France
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Les Etablis, une «conciergerie» de la réparation en plein Paris

La vitrine, au 73 rue Beaubourg (IIIe arrondissement de Paris), fait la part belle à un outillage de bricolos dignes de ce nom. Mais une fois la porte des Etablis franchie, le spot a des allures de concept-store, où à un point de vente de vêtements de marques écoresponsables, de bijoux de créateurs et autres céramiques s’ajoute un café, dans la veine des salons de thé modernes qui émaillent Paris. Ce lieu hybride, en plein cœur de la capitale, n’a pourtant rien du dernier rade à la mode pour fashionistas en manque de nouveauté. Inauguré il y a un mois et demi, les Etablis, comme son nom le suggère, entend combler une sorte de vide : l’inexistence d’un service de proximité de la réparation multi-objets (comptez 15 euros pour la prise en charge d’un grille-pain et 25 euros pour celle d’un aspirateur), pierre angulaire de l’économie circulaire.

«Il y a une vraie demande et on l’a senti dès le jour de l’ouverture», souligne Juliette Karpa, 38 ans, cofondatrice de cette «conciergerie» aussi inspirée des ateliers de coréparation bénévoles, autrement appelés «repair cafés». A la différence près qu’ici l’on assume faire commerce de la réparation, grâce à deux réparateurs d’appareils électriques et électroniques rémunérés à la commission, et une quinzaine d’artisans spécialisés dans le cuir, le textile, les bijoux ou le matériel photo. «On tient à ce que ce soit une pratique de consommation responsable : cela a un coût», ajoute l’ex-communicante pour des ONG. Le projet, qui a été subventionné à hauteur de 170 000 euros après avoir été adopté dans le cadre des budgets participatifs de la ville et de la région, a germé à la suite de mésaventures avec une roue de valise.

Donner de la visibilité aux savoir-faire

«Elle était cassée et Juliette a mis plus de deux mois à trouver un réparateur de malles. Il lui a changé sa roue en dix minutes pour 20 euros, raconte Corinne Ngotat, 44 ans, l’autre fondatrice des Etablis, passée par une marque italienne de la fast fashion. Ce n’est pas normal de galérer autant.» Une expérience partagée par l’ensemble des consommateurs. Selon l’Agence de la transition écologique, 85% des Français ont envisagé de faire réparer un appareil et la moitié a demandé un devis de réparation au cours des deux dernières années. Mais le manque d’informations ou de confiance envers les réparateurs les a poussés à renoncer à cette option pour un quart d’entre eux. D’où l’envie des deux entrepreneuses de fédérer des artisans, à l’instar des annuaires professionnels (répar’acteurs ou commentreparer.com) qui ont essaimé ces dernières années, mais autour d’un lieu physique unique pour leur donner une visibilité.

Et Juliette Karpa d’insister : «En France, le savoir-faire est extraordinaire. Mais le faire-savoir n’est pas toujours au rendez-vous. Il faut valoriser cette expérience et ces métiers.» Exemple avec David Laher, 55 ans, artisan bronzier dont l’atelier est installé dans le XIe arrondissement. «Il y a de moins en moins d’ateliers car les gens ne recourent plus aux artisans. Or, un savoir-faire, ça se perd en une génération, observe ce restaurateur d’objets anciens en métal (lustres, horloges ou glaces du XVIIe et XVIIIe siècle). Mais les gens reviennent à la réparation pour les objets du quotidien, je le vois depuis le Covid. Ça ne nous a pas fait fermer les ateliers, au contraire.» Une conviction «de bon sens» qui a pour l’instant conduit à la réparation d’une quarantaine d’objets aux Etablis depuis l’ouverture de la boutique.