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«On ne réglera pas les déserts médicaux par la contrainte», estime François Braun

Alors que les députés veulent réguler la liberté d'installation des médecins, le ministre de la santé affirme que cela ne ferait qu'aggraver la situation.

L'Assemblée va rouvrir le débat sur les déserts médicaux avec l'examen mi-juin de la proposition de loi du député Frédéric Valletoux (Horizons, camp présidentiel) sur l'accès aux soins, qui servira de fenêtre de tir à une coalition transpartisane prônant davantage de mesures coercitives. Mais ce serait «un Pyrrhus de la santé, qui à force de vouloir une victoire rapide ne va faire qu'aggraver la situation» a dénoncé François Braun, invité dimanche du Grand jury RTL-LCI-Le Figaro. «À force d'imposer des contraintes aux médecins, ils vont faire un autre métier» a martelé le ministre de la santé, affirmant que la solution tient plutôt dans la meilleure coordination entre les soignants - médecins, infirmières, kinés, pharmaciens etc. - au cœur de la loi Rist, promulguée mi-mai. «Il faut fluidifier tout cela. Un assistant médical permet à un médecin généraliste de suivre 10% de patients en plus. Un assistant dentaire permet à un dentiste de prendre 30% de patients en plus», a affirmé le ministre, rappelant que la pénurie de soignants est un problème mondial.

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Alors que le projet de loi immigration porté par Gérald Darmanin prévoit de faciliter l'obtention d'un titre de séjour pour les travailleurs étrangers dans les secteurs en tension, François Braun veut «étendre ce qui existe déjà pour les chercheurs avec le dispositif «Passeport Talents», aux métiers de la médecine et de la pharmacie». Concrètement, ces professionnels de santé étrangers, qui auraient «un contrat avec un établissement», disposeraient de «13 mois pour passer l'examen de validation des connaissances. S'ils réussissent, ils obtiendraient un titre de séjour de 4 ans leur permettant de faire venir leur famille». Et après ? «On verra s'ils peuvent demander la nationalité française«, a répondu François Braun, tout en mettant en garde de «ne pas vider les autres pays de leurs forces médicales, si l'on ne veut pas que leurs populations viennent ensuite se faire soigner en France. Il y a un équilibre à trouver.»

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Un sujet politiquement sensible alors que la droite pousse depuis des années pour restreindre aux seuls soins urgents l'Aide médicale d'État (AME), qui permet aux étrangers en situation irrégulière d'être soignés gratuitement en France, et coûte au budget de l'État plus d'un milliard d'euros par an. Si Gérald Darmanin a indiqué que le projet de loi immigration serait l'occasion d'y «réfléchir», le ministre de la santé défend que «l'AME ne pèse que 0,5% du budget de la Sécu» et fait valoir que «refuser de soigner un étranger avec une infection fait courir le risque qu'il la transmette à d'autres». Si l'AME vise effectivement à éviter les risques de contagion, «en revanche il est anormal qu'il y ait des filières pour venir faire en France des soins qui peuvent être faits dans les pays d'origine», a reconnu François Braun. Le ministre a promis de «regarder quels pays cela concerne et s'ils disposent des moyens de soins». Mais le sujet est complexe : «est-ce qu'on va soigner un diabète  déséquilibré car c'est urgent, et ensuite le laisser sans surveillance, au risque qu'il se déséquilibre à nouveau ?»

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Une semaine après l'agression mortelle d'une infirmière au CHU de Reims, le ministre de la santé a également réaffirmé sa volonté de lutter contre toutes formes de violence envers les soignants, mais affirme que l'hôpital doit rester «un lieu ouvert». Il a lancé un audit de sécurité dans tous établissements, dont les résultats attendus fin juin doivent permettre de mettre en place «des mesures toutes simples mais concrètes», promet-il. Mais le fossé est profond entre les propos rassurants du ministre et les syndicats de soignants dont 4 sur 5 ont boycotté jeudi une réunion au ministère, dénonçant une «opération de communication» cachant un manque de moyens.

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Le ministre, qui s'est également dit déterminé à lutter contre les addictions, s'est déclaré dimanche favorable à l'interdiction des «puffs», cigarettes électroniques jetables prisées des jeunes. Mais il envisage d'ouvrir aux pharmaciens la prescription de certains substituts nicotiniques sous forme de cigarettes électroniques. Interrogé sur un éventuel remboursement par la Sécu, François Braun a répondu que le sujet était «sur la table dans le cadre du prochain plan antitabac» du gouvernement, prévu sur la période 2023-2028.