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Les femmes défilent contre la double peine des retraites

Les femmes défilent contre la double peine des retraites
Les femmes sont descendues en nombre pour demander une retraite égale à celle des hommes.

Photo Julie Desbois

Par Fabien NOUVÈNE - f.nouvene@charentelibre.fr, publié le 7 février 2023 à 19h18.

Les femmes ont manifesté en nombre, ce mardi 7 février à Angoulême. Elles dénoncent une réforme des retraites qui les pénalise davantage que les hommes. Elles interrogent aussi un monde du travail inégalitaire.

Congé pour s’occuper des enfants, bas salaires, temps partiels… Les femmes triment plus que les hommes pour décrocher une retraite décente. Ce mardi, elles étaient nombreuses à défiler parmi les 5 000 (selon la police) à 8 000 (selon les syndicats) manifestants contre la réforme des retraites, dans le centre-ville d’Angoulême. Elles protestent contre un projet de loi qui ne comble pas les inégalités...

Congé pour s’occuper des enfants, bas salaires, temps partiels… Les femmes triment plus que les hommes pour décrocher une retraite décente. Ce mardi, elles étaient nombreuses à défiler parmi les 5 000 (selon la police) à 8 000 (selon les syndicats) manifestants contre la réforme des retraites, dans le centre-ville d’Angoulême. Elles protestent contre un projet de loi qui ne comble pas les inégalités avec leurs collègues masculins. Au contraire, « on ramasse encore plus qu’eux », s’exaspère Dominique, salariée de la grande distribution.

Principale fracture : la maternité. Aujourd’hui environ 97 % des bénéficiaires d’un congé parental sont des mamans. Catherine, mère de deux enfants, a fait ses comptes. « Pour le deuxième j’ai pris un 80 % pendant deux ans, commence la secrétaire médicale à Camille Claudel. Ça m’a coûté deux trimestres. » Pour cette raison, sa collègue Coraline n’a pas demandé de temps partiel à la naissance de son fils. « Passer du temps avec ses enfants c’est que du bonheur mais ça nous prend… du temps de cotisation. »

Camille Doré et son compagnon Paolo Gresser défilent poussette en main. « J’ai eu mon congé maternité de trois mois, j’aimerais m’arrêter plus mais je ne peux pas financièrement », regrette l’architecte de 31 ans. Elle envisage de passer à 80 %. « Mais je sais que je vais le payer à la fin. » Dans ces conditions, la retraite ce ne sera pas avant 67 ans. Fabienne aussi a eu une fille, elle s’est arrêtée pour l’élever. Pour éviter de partir trop tard, « j’ai dû acheter des années », explique cette enseignante à Saint-Amant-de-Boixe. Ce sera 65 ans. Guylaine Azaïs se dit « privilégiée ». Elle est partie à la retraite à 60 ans et 9 mois. « J’ai commencé tôt (18 ans), ça a compensé mon arrêt pour ma fille. » Débuter tôt, acheter des trimestres, partir plus tard… Autant dire bûcher plus pour le même traitement que les hommes.

J’ai eu mon congé maternité, j’aimerais m’arrêter plus mais je ne peux pas financièrement.

Au-delà de la maternité, les travailleuses blâment un système qui les handicape toute leur carrière. « On est payée 19 % de moins que les hommes, sur des postes moins qualifiés, avec plus de temps partiel, liste Fanta Diallo, membre du groupe féministe Collectif 8 mars Angoulême. Tous ces écarts se retrouvent à la retraite, c’est la double-triple-quadruple peine. » Murielle, ex-salariée du médico-social, en témoigne : « Je me suis arrêtée longtemps pour m’occuper de mon enfant malade, retrace-t-elle. À mon retour, j’ai été mise de côté au travail, jusqu’au burn-out. Puis j’ai été au chômage. » Conséquence : une retraite à 67 ans pour moins de 1 000 € par mois.

La place de la femme dans la société

Les plus jeunes voient dans ce mouvement une opportunité de questionner la place de la femme dans la société. « C’est plus global que les retraites, estime Maëlle Gazaud, 21 ans, en service civique à l’Unicef. Il faut que les femmes ne soient pas les seules à s’arrêter pour les enfants par exemple. » Car un arrêt, « ce sont des promotions freinées, des études arrêtées », déplore Fanta Diallo. Maylis Malossane, présidente de l’association Au fil des femmes, complète : « On doit faire des choix cornéliens entre vie pro et vie perso que les hommes n’ont pas à faire. »

Sarah, 25 ans, pousse la réflexion plus loin. « Aujourd’hui on divorce tard, estime l’étudiante. Moralement ce n’est plus un problème de se séparer à 55 ou 60 ans, mais (le système de protection sociale) rend plus difficile un départ du foyer pour la femme. » Maylis Malossane confirme : « Beaucoup de femmes restent pour des raisons financières, sinon elles vont être pauvres. » Le sujet n’est pas nouveau. Sarah y voit néanmoins le constat de progrès trop lents. « On défile contre une réforme qu’on juge néfaste pour tous alors qu’on devrait être en train de discuter d’une réforme bénéfique aux femmes. »