrement de l'URSS au début des années 1990 pour mettre la main sur une flotte d'avions cargo obsolètes, mais surtout sur le colossal stock de matériel militaire du bloc de l’Est. D'après le New York Times, il bénéficiait, à la fin des années 1990, de la plus grande flotte privée au monde qui servait à convoyer toutes sortes d’armes comme les célèbres fusils mitrailleurs Kalachnikov, des lance-roquettes RPG, des tonnes de munitions, mais aussi des chars d’assaut et des hélicoptères d’attaque, notamment à destination de l’Asie, de l’Amérique du Sud, ou encore de pays africains sous embargo.

Une clientèle officieuse, voire officielle

Explicitement nommé dans plusieurs rapports de l'Organisation des nations unies (ONU), Viktor Anatolievitch Bout, "détenteur d'au moins cinq passeports différents" et connu sous au moins sept pseudonymes, est accusé d'avoir joué un rôle non négligeable dans l’embrasement des conflits en Sierra Leone, au Libéria, en Angola, au Rwanda, en Somalie et en RD Congo. C'est d'ailleurs de là que provient ce surnom de "marchand de mort". Bout est par exemple soupçonné d'avoir organisé, en s'appuyant sur les flottes de ses nombreuses compagnies aériennes, pas moins de 38 livraisons illégales d’armes en Afrique. On peut, par exemple, mentionner, au compte de ses méfaits présumés et contradictoires, la livraison d'armes aux rebelles de l'Union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola (UNITA), mais aussi au gouvernement de Luanda.

En Afghanistan, il aurait reproduit le même schéma en armant, d’une part, les forces du commandant Massoud et, d'autre part, ses ennemis, les Taliban. Selon plusieurs médias, son profil de trafiquant d’armes sans vergogne n'a pas empêché l'administration américaine de faire appel à ses services lors de l'invasion de l'Irak pour livrer des armes aux troupes américaines et à leurs alliés en 2004. Il aurait, selon ses dires, également transporté des soldats français au Rwanda et aidé au déploiement de Casques bleus au Timor-Oriental.

Verdict "politique"

Face à des accusations américaines multiples et répétées, le Russe a toujours affirmé s'être contenté de développer une activité de transport cargo tout à fait légale. "Je ne suis pas coupable, je n'ai jamais eu l'intention de tuer qui que ce soit, je n'ai jamais eu l'intention de vendre des armes à qui que ce soit, Dieu sait la vérité", lancera-t-il avant l'énoncé du verdict.

Le ministère russe des Affaires étrangères promettra alors de tout faire pour obtenir son retour en Russie, qualifiant le verdict de "politique". Moscou n'a eu de cesse, depuis, de fustiger son incarcération, signe, pour certains observateurs, que monsieur Bout a pu agir avec le consentement, au moins tacite, de responsables russes.