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Mardi SF : Lord Cochrane toujours aux basques de Ctulhu

L’arrivée prochaine en «Pléiade» de H.P. Lovecraft, en retard de vingt-cinq ans sur sa consœur «Bouquins», est la dernière manifestation du poids pris par le maître du fantastique américain. Jeu vidéo inspiré par Ctulhu, flopée de nouvelles traductions, films, livres, séries télé y faisant référence pour valider des liens parfois arachnéens avec son univers : Lovecraft est partout. Des fruits de cette explosion souvent opportuniste, la série du Chilien (aujourd’hui parisien…) Gilberto Villarroel est l’un des plus attachants. En 2016, un «Cochrane vs Ctulhu» confrontait au dieu pieuvre un nouveau héros : Lord Cochrane, transposition fantaisiste d’un personnage réel, marin britannique ennemi juré de Napoléon et rêvant d’être réintégré dans la marine d’où il a par erreur été chassé…

Une longue descente sous terre

Trois volumes suivront ce premier essai. Celui qui nous intéresse ici, le quatrième, fait directement suite au précédent, Lord Cochrane et le trésor de Selkirk, diptyque placé chronologiquement entre le premier et le deuxième roman de la série. Les efforts faits pour camper un contexte historique sérieux, un peu envahissants dans le précédent volume, sont évacués, et l’on plonge ici d’emblée dans l’action. Cochrane s’y retrouve à explorer les «Montagnes hallucinées», l’une des plus fameuses terres lovecraftiennes. A ses côtés, son fidèle ami le capitaine Eonet et la belle Marie Graham, avec qui il dénouera enfin les ambiguïtés des précédents volumes. En face, le très méchant Corrochano, pirate haineux.

Pour abriter leur confrontation, une longue descente sous terre, dans un tunnel situé entre l’Amérique du Sud et Deception island, peuplé d’un bestiaire familier au lecteur de Lovecraft : les «ailes noires», les monstrueux «shoggots» et les «grands anciens» que, de façon regrettable, l’on s’obstine à désigner ici sous leur nom anglais de «Old ones». La cité engloutie de R’lyeh et Ctulhu sont au centre du récit, et même le «Nécronomicon» a droit à une citation. Les chapitres sont courts, l’écriture toujours agréable, le rythme implacable. Jamais, erreur qui gâchait par exemple le plaisir pris au «Boro» du duo Frank-Vautrin, récemment ressuscité, Villaroel ne cherche à se monter plus intelligent que ce qu’il raconte. Il joue la carte du roman d’aventures mâtiné de fantastique avec une honnêteté louable. Les ombres prestigieuses sollicitées régulièrement (Lovecraft bien sûr mais aussi Jules Verne ou Edgar Poe) ne font qu’ajouter au plaisir très premier degré pris à ce roman, qui s’offre même le luxe de nous introduire… au jardin d’Eden.

Lord Cochrane et les montagnes hallucinées de Gilberto Villaroel, traduit de l’espagnol (Chili) par Jacques Fuentealba, Aux forges de Vulcain, 435 pp., 22 €. Les trois précédents volumes sont disponibles en Pocket.