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Les Britanniques de souche minoritaires en 2050 ? Le grand changement démographique du Royaume-Uni

Une vue du drapeau britannique et du drapeau européen devant Big Ben à Londres.

© DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP

Evolution

C’est ce qu’indiquent les données publiées par l'équivalent britannique de l’Insee. A Londres, 2/3 des habitants appartiennent déjà à des minorités.

Jean-Paul Gourévitch est depuis 1987 consultant international sur l'Afrique, les migrations et l'islamisme radical. Il a enseigné à l'Université Paris XII Créteil. Écrivain, essayiste et formateur il est également spécialiste de la littérature de jeunesse. Il a notamment publié La France en Afrique 1520-2020 (L'Harmattan), La tentation Zemmour et le Grand Remplacement (Ovadia 2021), Le coût annuel de l'immigration (Contribuables Associés 2022).

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Atlantico : Selon l’ONS et le recensement 2021, 2/3 des Londoniens sont issus d’une minorité ethnique. Et pour la première fois depuis le début du recensement, moins de la moitié de la population britannique se dit chrétienne. A quel point observons-nous une évolution de la population britannique? Quelles sont les grandes tendances ? Comment expliquer ce changement démographique du Royaume-Uni? Alors que selon certains classements, Muhammad est devenu le premier prénom donné dans le pays, au sein des Britanniques de souche, l’inquiétude monte. Vont-ils être minoritaires en 2050 ? Est-ce une trajectoire possible ?

Jean-Paul Gourévitch : N’étant pas spécialiste de la démographie du Royaume-Uni , je ne me hasarderai pas à critiquer les résultats ni les méthodes de l’Office for National Statistics. J’ai bien lu que les Blancs ne constituent plus que 45% des résidents de la capitale britannique, (3,7 millions sur 8,2 millions) alors  qu’en 2001 la proportion était de 51% . Je dirai simplement que Londres ne représente que le point extrême d’une tendance qu’on retrouve également dans nombre de capitales  européennes et qui, dans l’ensemble de la population britannique, a vu en 10 ans le « groupe ethnique blanc » passer de 86% à 81,7% dont 9,3% se définissent d’ailleurs comme « asiatiques ». Ceci montre en tout cas que les statistiques ethniques aident à clarifier l’évolution d’une société et que ceux qui les refusent pour des raisons « scientifiques », ne veulent pas que l’opinion publique en soit informée.  

Quant au prénom Mohammed sous ses différentes déclinaisons, il arrivait déjà en tête ou en seconde position des prénoms masculins donnés aux nouveaux nés en 2010. Il traduit à l’évidence la progression de l’attachement à l’islam dans la population britannique alors que le christianisme connait une courbe inverse.  Sur la crédibilité des projections sur 2050, je m’en explique plus loin.

Depuis 2014, le nombre de citoyens allemands a baissé de 1,5 million, mais le nombre de migrants venus s'installer en Allemagne a lui augmenté de 4,3 millions. Ce qui a fait gagner au pays pas loin de 3 millions d'habitants en 8 ans. Observons-nous les chiffres d’un changement démographique d’ampleur européenne ?

Le cas allemand n’est pas spécifique. Il traduit un changement démographique qui s’est accéléré à partir de la grande vague migratoire de 2015. Si on met à part les pays du bloc de Visegrad, peu touchés par l’immigration extra-européenne, la plupart des pays de l’UE ont vu augmenter le nombre des immigrés et diminuer celui des autochtones, ce qui a entraîné une vive inquiétude chez certains de leurs concitoyens, voire des réactions xénophobes, car ils ont pensé que ces migrants feraient souche  et que les « natifs » deviendraient à terme minoritaires dans leur propre pays avec des risques d’affrontements tels qu’on a pu les observer ailleurs et par exemple au Liban. Les émeutes urbaines récentes en Belgique, où pourtant, en 2020, sur la population légalement enregistrée il n’y avait que 4,4% de Marocains mais 8,8% chez les moins de 18 ans, peuvent également interpeller. Ce qui n’autorise toutefois pas à  généraliser cette évolution à toute l’Union Européenne.  

Dans son interview croisée avec Michel Onfray, Michel Houellebecq a évoqué le « Grand remplacement», qui détaille l’idée selon laquelle le peuple français serait progressivement substitué par une population immigrée. « J’ai été très choqué qu’on appelle ça une théorie. Ce n’est pas une théorie, c’est un fait », a assuré l’écrivain. Ce à quoi Michel Onfray a ajouté que « c’est objectivement ce que disent les chiffres ». Est-ce que c’est ce que ces chiffres semblent confirmer au niveau purement statistique?

Je me suis largement expliqué sur le sujet dans La Tentation Zemmour et le Grand Remplacement (éditions Ovadia octobre 2021) en essayant de tenir les deux bouts de la chaîne.

Oui, il y a une transformation démographique quantitative de la France due à la réalité du solde migratoire réel.  Au solde migratoire positif de l’immigration, soit une moyenne de 250 000 personnes  venant en grande majorité des pays tiers, il faut en effet ajouter le solde migratoire négatif de l’expatriation soit une moyenne de 100 000 personnes  constituée pour l’essentiel par des « natifs ». On peut donc considérer globalement que, sur ces dernières années, le solde migratoire annuel non-européen tourne autour de 260 000. Il faut de plus cumuler ces données avec le solde naturel  des personnes d’origine étrangère qui est largement positif puisque l’indice de fécondité des femmes « natives » est inférieur à celui  des femmes issues de l’immigration et plus encore des femmes immigrées des pays tiers.

Non, cette évolution ne s’opère pas selon une trajectoire linéaire constante. Parce que personne ne peut dire si la transition démographique (les filles font moins d’enfants que leurs mères qui faisaient moins d’enfants que leurs grand-mères) qui touche aujourd’hui le Maghreb mais beaucoup moins l’Afrique subsaharienne et a des répercussions sur les populations immigrées en France, va se renforcer et à quel rythme. Parce que personne ne maîtrise les déplacements de population qui seront consécutifs à l’accélération du changement climatique, si effectivement elle se produit. Parce que nul ne peut mesurer l’impact qu’aura le développement de l’immigration virtuelle (personne née au Sud travaillant au Sud mais payée par le Nord) qui fonctionne déjà dans les domaines du secrétariat, de la gestion, ou du marketing téléphonique.  Plus généralement toute extrapolation sur des dizaines d’années est scientifiquement hasardeuse. D’ailleurs les futurologues, notamment ceux de la Division de la Population des Nations Unies, se sont régulièrement trompés dans leurs prévisions.

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